DÉCRYPTAGE – Alors que François Bayrou va engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale lundi prochain, son avenir à Matignon est plus que menacé. L’ensemble des formations politiques de gauche ainsi que le RN et leurs alliés de l’UDR ont d’ores et déjà annoncé qu’ils ne voteraient pas la confiance. Dans ces conditions, l’Élysée devra trouver un successeur au centriste, voire peut-être dissoudre pour la deuxième fois l’Assemblée nationale.
Coup de tonnerre le lundi 25 août. François Bayrou a annoncé à l’occasion d’une conférence de presse de rentrée qu’il va solliciter la confiance des députés sur les orientations budgétaires présentées quelques semaines plus tôt en utilisant l’article 49-1 de la Constitution.
« Cette déclaration de politique générale aura pour objet de poser explicitement la question centrale : savoir s’il y a bien gravité du danger pour la nation, s’il y a urgence ou pas », a-t-il alors déclaré en référence à la situation financière du pays.
Une décision que beaucoup ont interprétée comme un « suicide politique » au regard de la composition actuelle de la chambre basse du Parlement. D’ailleurs, le PCF, LFI, les Écologistes, le PS, le Rassemblement national et l’UDR d’Éric Ciotti ont très vite réagi et ont annoncé qu’ils n’accorderaient pas la confiance au gouvernement Bayrou. Une addition du nombre de voix qui rend la chute de l’homme politique béarnais inévitable.
Dès lors, en cas de départ précipité de l’homme fort du centre, divers scénarios pourraient se dessiner.
La nomination d’un successeur Macron-compatible
Neuf mois après la chute de Michel Barnier, Emmanuel Macron va donc certainement devoir encore tabler sur la nomination d’un nouveau Premier ministre. Divers noms circulent déjà pour remplacer le fondateur du MoDem.
Selon des informations de France Info, le nom, plutôt inattendu, d’Éric Lombard, actuel ministre de l’Économie et des Finances et ancien directeur général de la Caisse des dépôts et consignations « séduit l’Élysée ».
Incarnant l’aile gauche du gouvernement, ce dernier pourrait s’avérer utile pour renouer le dialogue avec un Parti socialiste frustré par le budget 2026 présenté par François Bayrou au début de l’été. En même temps, Éric Lombard a occupé des fonctions prestigieuses dans le secteur privé. Il a notamment été à la tête de BNP Paribas Cardif et de Generali France, de quoi plaire à Emmanuel Macron.
Autre nom inscrit sur la liste des possibles successeurs du centriste, celui du ministre des Armées, Sébastien Lecornu, même si le principal intéressé a affirmé au Parisien ne « pas être candidat » à Matignon. Ce n’est pas la première fois que l’hypothèse Lecornu est évoquée. Lors des tractations pour trouver le successeur d’Élisabeth Borne et de Michel Barnier, le nom de l’homme politique eurois circulait déjà.
Par ailleurs, la ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles Catherine Vautrin est également envisagée pour devenir cheffe du gouvernement.
Mais la tâche d’une nouvelle nomination pourrait s’annoncer rude pour le président de la République. L’absence de majorité à l’Assemblée et le contexte politique de manière générale ne rendent pas la fonction de Premier ministre particulièrement attractive, notamment pour une personnalité issue du bloc central.
Le PS à Matignon ?
Au-delà de la nomination d’un Premier ministre macroniste ou macron-compatible, il n’est pas exclu que le chef de l’État décide de nommer une personnalité ne faisant pas partie du bloc central. À commencer par un homme ou une femme issu des rangs du parti à la rose.
De leur côté, les socialistes se préparent activement à Matignon et ont même proposé un contre-budget. « Nous sommes volontaires pour être les suivants. Nous prenons l’engagement de ne pas utiliser l’article 49.3, ce qui mécaniquement nous obligera à trouver des compromis texte par texte », a notamment déclaré le premier secrétaire du PS Olivier Faure aux universités d’été de son parti à Blois le 29 août.
Cependant, le retour des socialistes aux affaires ne se ferait pas avec le soutien de toute la gauche. Les Insoumis, qui ne jurent que par le départ d’Emmanuel Macron, ne soutiennent pas l’idée de l’entrée du PS au gouvernement.
« Nous n’accorderons pas notre confiance à un gouvernement qui ne porte pas le programme de rupture sur lequel les socialistes ont été élus », a même lancé la députée LFI Mathilde Panot lundi sur France 2.
Une possible dissolution ?
Bien qu’écartée pour l’instant par Emmanuel Macron, l’hypothèse de la dissolution n’est pas totalement à rejeter. À la veille des élections européennes de 2024, le chef de l’État ne penchait pas réellement pour cette option, avant de finalement décider de « redonner » aux Français « le choix de leur avenir parlementaire » le 9 juin au soir après la victoire du Rassemblement national.
Et la situation politique actuelle, qui risque d’exposer n’importe quel potentiel Premier à une motion de censure et d’enfoncer le pays dans une impasse, pourrait inciter le locataire de l’Élysée à dissoudre l’Assemblée nationale pour la seconde fois.
L’un de ses prédécesseurs, Nicolas Sarkozy, a d’ailleurs estimé dans le Figaro ce mardi qu’ « il n’y a pas d’autre solution ».
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.