Des juristes et des organisations de défense des droits humains mettent en garde les responsables du Queensland contre les risques d’une coopération avec le Renji Hospital de Shanghai, en Chine, au vu des soupçons liant son pôle de transplantation à des prélèvements d’organes à grande échelle.
L’établissement est présenté comme « le plus grand centre de greffe de foie de Chine » et « le plus grand centre international de greffe hépatique pédiatrique ».
Selon des médias officiels de Shanghai, l’hôpital — également connu sous le nom d’Institut de transplantation d’organes de Shanghai — réalise des greffes hépatiques pédiatriques avec donneur vivant.
Il évoquait à la place la hausse des exportations et la participation à une exposition. Toutefois, Epoch Times a appris qu’une délégation conduite par la ministre du Commerce, Ros Bates, avait exploré avec le Renji Hospital des pistes de formation et d’essais cliniques, l’établissement entretenant des liens avec l’appareil militaire du PCC.
Selon nos informations, aucun engagement n’a été pris, mais cette prise de contact attire l’attention de juristes et d’ONG au regard du profil et du passé de l’hôpital en matière de greffes.
Ces acteurs demandent de suspendre toute négociation future dans l’attente d’un examen indépendant sur les plans éthique et des droits humains.
Vives inquiétudes sur l’approvisionnement en organes
Dans une déclaration conjointe, l’International Coalition to End Transplant Abuse in China et Be Slavery Free avertissent qu’une collaboration avec l’hôpital présente des risques spécifiques en matière de droits humains.
« Au cours de la visite, la ministre a étudié des opportunités en matière de développement professionnel, d’essais cliniques et de formation à la gestion hospitalière. Même si la médecine de la transplantation n’a pas été explicitement citée, l’implication d’un établissement de greffe soulève de sérieuses préoccupations », indiquent les deux organisations.
« À défaut de garanties claires excluant toute activité liée à la transplantation, Queensland Health s’expose à des risques réputationnels et juridiques, compte tenu de l’opacité persistante et de l’absence de traçabilité de l’approvisionnement en organes en Chine. »
Parmi les risques identifiés figurent la formation potentielle de chirurgiens transplantologues amenés ensuite à participer à des opérations contraires à l’éthique, la fourniture de dispositifs médicaux ou de produits pharmaceutiques utilisés lors de greffes illicites, et la collaboration involontaire à des recherches cliniques impliquant des organes prélevés sans consentement légal ni traçabilité.
Cheng Peiming, pratiquant de Falun Gong auquel une partie du foie et du poumon a été prélevée de force en Chine, montre sa cicatrice lors d’une conférence de presse à Washington, le 9 août 2024. (Madalina Vasiliu/Epoch Times)
« Aucune collaboration médicale ne doit se faire à l’aveugle », déclare David Matas, avocat canadien spécialisé en droits humains et candidat au prix Nobel de la paix, actuellement en visite en Australie.
« Le système de transplantation en Chine fonctionne toujours sans transparence de base ni contrôle indépendant. Conclure des partenariats dans un tel contexte expose non seulement à un risque d’atteinte à la réputation, mais aussi à une complicité de graves violations des droits humains », susceptibles d’entraîner des conséquences juridiques au regard des cadres internationaux.
Avant toute coopération supplémentaire avec le Renji Hospital de Shanghai — ou avec tout établissement chinois réalisant des transplantations —, la Coalition et Be Slavery Free demandent au gouvernement du Queensland de marquer une pause afin d’obtenir un avis d’experts indépendants, et d’adopter une politique interdisant les partenariats avec les institutions incapables de démontrer une transparence complète sur l’origine des organes.
« Le sujet n’est pas l’échange médical en général », souligne la professeure émérite Wendy Rogers (université Macquarie).
« Le problème, c’est la médecine de la transplantation en Chine, qui enfreint les normes éthiques internationales. Le déficit de transparence et les preuves crédibles d’abus graves liés aux greffes rendent l’engagement avec le secteur chinois de la transplantation incompatible avec les standards éthiques et de droits humains internationaux. »
Conclusion du China Tribunal sur les pratiquants de Falun Gong
En 2020, le China Tribunal a conclu que l’État du PCC avait, « au‑delà de tout doute raisonnable », procédé à des prélèvements forcés d’organes sur des pratiquants de Falun Gong et des Ouïghours détenus — des actes qualifiés de crimes contre l’humanité.
Le panel du China Tribunal (de g. à d.) : l’historien américain Arthur Waldron, l’avocat malaisien Andrew Khoo, le professeur de chirurgie cardiothoracique Martin Elliott, le président du tribunal Sir Geoffrey Nice QC, l’homme d’affaires Nicholas Vetch, l’avocate iranienne des droits humains Shadi Sadr et l’avocate américaine Regina Paulose, à Londres, le 8 décembre 2018. (Justin Palmer)
« Les prélèvements forcés d’organes sont commis depuis des années à travers la Chine, à grande échelle, et les pratiquants de Falun Gong ont été — et probablement demeurent — l’une des principales sources d’approvisionnement en organes. La persécution ciblée et les tests médicaux pratiqués sur les Ouïghours sont plus récents, et il est possible que des preuves de prélèvements forcés sur ce groupe émergent en temps voulu », indique son rapport final.
« Le Tribunal n’a reçu aucune preuve que l’importante infrastructure associée à l’industrie chinoise de la transplantation ait été démantelée et, faute d’explication satisfaisante sur la provenance d’organes disponibles rapidement, il conclut que les prélèvements forcés se poursuivent à ce jour. »
Le Tribunal a estimé que 60.000 à 100.000 greffes sont réalisées chaque année en Chine, bien au‑delà des chiffres officiels, et dans un contexte de faible taux de dons. Malgré l’annonce, en 2015, de la fin du recours aux organes de prisonniers exécutés, aucune réforme juridique n’a suivi.
Les institutions étrangères s’exposent à des risques pénaux si elles participent à des formations, des recherches ou des chaînes d’approvisionnement facilitant ou profitant à des prélèvements forcés.
« Collaborer, à quelque niveau que ce soit, avec l’industrie chinoise de la transplantation soulève de graves enjeux économiques et de droits humains, étant donné ce que l’on sait du commerce de prélèvements d’organes sous l’égide de l’État et des violations massives des droits fondamentaux qui en découlent », estime l’avocate internationale Madeleine Bridgett, spécialiste des droits humains.
Des défenseurs des droits humains ont sollicité en urgence des rencontres avec Mme Bates et de hauts responsables du Queensland afin de préciser les garde‑fous et diligences raisonnables appliqués lors des échanges avec le Renji Hospital.
Ils demandent des garanties des gouvernements du Queensland et de l’Australie qu’aucune collaboration médicale n’avancera sans pleine conformité avec les standards internationaux de transparence et de responsabilité.
Epoch Times a sollicité la ministre pour connaître le contenu des échanges avec l’hôpital, savoir si le gouvernement du Queensland a conscience des risques réputationnels et juridiques d’une coopération, et recueillir sa réponse aux préoccupations exprimées par les organisations de défense des droits humains.
Aucune réponse n’a été fournie.
Rex Widerstrom est un journaliste néo-zélandais qui a plus de 40 ans d'expérience dans les médias, y compris la radio et la presse écrite. Il est actuellement présentateur à Hutt Radio.