Relations franco-algériennes
Relations franco-algériennes : le nouveau ministre de l’Intérieur amorce un tournant
Le nouveau ministre de l'Intérieur a manifesté dimanche sa volonté de sortir de l'impasse relationnelle qui caractérise les liens franco-algériens depuis plus d'un an. Invité de France Inter/Franceinfo/Le Monde, Laurent Nunez a insisté sur l'urgence de restaurer la coopération sécuritaire entre les deux pays, estimant que la situation actuelle représentait un véritable défi pour son ministère.

Le ministre de l'Intérieur, Laurent Nunez, quitte la réunion hebdomadaire du nouveau gouvernement à l'Élysée, à Paris, le 14 octobre 2025.
Photo: JULIEN DE ROSA/AFP via Getty Images
Depuis que la crise diplomatique a éclaté entre Paris et Alger, les conséquences pratiques s’accumulent. Selon le ministre, l’absence d’échanges sécuritaires avec Alger constitue « un gros problème » pour l’exercice de ses fonctions.
Une crise aux conséquences sécuritaires préoccupantes
Au cœur du différend figure notamment le refus algérien de reprendre les ressortissants faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Cette situation a des répercussions visibles dans les structures françaises : Laurent Nunez a précisé que quatre citoyens algériens sur dix actuellement placés en centre de rétention administrative proviendraient directement de cette impasse.
« Il faudra forcément qu’il y ait un bougé »
Face à cette situation jugée inacceptable, le nouveau ministre a affirmé que le contexte exigeait impérativement un changement d’approche. « Il faudra forcément qu’il y ait un bougé », a-t-il déclaré, reconnaissant que le dialogue devait être rétabli sur les questions sensibles de sécurité et d’échanges d’informations. Cette position tranche avec l’escalade diplomatique des derniers mois. Révélateur de son intention de prioriser le pragmatisme, Laurent Nunez a annoncé qu’il allait mobiliser ses efforts pour restaurer le flux des laissez-passer, cet élément clé qui conditionne largement les relations administratives entre les deux nations.
Significativement, le ministre a admis ne pas avoir encore pris contact avec son homologue algérien, marquant ainsi le point de départ d’une possible normalisation des relations. Cette première démarche s’annonce comme une étape essentielle vers la reconstruction d’une coopération que les tensions diplomatiques ont gravement compromise.
Un cadre existant « pas complètement parfait »
Interrogé sur les velléités de certains parlementaires de remettre en cause l’accord franco-algérien de 1968, Laurent Nunez a choisi de tempérer les ardeurs réformatrices. Un rapport parlementaire rendu public en octobre proposait justement de revoir les dérogations traditionnellement accordées aux ressortissants algériens en matière de circulation, de séjour, d’emploi et de protection sociale – autant de privilèges hérités de cet accord historique.
Le ministre a adopté une position mesurée, reconnaissant que le cadre existant n’était « pas complètement parfait » mais refusant d’en faire actuellement une priorité. Cette ligne prudente contraste avec les appels répétés de son prédécesseur, Bruno Retailleau, qui avait régulièrement exprimé son souhait d’une révision substantielle du traité.
Les chiffres qui cristallisent les tensions
Les données compilées en 2024 illustrent l’ampleur de la présence algérienne en France. Avec près de 650.000 ressortissants algériens vivant sur le territoire français, l’Algérie occupe la position dominante parmi les nationalités étrangères établies dans le pays. Cette communauté demeure également la deuxième pour l’obtention de premiers titres de séjour.
Cependant, les statistiques judiciaires révèlent une autre dimension du dossier. Les Algériens constituent la première nationalité interpellée en situation irrégulière, avec plus de 33.000 personnes en 2024. Ces chiffres alimentent les débats politiques autour du contrôle migratoire et justifient partiellement les frictions diplomatiques actuelles.
Une stratégie de réconciliation pragmatique
En optant pour le dialogue plutôt que l’affrontation, Laurent Nunez semble dessiner les contours d’une approche nouvelle : celle d’un ministre soucieux de restaurer des relations opérationnelles, au-delà des querelles diplomatiques. Son refus d’accéder aux demandes de remise en cause de l’accord de 1968 constitue un signal politique clair aux autorités algériennes, suggérant que la France reste disposée à préserver les bases historiques de leur relation, à condition que la coopération sécuritaire soit rétablie. Un équilibre délicat entre fermeté et ouverture qui pourrait marquer un tournant dans cette crise prolongée.
Avec AFP

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