Retraites : la réforme mise en pause, l’avenir incertain

Le ministre français du Travail, Jean-Pierre Farandou, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, à Paris, le 15 octobre 2025.
Photo: ALAIN JOCARD/AFP via Getty Images
L’exécutif a dévoilé mardi soir son plan pour geler la réforme Borne des retraites. Le gouvernement souhaite suspendre jusqu’en janvier 2028 la progression vers les 64 ans, ainsi que l’augmentation du nombre de trimestres requis pour un départ à taux plein.
Une pause qui concernerait directement cinq générations de futurs retraités.
Un gel gagnant pour 3,5 millions de Français qui gagnent un trimestre
Concrètement, les personnes nées en 1964 pourraient partir à 62 ans et 9 mois dès octobre 2026, au lieu des 63 ans initialement prévus début 2027. Ce gel bénéficierait à environ 3,5 millions d’assurés qui gagneraient chacun trois mois par rapport à la réforme de 2023.
Si aucune nouvelle loi n’intervient d’ici là, la réforme reprendrait son cours en 2028 avec la génération 1965, qui partirait à 63 ans au lieu de 63 ans et 3 mois. L’âge butoir de 64 ans ne s’appliquerait finalement qu’aux personnes nées en 1969, soit à partir de 2033.
Le casse-tête des trimestres de cotisation
Le gel impacte également la durée de cotisation. Actuellement, la génération 1963 doit totaliser 170 trimestres (42,5 années). Avec la suspension, la génération 1964 resterait à 170 trimestres au lieu des 171 prévus. La génération 1966 serait la première à atteindre le plafond de 172 trimestres, soit 43 années complètes de cotisation.
Le flou persiste sur le véhicule législatif
Comment traduire juridiquement cette suspension ? Le gouvernement hésite encore. Le ministre du Travail Jean-Pierre Farandou évoque un projet de loi dédié, tandis que la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin mentionne un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Matignon reconnaît mercredi que « la question n’est pas tranchée ».
Du côté syndical : un compromis insatisfaisant
Pour les syndicats, cette pause reste largement insuffisante. La CGT dénonce vigoureusement « un simple décalage de quelques mois » qui « confirme les 64 ans au mépris de la mobilisation de millions de travailleurs ». Le syndicat rejette cette manœuvre qu’il considère comme un trompe-l’œil politique.
Sur France Inter, Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, a haussé le ton en appelant « les parlementaires à bloquer clairement la réforme des retraites » à 62 ans et 9 mois avec 170 trimestres pour toutes les générations futures. Pour la CGT, seul l’abandon définitif de la réforme Borne et le retour aux paramètres antérieurs constituent une réponse acceptable.
La CFDT, de son côté, adopte une position plus nuancée tout en restant critique. Le syndicat réformiste, qui n’avait pas appelé à la grève contre la réforme en 2023, pourrait se montrer plus ouvert à ce compromis temporaire, même s’il continue de réclamer des améliorations sur la pénibilité et les carrières longues.
Les présidentielles en toile de fond
Cette suspension temporaire apparaît comme un compromis fragile qui satisfait peu de monde : trop timide pour les opposants à la réforme, elle maintient néanmoins le cap vers les 64 ans tout en repoussant son application au-delà de l’échéance présidentielle de 2027.
Avec AFP

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