Emmanuel Macron demande à Sébastien Lecornu de mener « d’ici mercredi soir d’ultimes négociations »

Photo: LUDOVIC MARIN/AFP via Getty Images
Emmanuel Macron a donné lundi à Sébastien Lecornu, Premier ministre le plus éphémère de la Ve République, quarante-huit heures pour tenter de sauver la majorité et éviter une dissolution. La mission est claire : renouer un compromis politique d’ici mercredi soir, sous peine pour le chef de l’État d’en « tirer toutes les conclusions ».
Le président de la République lui a confié « la responsabilité de mener, d’ici mercredi soir, d’ultimes négociations afin de définir une plateforme d’action et de stabilité pour le pays », a annoncé l’Élysée. « Je dirai au chef de l’État mercredi soir si cela est possible ou non, pour qu’il puisse en tirer toutes les conclusions qui s’imposent », a répondu sur X le Premier ministre, démissionnaire lundi matin moins de douze heures après avoir formé son gouvernement.
Une première réunion dès mardi matin
Sébastien Lecornu entamera dès mardi, à 9 heures, une série de discussions avec les dirigeants du « socle commun » – la fragile coalition unissant le camp présidentiel et Les Républicains – dont les tensions internes ont précipité sa démission. Les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat y assisteront.
Du côté de l’Élysée, on souligne qu’« en cas d’échec, le président prendra ses responsabilités », de quoi entretenir la menace d’une nouvelle dissolution. « Mais si ces discussions aboutissent, rien ne garantit que Sébastien Lecornu soit reconduit », prévient un proche du chef de l’État : « sa mission est technique, il doit simplement dire si des voies de compromis existent encore. »
Dans l’entourage présidentiel, on décrit un Emmanuel Macron « lucide mais décidé » à donner « une dernière chance à la responsabilité politique », dans un contexte « où la dissolution, comme la démission ou un nouveau gouvernement, restent sur la table ».
Une démission éclair et des tensions à droite
Troisième Premier ministre en un an depuis la dissolution de juin 2024, Sébastien Lecornu, nommé le 9 septembre, s’est rendu dès l’aube à l’Élysée pour remettre sa démission, à peine quatorze heures après la formation de son gouvernement. Celui-ci devait tenir son premier Conseil des ministres lundi après-midi. Emmanuel Macron l’a formellement acceptée, avant de lui confier cette ultime mission de conciliation.
« Les conditions n’étaient plus remplies », a expliqué Lecornu depuis Matignon, dénonçant « les appétits partisans » qui ont fait éclater sa coalition – une allusion à Bruno Retailleau, chef de file de LR, qui a retiré son soutien quelques heures après avoir accepté de rester au gouvernement.
L’ancien ministre de l’Intérieur a assuré ne se sentir « pas du tout responsable » de la crise. Il a regretté que son offre de renoncer à l’article 49.3 pour redonner la main au Parlement n’ait « pas permis » d’écarter la menace d’une motion de censure.
L’opposition vent debout, la tension financière monte
La démission du gouvernement le plus court de la Ve République plonge de nouveau la France dans une crise politique inédite depuis des décennies. L’opposition, toutes couleurs confondues, s’est aussitôt mise en mouvement.
« La fin de règne de la Macronie est interminable. Qu’ils s’en aillent tous ! », a lancé la députée insoumise Mathilde Panot. « Ce monde politique s’effondre et s’accroche comme une moule à son rocher », a ironisé la patronne des Écologistes, Marine Tondelier.
Le Rassemblement national, pour sa part, réclame ouvertement une issue électorale. Jordan Bardella a appelé à de nouvelles législatives anticipées, tandis que Marine Le Pen juge « absolument incontournable » une dissolution et voit dans une démission du président « un acte de sagesse ». Son allié Éric Ciotti a affirmé que le RN et l’UDR « censureront systématiquement tout gouvernement » jusqu’à la dissolution ou la démission du chef de l’État.
Jean-Luc Mélenchon (LFI) a réclamé « l’examen immédiat » d’une motion de destitution, tandis qu’Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste, a appelé Emmanuel Macron à nommer « un Premier ministre issu de la gauche et des Écologistes ». Il a toutefois salué sur X Sébastien Lecornu, « un gaulliste » ayant « démissionné avec dignité et honneur ».
Dans un climat d’incertitude institutionnelle, les marchés ont réagi. La Bourse de Paris a clôturé en baisse et, sur le marché obligataire, le taux français à dix ans est passé au-dessus de celui de l’Italie – un symbole rare, révélateur de la nervosité ambiante.

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