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Gabriel Attal peut-il incarner une rupture avec Emmanuel Macron ?

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L'ancien Premier ministre Gabriel Attal arrive pour prononcer un discours après les premiers résultats du second tour des élections législatives françaises à Matignon, à Paris, le 7 juillet 2024.

Photo: LUDOVIC MARIN/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 7 Min.

ANALYSE – Lors d’un discours prononcé à l’occasion de la rentrée du parti Renaissance à Arras le 21 septembre, l’ancien locataire de Matignon a acté sa rupture avec le chef de l’État, faisant un pas de plus vers 2027. Gabriel Attal a notamment esquissé les contours du nouveau modèle et de la « nouvelle République » qu’il propose. Mais l’actuel secrétaire général de Renaissance sera-t-il en mesure de porter un projet de rupture avec le macronisme alors qu’il en fut l’un des visages les plus emblématiques ?
Gabriel Attal a officiellement pris ses distances avec Emmanuel Macron il y a plus d’une semaine dans le Pas-de-Calais.
Une rupture qui n’a rien d’une grande surprise. La relation entre le président de la République et son ex-Premier ministre s’était progressivement abîmée depuis plus d’un an. Le politicien trentenaire n’avait pas digéré la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024.
Et il n’a pas manqué de le rappeler lors du meeting. « L’origine de l’instabilité, c’est la dissolution de l’Assemblée nationale. J’y étais opposé parce que je savais que la France et les Français en paieraient le prix », a-t-il déclaré devant les 3000 personnes présentes à Arras, dont trois ministres démissionnaires, Agnès Pannier-Runacher, Gérald Darmanin et Patricia Mirallès.
Cette frustration vis-à-vis de cette décision du président de la République s’était également fait sentir lors de la passation de pouvoir avec Michel Barnier en septembre 2024. Le chef des députés macronistes, dont le passage à Matignon avait été brutalement interrompu, avait alors rappelé que « 8 mois [Premier ministre], c’est court. Trop court. »
Et pour s’émanciper du chef de l’État, quoi de mieux que de tracer sa route vers le prochain scrutin présidentiel en n’omettant pas de tacler son ex-mentor et en proposant un nouveau projet. « Les Français attendent avec impatience 2027 pour mettre fin au chaos et aux vieux schémas », a-t-il lancé dans les Hauts-de-France, avant d’évoquer la « nouvelle République » qu’il appelle de ses vœux.
Mais pour l’homme fort de Renaissance, il ne s’agit pas pour autant de basculer vers une VIe République comme le souhaitent les Insoumis, mais de construire une « Ve République du XXIe siècle » et notamment de réduire le nombre d’élus, de parlementaires et de normes.
Un vaste projet de refondation que l’ex-ministre de l’Éducation nationale compte défendre auprès des élus locaux et des Français en général. D’ailleurs, même si la route vers 2027 est encore longue, l’ex-locataire de Matignon ne perd pas son temps et s’active. La semaine dernière, il était en déplacement dans l’Hérault, département dans lequel il est resté trois jours et où il a rencontré des élus et des acteurs économiques locaux.
 Un parcours riche en macronie
Mais toute la difficulté pour le secrétaire général de Renaissance sera d’apparaître comme une personnalité politique crédible sur le plan de la rupture avec le chef de l’État. Gabriel Attal est l’un de ses plus anciens lieutenants. Il a rejoint le mouvement « En Marche ! » en 2016 et a fait son entrée à l’Assemblée nationale en juin 2017. Il est entré pour la première fois au gouvernement en octobre 2018 en tant que secrétaire d’État auprès de Jean-Michel Blanquer, alors ministre de l’Éducation nationale.
Deux ans plus tard, il devient porte-parole du gouvernement de Jean Castex, succède à Olivier Dussopt aux Comptes publics en 2022 avant d’être nommé ministre de l’Éducation nationale l’année suivante, puis de devenir le plus jeune Premier ministre de la Ve République en janvier 2024.
Une série de fonctions occupées qui risquent de donner de Gabriel Attal une image de pur produit de la macronie dont il aura peut-être du mal à s’extirper.
Cependant, en dépit de ce parcours politique qui pourrait constituer un obstacle à ses ambitions élyséennes, l’homme politique de 36 ans dispose de quelques cartes pour marquer réellement sa différence avec Emmanuel Macron.
Le président du groupe Ensemble pour la République à l’Assemblée s’est toujours démarqué de la macronie et plus particulièrement du président de la République par sa fermeté sur certains dossiers diplomatiques comme les relations entre la France et l’Algérie, ainsi que par sa vision intransigeante de la laïcité. Au mois de janvier, le député des Hauts-de-Seine appelait dans une tribune publiée dans Le Figaro à « dénoncer » l’accord franco-algérien de 1968. Quelques mois plus tard, il proposait d’interdire le voile pour les mineures de moins de 15 ans.
Un air de déjà vu ?
Les luttes entre présidents et anciens fidèles sont légion dans l’histoire politique française de ces soixante dernières années. Tous les Français se souviennent de l’animosité que le général de Gaulle éprouvait pour Georges Pompidou à la fin des années 1960, mais aussi des tensions entre François Mitterrand et Lionel Jospin en 1995. À l’époque, le candidat socialiste avait pris ses distances avec celui qui était surnommé par ses proches « Tonton » avec la fameuse formule du « droit d’inventaire », c’est-à-dire dresser le bilan des deux mandats du président socialiste.
Et des années plus tard, à la veille de l’élection présidentielle de 2007, ce sera au tour de Nicolas Sarkozy de s’émanciper de Jacques Chirac.
Ainsi, en faisant un pas de plus vers 2027 et en actant sa rupture avec le président, Gabriel Attal prend alors aussi le risque d’être vu par les électeurs comme un responsable politique répétant des manœuvres politiques vues et revues depuis le début de la Vᵉ République.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.