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Santé mentale : à Paris, le dispositif Atrap offre un « cocon » aux ados en détresse

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Photo: Pixabay/Myriams-Fotos

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Durée de lecture: 5 Min.

Il y a un an, Célia, 13 ans, venait d’entrer en classe de 3ᵉ lorsqu’elle a soudainement refusé de retourner au collège. Excellente élève, elle ne supportait plus le cadre scolaire.

Sa prise en charge rapide et intensive dans une structure spécialisée de l’hôpital public, l’Accueil Temporaire Rapide Ados Parisiens (ATRAP), lui a permis de retrouver un équilibre, raconte son père Stéphane (prénom modifié), conseiller en stratégie d’entreprise.

Une crise sans harcèlement mais marquée par l’isolement

Célia n’avait subi « ni harcèlement ni agression », mais un « clash avec des copines l’avait beaucoup isolée », explique son père, veuf depuis dix ans et père de trois filles. Il consulte une psychiatre qui prescrit un traitement, mais l’état de sa fille se dégrade : troubles du sommeil, automutilations, crises d’hyperphagie et une prise de poids de 30 kg en un an. « Comme beaucoup de parents d’un ado qui va mal, je me suis retrouvé à ne savoir absolument pas quoi faire, où aller », confie Stéphane, qui a cherché un mois durant un lieu d’hospitalisation.

Hausse des troubles psychiques chez les jeunes

Alors que la santé mentale a été déclarée grande cause nationale 2025, les hospitalisations d’adolescentes de 10 à 14 ans pour tentatives de suicide ou automutilations ont augmenté de 22 % en 2024, selon la Drees (direction des statistiques des ministères sociaux).

L’ATRAP, un dispositif unique pour les jeunes en crise

Stéphane finit par trouver, « à son immense soulagement », l’ATRAP, un service dépendant de l’hôpital Sainte-Anne, qui accueille sous 48 heures les enfants de 10 à 15 ans en crise psychique (tentatives de suicide, refus scolaire anxieux…). Depuis 2021, cette structure prend en charge des adolescents adressés pour 80 % par les services d’urgence. « Un enfant qui ne veut plus aller à l’école, c’est comme s’il était en grève, sans savoir ce que dit son panneau : notre travail consiste à y trouver du sens avec le jeune et sa famille », explique la psychologue Héléna Muni-Toke.

Une approche globale et intensive

La prise en charge s’étend sur un mois renouvelable et comprend des entretiens individuels et familiaux, des ateliers artistiques et des jeux collectifs. Les parents sont fortement impliqués : « Ils mettent un peu leur vie en pause », souligne Mme Muni-Toke. L’équipe, composée de psychiatres, psychologues, infirmières, éducatrices, une art-thérapeute, une enseignante et un interne, reçoit toujours les familles à plusieurs. « On est très joignables, les parents le savent. Les plus anxieux appellent chaque matin », raconte la psychologue.

Soutenir les parents pour reconstruire le lien familial

Pour le Dr Victoire Paillard, médecin responsable de l’unité, recevoir les familles permet « de trouver les mots pour dire ce qui s’est passé, comment on s’en remet, comment on va être aidé ». Mme Muni-Toke ajoute : « Avoir son enfant qui veut mourir ou qui délire, c’est insupportable. Accompagner les parents, c’est restaurer leur capacité à continuer d’être solides, présents et connectés à leur enfant. »

Certaines situations révèlent des souffrances profondes : un trouble alimentaire peut cacher les prémices d’un trouble psychotique, une difficulté scolaire peut raviver un traumatisme ancien, parfois lié à une agression non révélée. L’équipe aide les jeunes à mettre des mots sur ces blessures.

Maintenir un lien avec l’école

L’enseignante Patricia Signoret veille à préserver la scolarité des adolescents, en lien avec les collèges ou via le dispositif APADHE (Accompagnement Pédagogique À Domicile à l’Hôpital ou à l’École). Son rôle : adapter les apprentissages et redonner confiance aux élèves.

« Nous n’avons pas de baguette magique », reconnaît le Dr Paillard, qui plaide pour un renforcement des moyens des centres médico-psychologiques (CMP), aujourd’hui saturés, chargés d’assurer le suivi pérenne des adolescents après leur passage à l’ATRAP.

« Aujourd’hui, elle va mieux »

Grâce à cette « équipe extraordinaire », témoigne Stéphane, sa fille est aujourd’hui suivie à la Maison de Solenn de l’hôpital Cochin (AP-HP) et a fait son entrée au lycée. « Aujourd’hui, elle va mieux », se réjouit-il.

Avec AFP