Taxe Zucman : Le Medef prépare en riposte « un énorme meeting » des chefs d’entreprise

Patrick Martin lors de la rencontre des entrepreneurs français, le REF 2025, organisée par le MEDEF au Stade Roland Garros, à Paris, le 28 août 2025.
Photo: MAGALI COHEN/Hans Lucas/AFP via Getty Images
Face aux menaces fiscales qui planent sur le monde entrepreneurial français, Patrick Martin, patron du Medef, monte au créneau. L’organisation patronale prépare une riposte d’envergure pour contrer ce qu’elle perçoit comme une offensive dangereuse contre les entreprises.
Sans prévenir ses homologues, le dirigeant de la première organisation patronale française a créé la surprise mardi en annonçant l’organisation imminente d’un « énorme meeting ». Cette mobilisation express, prévue « dans quelques jours », vise à défendre « positivement et joyeusement » l’image du patronat français, selon ses propres termes lors de l’événement BIG de Bpifrance.
La colère des chefs d’entreprise
Cette annonce surprise fait suite aux menaces brandies mi-septembre par M. Martin, qui avait promis une « grande mobilisation patronale » en cas d’augmentation des impôts dans le cadre du projet de budget 2026. Le mystère demeure cependant total sur les détails concrets de cet événement : ni date précise, ni lieu n’ont été communiqués par le Medef.
Amir Reza-Tofighi, qui dirige la CPME, confirme l’état d’esprit explosif du milieu entrepreneurial. « Il y a actuellement une colère des chefs d’entreprise qui ont l’impression d’être caricaturés dans le débat public », explique-t-il à l’AFP. Cette frustration grandit face aux débats sur la taxation des plus fortunés, un sujet brûlant dans les négociations budgétaires actuelles.
Le président de la CPME adopte toutefois une approche plus mesurée que son homologue du Medef, privilégiant des « discussions » en fonction « des arbitrages budgétaires qui seront pris » plutôt qu’une mobilisation immédiate.
Pour le représentant des entreprises de proximité : « une erreur magistrale »
Michel Picon, à la tête de l’U2P représentant les entreprises de proximité, boycotte purement et simplement cette initiative. Sa critique est cinglante : il reproche à Patrick Martin de n’avoir « pas pris soin que ses partenaires ne découvrent pas cette annonce dans la presse ». Un manque de consultation qu’il qualifie sarcastiquement de politique du « ralliez-vous à mon panache blanc ».
Plus encore, M. Picon considère cette mobilisation comme « une erreur magistrale » au pire moment. « Il ne faut pas donner l’impression que le monde de l’entreprise est opposé à celui du travail », argumente-t-il, pointant du doigt le risque de fracture sociale. Dans le contexte actuel de « pagaille », marqué par l’absence de gouvernement stable et de budget voté, cette sortie médiatique pourrait s’avérer contre-productive.
La « taxe Zucman » dans le viseur
Au cœur de cette levée de boucliers patronale se trouve la proposition de « taxe Zucman », du nom de l’économiste Gabriel Zucman. Cette mesure fiscale révolutionnaire prévoit d’imposer à 2% minimum par an le patrimoine des 1 800 Français les plus riches, y compris leurs actifs professionnels.
Patrick Martin ne cache pas son hostilité à cette proposition qu’il qualifie de « théorie dangereuse ». Avec un jeu de mots provocateur, il assène : « Moi, je ne sais pas danser la Zucmania, et je n’ai pas l’intention de m’y adonner. » Cette taxe cristallise les tensions entre le gouvernement de Sébastien Lecornu et le Parti socialiste dans les négociations budgétaires.
Rendez-vous crucial à Matignon
L’épreuve de vérité aura lieu mercredi après-midi à Matignon, où MM. Martin, Reza-Tofighi et Picon rencontreront ensemble le Premier ministre Sébastien Lecornu. Cette réunion s’annonce déterminante pour l’avenir des relations entre l’exécutif et le monde patronal.
Le timing de cette rencontre n’est pas anodin : elle intervient alors que le gouvernement cherche le soutien du PS pour éviter une censure sur le budget, un soutien qui pourrait passer par des concessions fiscales touchant les plus fortunés.
Une offensive de charme pour redorer l’image de marque des grandes entreprises
Face aux « contre-vérités » qui circulent selon lui, Patrick Martin veut rétablir les faits. Il rejette catégoriquement l’image « d’actionnaires assoiffés de dividendes et indifférents à l’intérêt général », rappelant que les entreprises du Medef emploient 12 millions de salariés et contribuent massivement à l’économie nationale.
Cette stratégie de communication trouve un écho chez l’Afep, le lobby des 110 plus grands groupes privés français, qui présentera mercredi sa « contribution économique et sociale » chiffrée pour 2024. Un argumentaire destiné à démontrer l’utilité sociale des grandes entreprises dans un contexte de défiance croissante.
Frédéric Coirier, coprésident du Meti représentant les entreprises de taille intermédiaire, apporte son soutien à la démarche du Medef, qualifiant la taxe Zucman de « tueuse d’ETI ». Cette convergence témoigne d’une mobilisation qui dépasse les seules grandes entreprises pour toucher l’ensemble du tissu entrepreneurial français.
Avec AFP

Articles actuels de l’auteur









