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Opinion

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Samuel Furfari : « Les COP ont longtemps construit leur popularité sur les peurs de la population mondiale »

ENTRETIEN – Depuis 1995, les COP (Conference of Parties) sont organisées chaque année dans le monde entier avec pour objectif de mobiliser la communauté internationale autour de la question du réchauffement climatique. Dans quelques semaines se tiendra au Brésil, à Belém, la COP 30.

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Photo: Crédit photo : Samuel Furfari

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Durée de lecture: 12 Min.

Dans son dernier ouvrage La vérité sur les COP : trente ans d’illusions (l’Artilleur, 2025), qui sortira le 29 octobre, l’ex-haut fonctionnaire à la Direction de l’Énergie de la Commission européenne et auteur de Énergies, mensonges d’État (l’Artilleur, 2024), Samuel Furfari, s’en prend à ce qu’il appelle « les grandes messes internationales ». Pour lui, les Conferences of Parties, par leur manque d’approche réaliste et l’excès de communication, n’ont pas su aborder de manière pertinente la question environnementale.
Epoch Times – Beaucoup d’ouvrages ont été publiés sur le climat. Pourquoi un livre supplémentaire maintenant ?
Samuel Furfari – Lorsque Greta Thunberg était sur la première flottille vers Gaza, un internaute a fait son éloge car elle a, selon lui, révélé le problème climatique. Je me suis alors rendu compte de l’ignorance crasse qu’il y a dans la population sur cette question.
Je lui ai répondu que l’on parlait déjà de changement climatique au moins quinze ans avant la naissance de l’activiste suédoise.
Par ailleurs, il y a beaucoup de livres sur la science du climat, mais la politique climatique internationale n’est pas connue. C’est ce que j’ai voulu montrer.
En tant que responsable du climat à la Direction générale de l’énergie de la Commission européenne, j’ai géré ce dossier avec sérieux et conviction. Mais au fil des années, j’ai assisté à des décisions de plus en plus aberrantes, à des exagérations aux antipodes de la science. J’ai accumulé de nombreuses informations et il m’a semblé qu’après trente ans, il était temps de dresser un bilan. Je pense que le lecteur de ce livre comprendra qu’il n’est pas nécessaire d’attendre la COP99 pour mettre fin à ce cirque. D’autant que, pendant tout ce temps, les émissions mondiales de CO₂ ont augmenté de 65 %. Ces réunions sont, à l’évidence, inutiles.

Le dernier ouvrage de Samuel Furfari La vérité sur les COP : trente ans d’illusions (l’Artilleur, 2025)

