Donald Trump approuve l’accord TikTok : Ce qu’il faut savoir
Le logo TikTok et le drapeau des États-Unis sont visibles sur des écrans le 18 janvier 2025 à Hong Kong, Chine.
Photo: Anthony Kwan/Getty Images
La Maison-Blanche vante un accord qui évitera la disparition de la populaire application TikTok, tout en la soustrayant au contrôle chinois. Le président Donald Trump devrait signer cette semaine un décret exécutif qui accordera aux investisseurs américains et à ByteDance, basé en Chine, 120 jours supplémentaires pour obtenir les approbations réglementaires nécessaires et finaliser l’opération.
Voici ce qu’il faut retenir :
Nouvelle coentreprise à majorité américaine
Des responsables de la Maison-Blanche ont confirmé lundi que le géant américain du cloud Oracle figurera parmi les investisseurs, aux côtés du fonds de capital-investissement Silver Lake. Lors d’une interview accordée à Fox News le 22 septembre, le président indique que les magnats des médias Lachlan et Rupert Murdoch pourraient également jouer un rôle, tout comme Michael Dell, fondateur de Dell Technologies, et Larry Ellison, cofondateur d’Oracle. Selon Donald Trump, tous les nouveaux investisseurs potentiels sont des « Américains patriotes ».
Depuis sa première administration, Donald Trump plaide pour une prise de contrôle américaine de TikTok et plusieurs géants technologiques comme des investisseurs fortunés ont exprimé leur intérêt pour acquérir l’application au fil des années.
La nouvelle coentreprise imposera à ByteDance de détenir une participation inférieure à 20 %, son représentant au conseil d’administration ne siégera pas au comité de sécurité.
Un haut responsable a annoncé samedi que la coentreprise compterait sept membres au conseil d’administration, dont six Américains résidents aux États-Unis, spécialistes de la cybersécurité et de la sécurité nationale, selon Reuters.
Le gouvernement américain ne détiendra aucune part dans la coentreprise, ni siège au conseil. Les responsables n’ont pas souhaité commenter la valorisation exacte de la société, affirmant simplement qu’elle « atteint plusieurs milliards ».
Licence et reformation de l’algorithme TikTok
Une copie de l’infamant algorithme TikTok sera sous contrôle de la nouvelle coentreprise, supervisée par Oracle, « hors de la portée de ByteDance », a déclaré la porte-parole Karoline Leavitt le 22 septembre.
Oracle, qui héberge déjà les données des utilisateurs américains de TikTok sur ses serveurs aux États-Unis, sera également le fournisseur de sécurité de l’application.
Cela implique d’inspecter comment l’application interagit avec les appareils des utilisateurs, comment fonctionne l’algorithme de recommandation de contenu, ainsi que le code et les mises à jour, notamment en réentraînant complètement l’algorithme avec des données américaines et en l’observant pour détecter tout signe d’influence malveillante, a déclaré lundi un responsable de la Maison-Blanche.
La nécessité d’obtenir une licence pour l’algorithme est devenue un sujet de préoccupation la semaine dernière lorsque les autorités chinoises ont évoqué la question des licences, incitant les faucons chinois au Congrès à tirer la sonnette d’alarme au sujet d’un accord potentiel qui permettrait à ByteDance ou à toute autre entité chinoise de conserver le contrôle du code et de ses mises à jour.
Cet algorithme détermine ce que les utilisateurs voient sur leur page « Pour toi », principale interface de l’application. Des rapports, y compris celui du régulateur britannique, ont révélé que TikTok pouvait recommander des vidéos d’automutilation à des adolescents quelques minutes après leur inscription, ou supprimer des critiques contre le régime chinois.
Ce dernier est également connu pour avoir soutenu des opérations d’influence en ligne semant la division politique — des enquêtes judiciaires ont démontré que des agents chinois publiaient du contenu sur la santé américaine, l’avortement, l’immigration, le 6 janvier et les violences policières pour attiser les fractures sociales.
Les responsables de la Maison-Blanche précisent qu’Oracle sera responsable du comportement de cet algorithme dans la nouvelle organisation. L’effet de l’entraînement de l’algorithme sur des données américaines reste incertain. Oracle n’a pas souhaité répondre aux questions du journal Epoch Times.
Mme Leavitt précise que TikTok US ne bloque pas la diffusion aux États-Unis de contenus étrangers.
Pourquoi ByteDance doit-elle vendre TikTok ?
Le gouvernement américain a passé deux ans à négocier avec ByteDance, couvrant les deux administrations Trump et Biden, afin de régler les questions de sécurité nationale.
Outre la crainte d’une influence chinoise sur l’algorithme TikTok, un problème de sécurité des données subsistait. La législation sur la cybersécurité oblige les sociétés opérant en Chine à fournir leurs informations au gouvernement, sans notification aux utilisateurs.
