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Nouvelle stratégie de sécurité nationale : ce que les États-Unis exigent des Européens

La nouvelle stratégie de sécurité nationale des États-Unis marque un tournant majeur : moins d’engagements internationaux, une protection accrue des intérêts intérieurs et un retour aux réalités stratégiques. L’Europe, l’Amérique latine et la région indo-pacifique sont confrontées à de nouvelles attentes et à des limites claires au soutien américain.

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Le président Trump lors de la réunion du Cabinet à la Maison-Blanche, à Washington DC, le 26 août 2025. Sont également présents sur la photo (de g. à dr.) : le secrétaire à la Santé et aux Services sociaux Robert Kennedy, le secrétaire à l'Intérieur Doug Burgum, le secrétaire d'État Marco Rubio, le secrétaire à la Défense Pete Hegseth, le secrétaire au Commerce Howard Lutnick et le secrétaire aux Transports Sean Duffy.

Photo: : Mandel Ngan/AFP via Getty Images

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Réalisme, pragmatisme, intérêt personnel et une réticence croissante à jouer les pompiers dans les conflits déclenchés par d’autres pays : voilà l’essence de la nouvelle stratégie de sécurité nationale américaine. Si les Américains entendent rester la force politique dominante dans l’hémisphère occidental, ils ne souhaitent plus assumer la responsabilité de l’ordre mondial dans son ensemble – et l’OTAN n’est plus perçue comme ayant un potentiel d’expansion illimité.
Une grande partie de la nouvelle stratégie semble être une version révisée et actualisée de la doctrine Monroe, adaptée par l’administration Trump. Elle stipule explicitement que les États-Unis doivent être « la puissance dominante dans l’hémisphère occidental, condition essentielle à leur sécurité et à leur prospérité ». Selon elle, cela permettra aux États-Unis d’affirmer leur position avec assurance dans leur région.
La sécurité de sa sphère d’intérêt principale, précise-t-on, garantit également la puissance des États-Unis, tant sur le plan intérieur qu’international. Un élément nouveau, propre à l’ère Trump, est l’importance croissante accordée à la Chine dans la stratégie actuelle. Le régime communiste chinois est perçu comme un défi géopolitique majeur.
En conséquence, selon la nouvelle stratégie américaine, l’une des tâches les plus importantes consiste à empêcher l’expansion de Pékin sur le continent américain. Cela implique notamment d’empêcher Pékin d’accéder aux ports stratégiques, aux systèmes de télécommunications et aux infrastructures d’Amérique latine.

Les Américains ne veulent pas exclure l’Europe, mais l’ère des chèques en blanc est révolue

Avant tout, il ne faut plus accorder de chèque en blanc à l’Europe en matière de politique de sécurité ou de questions militaires. Si les alliés de l’OTAN continueront d’être soutenus, ce soutien se limitera à un rôle de coordination stratégique.
En filigrane, on perçoit une critique acerbe des évolutions politiques, idéologiques et sociales qui se sont installées en Europe ces dernières décennies.
Ces facteurs sont également perçus comme des causes d’une évolution marquée par la crise, alimentant le déclin économique, culturel et démographique, ainsi que la polarisation politique et l’escalade militaire.
Néanmoins, on ne saurait « négliger l’Europe », car cela irait à l’encontre des objectifs stratégiques américains.

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Cependant, les États-Unis exhortent les Européens à élargir leur perspective eurocentrée et à prendre en compte les intérêts de leur allié.
Cela implique d’abandonner les politiques autodestructrices qui, à terme, affectent également les Américains. L’un des facteurs contribuant à cette évolution est le renforcement des armées et l’augmentation des investissements des partenaires européens de l’OTAN, au lieu de continuer à dépendre de la puissance militaire américaine.

Les Européens devraient se réinventer – sans idéologies ni politiques de confrontation avec la Russie

La paix en Ukraine est également une priorité pour les États-Unis. C’est pourquoi les Européens sont invités à renoncer à des espoirs irréalistes quant à l’issue de la guerre. Il leur appartient plutôt de créer les conditions nécessaires à la réussite de la reconstruction de l’Ukraine dans la paix et à la stabilisation de ses relations avec la Russie.
Dans sa nouvelle stratégie de sécurité nationale, les États-Unis reconnaissent qu’il leur incombe principalement de normaliser les relations entre l’Europe et la Russie et de réduire les risques de conflit. Toutefois, ils précisent également qu’une fois la stabilité rétablie, il appartiendra aux Européens eux-mêmes d’en assurer le maintien.
Les Européens devront également mettre en œuvre des réformes au sein de leurs sociétés. Ces réformes sont dans leur propre intérêt, car sans elles, l’Europe risque de disparaître en tant que civilisation.
Elle doit aussi restaurer sa confiance en elle-même et son identité occidentale, ce qui implique de mettre fin à l’érosion des libertés civiles. Les États-Unis suivront de près ces développements.
« Nous nous opposerons aux restrictions antidémocratiques, imposées par les élites, aux libertés fondamentales en Europe, dans le monde anglophone et dans le reste du monde démocratique, en particulier parmi nos alliés. »
La stratégie de sécurité nationale préconise également un meilleur accès des États-Unis aux marchés européens.
Par ailleurs, Washington insiste sur la solidarité face aux pratiques économiques hostiles telles que la création délibérée de surcapacités, le vol de technologies et le cyberespionnage.

