La douleur à l’exercice signe-t-elle vraiment le progrès — ou un danger pour le corps ?

Photo: Albina Gavrilovic/Shutterstock
« Pas de douleur, pas de résultats » : une phrase que la plupart d’entre nous ont déjà entendue dans les salles de sport ou les cercles de fitness. L’idée est simple : si vos muscles vous font mal, c’est que vous progressez.
Pourtant, la douleur n’est pas toujours synonyme d’amélioration. Parfois, elle reflète simplement l’adaptation du corps à de nouvelles exigences. D’autres fois, c’est un signal d’alarme : votre corps vous dit de lever le pied. Le défi consiste à savoir quel type de douleur vous ressentez.
« Ce n’est que rarement une vraie situation de “pas de douleur, pas de progrès” », explique Zach Smith, kinésithérapeute, dans une interview accordée à Epoch Times. « La douleur est comme un détecteur de fumée : elle ne signifie pas toujours qu’il y a un incendie, mais elle indique qu’il pourrait y en avoir un, et mérite donc qu’on y prête attention. »
Au-delà des microdéchirures
Lorsque vous faites de l’exercice, votre corps fournit un effort supérieur à la normale : le cœur bat plus vite, la respiration s’accélère, les muscles consomment davantage d’énergie. Sur le moment, cela peut provoquer une sensation de brûlure ou d’inconfort temporaire, souvent due à l’accumulation de lactate et d’autres sous-produits dans les muscles, sensation qui disparaît généralement une fois l’effort ralenti ou stoppé.
Les raideurs et courbatures qui apparaissent un à deux jours plus tard sont appelées douleurs musculaires d’apparition retardée. Pendant longtemps, on a cru qu’elles résultaient de minuscules déchirures dans les fibres musculaires que l’organisme réparait ensuite pour renforcer les muscles. Mais selon les experts, ces douleurs ne sont pas toujours dues à des microdéchirures.
Dans une interview accordée à Epoch Times, Jennifer Schwartz, spécialiste neuromusculaire, précise : « Il y a peu de récepteurs de la douleur au cœur même du tissu musculaire. Ce que vous ressentez est en réalité davantage lié à l’inflammation. »
Après un entraînement exigeant, le système immunitaire s’active : il augmente le flux sanguin et envoie des cellules réparatrices vers les zones sollicitées. Cette réaction inflammatoire provoque un gonflement qui exerce une pression sur les tissus et les nerfs environnants — c’est ce qui crée la fameuse sensation de courbature.
La douleur, une expérience personnelle
Les études montrent que nous ne ressentons pas tous la douleur de la même manière après l’effort. Pour certains, un nouvel exercice ne provoque qu’une légère raideur ; pour d’autres, la douleur peut durer plusieurs jours. Une étude norvégienne de longue durée a révélé que les personnes physiquement actives avaient une tolérance à la douleur plus élevée que celles qui restaient sédentaires. Même celles qui se mettaient au sport plus tard dans la vie voyaient leur seuil de tolérance augmenter.
« La douleur est une expérience subjective, pas une lecture directe des dommages tissulaires », souligne Jennifer Schwartz. « Deux personnes peuvent suivre le même entraînement : l’une ressentira une gêne légère, l’autre une douleur vive, selon des facteurs comme le stress, le sommeil ou d’anciennes blessures. »
La “bonne” douleur
Les habitués des salles de sport distinguent souvent trois types de douleur. La « bonne douleur » se manifeste par des courbatures ou une brûlure musculaire pendant l’effort : elle est généralement liée à la progression et au renforcement. La « mauvaise douleur » est vive, soudaine ou liée à une blessure — elle signale un problème et nécessite d’arrêter. Enfin, la douleur dite neutre est celle que l’on accepte simplement comme faisant partie de l’entraînement.
Toutes les douleurs ressenties pendant l’exercice ne sont pas néfastes. Une étude menée auprès de 68 personnes souffrant d’arthrose du genou a montré que celles qui ressentaient une légère augmentation de la douleur pendant l’effort étaient ensuite plus susceptibles d’éprouver un soulagement. Ces résultats suggèrent qu’un inconfort modéré peut parfois déclencher les mécanismes naturels d’autoapaisement du corps — preuve que la douleur ne rime pas toujours avec dommage.