La communauté du renseignement américaine jugeait insuffisantes les propositions de sécurité de ByteDance, estimant qu’un accès chinois à TikTok constituait un risque permanent. D’où le vote d’une loi interdisant tout contrôle par un adversaire étranger d’une application comptant plus d’un million d’utilisateurs actifs mensuels, visant explicitement ByteDance. La loi pénaliserait aussi les services rendus à TikTok détenu par ByteDance (hébergement par les plateformes de téléchargement, etc.).
La loi, rapidement signée par le président Joe Biden, a laissé suffisamment de temps à ByteDance pour la contester devant les tribunaux et soit céder TikTok, soit mettre fin à ses activités avant la fin du mandat de Biden. Les responsables de l’administration Trump ont critiqué l’administration Biden pour sa volonté de laisser TikTok disparaître. Donald Trump est favorable à un contrôle national de l’application utilisée par environ 170 millions d’Américains. Ils estiment qu’elle contribuera à hauteur de 178 milliards de dollars au développement économique au cours des quatre prochaines années.
ByteDance n’a pas répondu aux sollicitations du journal.
Pourquoi Trump avait-il besoin de l’accord de Xi ?
L’administration Trump a annoncé des avancées majeures dans le dossier TikTok la semaine dernière alors que l’application risquait la fermeture le 17 septembre sans accord ou extension signé par Donald Trump.
Avec l’échéance qui approchait, les négociateurs chinois étaient motivés pour élaborer un accord-cadre concernant TikTok aux États-Unis, qui a été formé avec la contribution de Donald Trump, ont déclaré des responsables américains après des réunions à Madrid. Ils ont annoncé un appel téléphonique entre Donald Trump et Xi Jinping prévu pour la fin de la semaine, destiné à obtenir l’accord de la Chine pour la vente de l’application.
En 2020, la Chine a modifié ses lois d’exportation pour exiger une autorisation étatique préalable à la vente d’algorithmes de recommandation comme celui de TikTok, dans le contexte des mesures américaines. Donald Trump a jugé que le contrôle chinois sur une application concentrant énormément de données américaines constituait un risque sécuritaire, et a pris un décret exigeant la cession du service.
ByteDance, société basée en Chine, a fait valoir devant la justice que leur législation ne leur permettrait pas de vendre l’algorithme de l’application, élément considéré comme essentiel et le plus précieux par de nombreux investisseurs. Les autorités chinoises ont confirmé la nécessité du respect de leurs lois de contrôle des exportations. Le 19 septembre, Donald Trump a eu un entretien téléphonique de deux heures avec le dirigeant chinois Xi Jinping sur plusieurs sujets, à l’issue duquel il a annoncé l’approbation de l’accord côté chinois. Des responsables américains ont souligné que le transfert du contrôle de l’algorithme fut un « point critique » des négociations, mais la Chine a accepté que celui-ci passe sous gouvernance américaine, condition nécessaire à la législation US sur la sécurité nationale.
Prudence des législateurs
Plusieurs parlementaires font part de leurs inquiétudes sur l’accord, précisant qu’ils attendront de voir ses termes. Le président de la Chambre Mike Johnson évoque la « très grande préoccupation du Congrès », particulièrement sur la gestion de l’algorithme : « C’est une plateforme dangereuse, utilisée abusivement contre la jeunesse américaine en particulier », déclare-t-il. « Les dirigeants du Congrès ont exprimé la nécessité de mettre fin à ces dérives. »
« Nous voulons la survie de TikTok, pas sous contrôle du Parti communiste chinois », affirme le représentant Raja Krishnamoorthi (Démocrate de l’Illinois), rapporteur de la commission spéciale sur la Chine. « Il ne doit exister aucune relation opérationnelle entre ByteDance et la nouvelle entité, évitant tout accès masqué aux données, toute atteinte à la vie privée, toute remise en cause de la loi. »
Le président de la commission John Moolenaar (Républisain du Michigan) partage la même prudence, soulignant que le fait que Xi ait dû personnellement négocier prouve la mainmise du Parti sur TikTok : « L’algorithme est crucial, et nous ne voulons aucune concession permettant à la Chine d’influencer ce que voient 170 millions d’Américains. » Selon lui, l’optimisme est permis grâce aux talents de négociateur de Donald Trump et la confiance dans la capacité d’une société américaine à concevoir un bon algorithme.
« C’est dans les détails que réside le danger », ajoute Frank Pallone (Démocrate du New Jersey). « Nous ne pouvons permettre à la Chine un accès continu à quantité de données personnelles américaines. » Il met également en garde contre une dérive partisane de l’application avec l’arrivée de nouveaux investisseurs américains.
Avec Reuters
Catherine Yang est journaliste pour Epoch Times, à New York.
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