Les États-Unis veulent préserver leurs eaux territoriales de la présence des cartels de la drogue

L’approche offensive des États-Unis contre les cartels de la drogue – recourant si nécessaire à la force létale – et l’expansion des opérations de la marine et des garde-côtes témoignent également de la priorité accordée aux intérêts américains.
Le renforcement de la présence militaire dans les mers entourant le continent américain vise à contrôler les flux migratoires aux États-Unis. Par ailleurs, il existe une volonté de lutter contre les narcoterroristes et autres réseaux criminels qui nuisent aux communautés américaines.
Le document indique également :
« Nous voulons un hémisphère qui reste libre de toute intrusion étrangère hostile ou de la possession d’actifs importants et qui soutienne les chaînes d’approvisionnement essentielles. »
En outre, la nécessité de garantir en permanence l’accès aux installations stratégiques importantes est soulignée.
En résumé, avec sa nouvelle stratégie de sécurité nationale, Trump réoriente les priorités vers une approche qui continue de mettre en avant la puissance impressionnante des États-Unis à l’échelle mondiale. Cependant, cette puissance sera davantage concentrée, et la sécurité des frontières nationales ainsi qu’une base industrielle intérieure solide sont jugées plus importantes que la présence américaine dans les zones de conflit étrangères. Une plus grande autonomie est également exigée des alliés.

Changement de cap au Moyen-Orient et en Asie

Les États-Unis considèrent généralement la Chine comme leur principal rival économique. Toutefois, dans la région indo-pacifique, s’ajoute la menace militaire qui pèse sur les alliés, notamment les Philippines et Taïwan. Les Américains maintiennent leurs engagements dans ces pays, mais exigent également une plus grande autonomie vis-à-vis de la Chine.
Les États-Unis entendent positionner leur présence de manière à repousser toute agression au sein de la première chaîne d’îles. Cependant, leurs partenaires, notamment l’Australie, le Japon et la Corée du Sud, devront participer aux préparatifs et aux activités afférents. La restructuration économique et la dissuasion militaire sont destinées à se renforcer mutuellement dans le cadre des efforts conjoints visant à dissuader toute agression chinoise potentielle.
Une rupture avec les conceptions précédentes est également imminente au Moyen-Orient. Les États-Unis se concentreront sur la protection des voies maritimes stratégiques, la sécurité de leurs partenaires clés, la lutte contre le terrorisme et la prévention des zones d’influence hostiles.
La défense de leurs propres intérêts demeure primordiale ; la construction nationale cède la place à la coopération. L’élargissement des accords d’Abraham vise à renforcer la coopération avec le monde musulman. L’accent sera mis sur la sécurisation de leur approvisionnement énergétique, la région du Golfe, la mer Rouge et Israël.

Les États-Unis restent « notre plus grand allié », souligne la Cheffe de la politique étrangère de l’UE

Suite à la publication de la nouvelle stratégie de sécurité nationale américaine, qui marque une nette distanciation de l’Europe, la Haute Représentante de l’Union européenne, Kaja Kallas, a réaffirmé la pérennité de l’alliance entre l’Europe et les États-Unis.
« Les États-Unis demeurent notre principal allié », a déclaré Mme Kallas samedi lors du Forum de Doha, la conférence diplomatique annuelle qui se tient dans la capitale qatarie.
« Bien sûr, les critiques sont nombreuses, mais je pense qu’elles sont en partie fondées »

Kaja Kallas, Haute Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères

Les points de vue des deux parties ne convergent pas toujours, « mais je crois que le principe fondamental demeure », a-t-elle ajouté.
« Nous sommes les plus grands alliés et nous devons rester unis. »
Concernant la guerre en Ukraine, elle a réaffirmé qu’aucune « paix durable » ne pourrait être atteinte si l’Ukraine était soumise à des « restrictions et à des pressions ». « Si l’agression est récompensée, elle se reproduira », a-t-elle averti, faisant référence à la guerre d’agression menée par la Russie.
Le ministre allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul, a déclaré vendredi, au sujet de la nouvelle stratégie de sécurité américaine, que les États-Unis « sont et resteront notre allié le plus important » au sein de l’OTAN. Il a toutefois souligné que l’Allemagne n’a pas besoin de « conseils extérieurs » sur les questions de liberté d’expression ni sur « l’organisation de nos sociétés libres ».
Reinhard Werner écrit pour Epoch Times sur l'économie, les dynamiques sociales et les questions géopolitiques. Il s'intéresse particulièrement aux relations internationales, aux migrations et aux conséquences économiques des décisions politiques.

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