Chez les personnes déjà sujettes à la douleur, une enquête japonaise de 2024 auprès de plus de 52.000 adultes a révélé que l’exercice régulier atténuait les douleurs en réduisant les émotions négatives et en augmentant l’énergie. Les bénéfices croissaient avec la fréquence de l’activité, quel que soit le type de douleur (dos, nuque ou genoux), et les effets étaient encore plus marqués chez les seniors.
« Si vous avancez à bon rythme, vous pouvez vous attendre à ressentir quelques courbatures, surtout au début d’un programme d’entraînement », explique Zach Smith. « Avoir mal pendant l’exercice peut être un signe de progrès, mais ce n’est pas le but recherché. »
Zach Smith souligne que beaucoup de gens recherchent ces courbatures, persuadés qu’ils ne progresseront pas sans elles. Pourtant, il est tout à fait possible de s’améliorer sans ressentir de douleurs, notamment chez les personnes déjà entraînées dont le corps est habitué à ce type de stress.
Courbatures normales ou douleur “anormale”
Le scénario le plus fréquent : une personne commence une nouvelle activité, ressent des douleurs le lendemain et pense s’être blessée. « Tout nouveau mouvement peut provoquer cela », précise Zach Smith. Par exemple, si vous commencez à muscler vos ischio-jambiers pour la première fois, il est normal de sentir des courbatures. Même chose pour le bas du dos : la douleur ressentie après un soulevé de poids est souvent confondue avec une blessure, car toute sensation dans cette zone est perçue comme alarmante. Pourtant, comme pour n’importe quel autre muscle, une gêne dans le bas du dos peut simplement indiquer que les muscles ont travaillé et s’adaptent.
Les courbatures normales sont diffuses : il est difficile d’en identifier précisément la source. Elles durent en général jusqu’à 72 heures, avec un pic autour de 48 heures. Contrairement à une blessure, on ne les ressent pas pendant l’effort — elles apparaissent le lendemain ou le surlendemain, explique Zach Smith.
La douleur liée à une blessure, en revanche, est plus vive, localisée et peut survenir brutalement pendant l’exercice ou persister sans s’atténuer. Elle peut aussi s’accompagner de gonflement, d’ecchymoses ou d’une perte de mobilité.
« Si la douleur diffère des courbatures habituelles – si elle s’intensifie, dure plus longtemps ou limite vos mouvements –, il est préférable de ralentir et de consulter un professionnel de santé », conseille Jennifer Schwartz.
Comment limiter l’inconfort
Si la croyance selon laquelle « il faut souffrir pour progresser » perdure, c’est parce que beaucoup associent encore les courbatures aux résultats, et que le fait de repousser ses limites procure un sentiment gratifiant. Pourtant, les mêmes bénéfices peuvent être obtenus sans excès.
Une méta-analyse de 18 études menées chez des adultes âgés de 18 à 65 ans a montré que des entraînements trop intenses ou prolongés augmentent le risque de blessures et d’inflammation chronique. À l’inverse, un exercice modéré — ou des séances intenses bien espacées — améliore la santé sans ces risques.
Les experts recommandent quelques stratégies pour s’entraîner plus intelligemment :
• Commencez doucement et progressez graduellement. N’allez pas trop vite. Débutez à un niveau raisonnable et augmentez l’intensité ou le volume de 10 à 20 % maximum par semaine.
• Essayez l’eau froide. Un bain glacé rapide après un entraînement intense peut atténuer les courbatures et favoriser la régularité.
• Intégrez des exercices isométriques. Les postures statiques comme la planche ou la chaise contre un mur renforcent les muscles sans trop solliciter les articulations — idéal pour une reprise ou après un effort soutenu.
• Soutenez le flux lymphatique. Contrairement au cœur, le système lymphatique dépend du mouvement et de stimulations douces pour éliminer les déchets. Des gestes simples comme le brossage à sec, l’automassage léger, des exercices de respiration ou des séances de sauna infrarouge peuvent favoriser la circulation et la récupération.
• Ralentissez en cas de douleur. La progression doit être régulière, sans douleurs vives ni persistantes.
Avec une meilleure compréhension des mécanismes de la douleur et de la récupération, il est temps d’ajuster nos croyances, conclut Jennifer Schwartz.
« Vous pouvez devenir plus fort et en meilleure santé sans souffrir à chaque séance. En réalité, respecter vos limites et accorder de l’importance à la récupération vous mènera souvent plus loin sur le long terme. »
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