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Déserts médicaux : la région Centre-Val de Loire choisit de salarier des médecins

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Photo: Damien MEYER / AFP

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Durée de lecture: 4 Min.

Face à la plus faible densité de médecins généralistes de France hexagonale, la région Centre-Val de Loire mise sur le salariat depuis 2019. Un modèle qui séduit les praticiens mais peine à atteindre ses objectifs quantitatifs.

Depuis 2019, la région Centre-Val de Loire expérimente une solution inédite pour combattre les déserts médicaux : salarier directement des professionnels de santé. Soixante-neuf praticiens exercent aujourd’hui dans vingt centres de santé régionaux, offrant une alternative au modèle libéral traditionnel.

« C’est tout un bourg qui récupère son autonomie »

La situation sanitaire du Centre-Val de Loire justifie cette approche innovante. Selon la Région, le territoire affiche la plus faible densité de médecins généralistes de France hexagonale avec 101,8 praticiens pour 100.000 habitants, contre 125,2 en moyenne nationale. Cinq départements sur six restent en deçà de cette moyenne, et 25 % des habitants ne disposent pas de médecin traitant.

À Patay, village beauceron de 2.190 habitants situé à 30 kilomètres d’Orléans, l’arrivée de nouveaux soignants a été accueillie comme un « soulagement », se réjouit Jacqueline Guignard, patiente de 76 ans qui n’avait plus de médecin traitant depuis plusieurs années. « C’est tout un bourg qui récupère son autonomie », souligne cette retraitée.

« L’activité libérale est bien, mais elle m’épuisait »

Trois médecins ont choisi le salariat dans ce centre, à l’image de Mathilde Pottier, 30 ans, qui y a trouvé la possibilité de ne faire « que du médical ». « Dans le libéral, les contraintes horaires et du temps consacré à l’administratif étaient une charge », explique-t-elle. Avec des secrétaires médicales présentes, « j’ai vraiment pu me dégager ce temps-là », avec le sentiment de répondre à un « vrai besoin ».

Cette motivation se retrouve chez Belkacem Otsmane, praticien au centre de Saint-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire), qui s’est tourné vers le salariat après avoir été « lessivé par la paperasse ». « L’activité libérale est bien, mais elle m’épuisait. Quand on arrive ici, tout est mis à disposition du médecin pour qu’il puisse exercer : le centre, le secrétariat, le matériel médical », résume-t-il.

Des résultats encourageants mais insuffisants

Les premiers bilans montrent un impact concret : 75.000 consultations ont été réalisées en 2025 par ces médecins salariés, permettant à plus de 27.000 habitants de disposer désormais d’un médecin traitant. « On évite plein d’hospitalisations en permettant aux gens d’être suivis », assure le Dr Ostmane.

Toutefois, les objectifs initiaux ne sont pas atteints. La promesse de 150 médecins en 2025 ne sera pas tenue, pas plus que celle des 300 embauches prévues en 2028. Un rapport de la chambre régionale des comptes de 2023 soulignait d’ailleurs que ce modèle n’avait pas encore « démontré sa plus-value ».

Un modèle qui fait école malgré les difficultés

François Bonneau (PS), président de la Région, assume ces écarts : « Les objectifs étaient ambitieux, mais tout ceci monte en puissance. » Il précise que la participation auprès du Groupement d’intérêt public (GIP) régional, qui salarie les médecins, devrait être inférieure à un million d’euros en 2026. Un salaire brut de 5.500 euros est proposé aux médecins débutants.

François Bonneau (PS), président de la Région Centre-Val de Loire. (STEPHANE DE SAKUTIN/AFP via Getty Images)

« Tous les domaines en matière de santé sont aujourd’hui marqués par la difficulté de recrutement, et ce qui compte pour nous, c’est de mettre en avant des conditions de pratique », ajoute-t-il.

Le modèle inspire d’autres territoires : « Nous avons été précurseurs : l’Occitanie et la région Auvergne-Rhône-Alpes avancent depuis dans ce sens », une « preuve » selon François Bonneau de l’intérêt du projet, mais qui crée aussi une nouvelle concurrence pour attirer les profils.

« Il reste beaucoup à faire, bien sûr, mais face à une telle préoccupation, c’est assez significatif », conclut le président régional.