Le coût faramineux des émeutes met en tension les finances publiques et le secteur assurantiel. Pour y faire face, le gouvernement français veut instaurer une surprime obligatoire de 5 % sur les contrats d’assurance, inspirée du modèle des catastrophes naturelles. Mais cette mesure suscite une levée de boucliers et déclenche la colère des professionnels comme des particuliers.
Alors que les émeutes se multiplient en France, les assureurs peinent à absorber l’ampleur des dégâts et les réassureurs quittent le marché. Dans ce contexte, la solution d’une garantie publique prend de plus en plus de place. Après des années de blocage, le dossier a connu une avancée cet été avec la présentation par la direction générale du Trésor d’un dispositif de partage du risque entre l’État, les assureurs et les réassureurs privés.
Un mécanisme national pour couvrir un risque croissant
Comme le révèle Les Échos, « la question reviendra sur la table, peu importe l’exécutif », affirme un fin connaisseur du dossier. Malgré le vote de confiance du 8 septembre et une éventuelle chute du gouvernement Bayrou, l’ambition demeure : inscrire le projet dans le prochain budget. Pour l’heure, il reste suspendu à l’aval de Bercy.
Depuis les violentes émeutes de ces dernières années, les assureurs alertent sur la difficulté de couvrir durablement les dommages. Plusieurs compagnies avaient d’ailleurs récemment choisi de retirer la garantie « émeutes » de certains contrats, notamment dans des zones jugées trop à risque.
Le gouvernement prévoit de vous faire payer une surprime sur vos contrats d’assurance pour payer les dégâts des émeutes. Scandaleux https://t.co/Ip7KXbwBiC
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Face à cette situation, le gouvernement s’apprête à imposer une surprime obligatoire de 5 % sur tous les contrats d’assurance « dommages aux biens ». L’objectif : créer un fonds de réassurance étatique doté d’environ 775 millions d’euros par an, visant à mutualiser le coût des dégâts à l’échelle nationale. Selon les projections, cette surprime permettrait de dégager jusqu’à 860 millions d’euros chaque année, dont près de 300 millions seraient directement injectés dans le fonds, précisent nos confrères.
La couverture du risque émeute deviendrait obligatoire
Le projet gouvernemental prévoit également de rendre obligatoire la couverture du risque émeute dans tous les contrats de biens, y compris ceux qui avaient été exclus par certains assureurs privés, comme le mentionne le site sénat.fr. Cette mesure répond à l’une des principales inquiétudes des collectivités locales, souvent en première ligne lors des troubles urbains.
Selon l’Association des maires de France (AMF), « il deviendrait désormais obligatoire pour les assureurs de couvrir les dommages résultant de ces émeutes ». Un assureur refusant de protéger une commune sur ce risque s’exposerait alors au « retrait de son agrément ». Le financement passera par la mutualisation, via une « cotisation additionnelle » payée par l’ensemble des assurés, y compris sur des biens jusqu’ici exclus.
Le gouvernement voudrait imposer une surprime d’assurance de 5% pour tous les Français, afin de couvrir les dégâts provoqués par les émeutes de 2023 : ils se foutent de nous du matin au soir, ce n’est plus supportable ! pic.twitter.com/VqtoYfE9U3
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La définition du « risque émeute » encore floue
Les parlementaires discutent d’un système « à la manière des catastrophes naturelles », où l’État et les assureurs partagent le risque. Selon le gouvernement, ce dispositif garantirait que tout le monde reste couvert, répartirait les pertes de façon équitable et éviterait que seules les zones les plus touchées paient le prix des émeutes, explique encore sénat.fr.
La définition du « risque émeute » reste toutefois floue. Selon Les Échos, deux options sont à l’examen pour définir le déclenchement de la garantie : suivre une règle juridique stricte ou laisser l’État décider au cas par cas. Pour Romain Dupeyré, avocat, « cette option a l’avantage de proposer, au cas par cas, une définition définitive de ce qu’est une émeute. Mais comme la décision est prise par l’État, elle pourrait être sujette à des considérations politiques ou budgétaires ». Les litiges pourraient alors se multiplier et retarder les indemnisations.
Imposer à l’ensemble des assurés une surprime de 5 % sur leur contrat d’assurance pour alimenter un fonds d’indemnisation des destructions commises lors des émeutes est un scandale absolu !
Ce gouvernement n’a décidément plus aucune limite à la provocation et au mépris à l’égard… https://t.co/c44XDhdunr
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Les casseurs « souvent insolvables » ne payent pas
Malgré la volonté affichée de protéger l’assurabilité de tous, le projet suscite de vives réactions et ne fait pas l’unanimité. Ce vendredi 5 septembre sur CNews, le journaliste Thomas Bonnet a critiqué ce projet visant à imposer cette surprime de 5 % sur les contrats d’assurance de tous les assurés pour couvrir les dégâts des émeutes, comme s’il s’agissait d’une « tempête » ou d’une « inondation ».
« Encore une fois, l’État demande aux Français de payer pour son incapacité à faire régner l’ordre dans les quartiers difficiles », a-t-il asséné, ajoutant que « les Français sont en train de devenir de véritables vaches à lait ».
Pointant le fait que les émeutes deviennent désormais « une nouvelle forme d’aléas, une fatalité », qui « peut s’abattre à tout moment » et « n’importe où », il a indiqué que la question est « de savoir pourquoi ce serait à nous de payer les dégâts de quelques délinquants ». « Les casseurs sont souvent insolvables et ne payent pas à la hauteur de leur préjudice », a-t-il martelé, qualifiant ce projet de véritable « scandale ».