Vous résumez les Conferences of Parties (COP) à un « cirque diplomatique, où la communication l’emporte trop souvent sur l’action, masquant une réalité implacable : depuis la conférence de Rio en 1992, loin de diminuer, les émissions mondiales de CO₂ ont augmenté de 65 %. » Pour vous, ces conférences internationales n’ont jamais apporté de résultats concrets ?
Au début de ces conférences, il y avait beaucoup d’espérance. Nous, les experts de la question de l’énergie et du climat, étions convaincus que nous allions obtenir des résultats.
Mais plus le temps est passé, plus je me suis aperçu qu’il était difficile de réduire les émissions de CO₂.
Parallèlement à cette situation, les activistes, voyant que nous ne parvenions pas à réduire ces émissions, ont intensifié leurs actions au point qu’aujourd’hui, la grande majorité de la population est convaincue que nous courons à une catastrophe climatique …
Des facteurs idéologiques et les intérêts particuliers des États peuvent-ils expliquer cette absence de résultats ?
Il y a beaucoup de raisons qui expliquent cette absence de résultats et celles que vous mentionnez en font partie. Mais je crois que la raison principale est que les gens ne comprennent pas ce qu’est l’énergie. C’est un bien nécessaire à leur prospérité et à leur qualité de vie.
Et puis, s’ajoute à cela le discours de certains militants qui souhaitent des alternatives aux énergies fossiles. Or le nucléaire, qui semble être l’alternative la plus viable, est rejeté unanimement par ces derniers et ceux qui se rendent aux COP.
Cette logique nous a conduits à investir massivement dans les énergies renouvelables et la triste réalité s’impose à nous aujourd’hui. Elles sont tellement intermittentes et variables qu’elles créent des perturbations énormes sur le réseau électrique et in fine, augmentent le prix de l’électricité.
Vous rapportez dans votre ouvrage un extrait du discours de François Hollande à l’Assemblée générale de l’ONU en septembre 2015, quelques mois avant le début de la COP21 à Paris. « Il y a des catastrophes, des tsunamis, des tremblements de terre, des îles qui vont bientôt disparaître, des côtes qui sont recouvertes, des glaciers qui fondent ; ce sont les dérèglements climatiques ». Ces propos sont-ils, pour vous, révélateurs de l’excès de communication autour des COP ?
C’est un exemple très emblématique parce qu’oser dire des choses pareilles devant les Nations Unies revient à discréditer la science et la France. Je donne de nombreux exemples, parfois cocasses, qui soulignent l’inutilité de ces rencontres, comme le fiasco retentissant de la COP de Copenhague ou encore lorsqu’un ambassadeur américain s’est écrié  : « Vous n’allez pas décider des dimensions de nos frigos. »
En France, par exemple, on aime se vanter de l’accord de Paris, mais j’ai intitulé le chapitre sur ce sujet « Désaccord à Paris », car il n’y a que des accords bureaucratiques qui n’empêchent nullement les émissions de CO₂ d’augmenter. D’ailleurs, je suis convaincu que l’on abandonnera le « Désaccord de Paris », comme on a abandonné le protocole de Kyoto sans même le faire savoir.
Mais tout gravite autour des peurs que les activistes et certains politiques aiment alimenter. Aujourd’hui, le climat n’est plus qu’une question de catastrophisme. Un catastrophisme largement relayé par une certaine presse. Les COP ont d’ailleurs longtemps construit leur popularité sur les peurs de la population mondiale. Ils ont abusé des images des ours blancs en faisant croire qu’ils se noieraient alors que la mer est l’habitat des ursus maritimus et que leur population se porte très bien.
Le terme « contradiction » apparaît fréquemment dans votre ouvrage. Vous évoquez notamment le mandat de Berlin adopté à l’issue de la première COP en 1995. « Le texte entérine également le principe de ‘responsabilités communes, mais différenciées’, en exemptant les pays en développement de toute contrainte chiffrée. » N’y a-t-il pas dès le départ une contradiction entre la volonté de réduire les émissions de gaz à effet de serre et le fait de ne pas demander des efforts aux pays en développement ?
Oui, mais ces pays en développement accusaient un retard économique et sociétal tel qu’il était moralement inconcevable de leur demander de réduire leur consommation d’énergie.
Et de toute façon, ces pays n’auraient jamais accepté de se tirer une balle dans le pied sur le plan économique pour réduire les émissions de CO₂. Je note d’ailleurs qu’ils refusent toujours de faire des efforts aujourd’hui.
Il est intéressant de voir que la Chine est toujours considérée par les COP comme un pays en développement alors qu’elle est la puissance qui émet le plus de gaz à effet de serre au monde et qu’elle inonde l’Occident de ses produits, ruinant au passage nos industries.
Il y a réellement une aberration politique derrière l’indulgence dont bénéficie Pékin sur la question climatique. Pendant que l’UE sacrifie son industrie pour réduire ses émissions mondiales de CO₂, la Chine, depuis la COP1 les a augmentées de 384 %.
La COP30 se tiendra à Belém, au Brésil, au mois de novembre. Faut-il également s’attendre à une « grande messe climatique », pour reprendre votre expression, ou à une conférence s’inscrivant dans la continuité de celle de Bakou en 2024 ? Malgré votre critique des COP, vous écrivez que la COP29 a « ouvert la voie à un pragmatisme assumé, dans lequel la recherche de solutions énergétiques réalistes et accessibles prime sur les dogmes. »
La COP29 a effectivement été un grand tournant, mais ce dernier avait déjà été amorcé lors de la COP26 de Glasgow en 2021. À l’époque, la Chine et l’Inde avaient mis un veto sur l’arrêt complet de l’utilisation du charbon.
Par la suite, lors des COP27 et 28, nous avons assisté au retour en grâce du concept d’énergie, au grand désespoir des activistes.
Et à Bakou, l’année dernière, le président azerbaïdjanais a même ouvert la conférence en qualifiant l’énergie de « cadeau de Dieu » ce qui a refroidi l’audience puisque depuis trente ans, on veut nous faire croire que nous allons nous passer des énergies fossiles.
D’ailleurs, lors des dernières COP, les entreprises énergétiques ont remplacé les activistes dans les prises de décision. C’est pour cela que je parle de « COP des coucous », car ce sont à présent les pays qui veulent du progrès, de la prospérité, qui conduisent les débats. Nous n’entendons plus parler de réduction des émissions.
Maintenant, nous attendons avec impatience le déroulement de la conférence de Belém. Allons-nous assister à un retour des activistes, ou au contraire à une continuité des COP précédentes ? Réponse en novembre.
Le cirque a commencé à Rio de Janeiro lors du Sommet de la Terre. Il serait sage d’y mettre fin au Brésil, mais je ne me fais pas d’illusions, car beaucoup de gens en tirent profit.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.