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Arctique : des ours polaires en meilleure santé que prévu, mais pour combien de temps ?

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Un ours polaire mâle marche sur la glace de mer près des glaciers à l'est du Spitzberg, dans l'archipel du Svalbard, le 9 avril 2025. L'Institut polaire norvégien, organisme de recherche sur l'Arctique, a organisé une expédition de cinq semaines pour prélever des biopsies de tissus adipeux et des échantillons de sang sur des ours polaires afin d'étudier l'impact des polluants sur leur santé.

Photo: OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 10 Min.

« Polluants éternels », fonte de la banquise : les ours polaires du Svalbard en Arctique arrivent à faire face aux ravages de l’homme sur la planète mieux que prévu, ont constaté des experts de l’Institut polaire norvégien (NPI), mais pour combien de temps ?
« Jusqu’à présent, ils ont l’air d’aller bien. Il y a des changements notables dans leur comportement mais ils restent en bonne santé et en bonne condition physique, ils se reproduisent, ils vont mieux que nous ne le craignions. Mais il y a une limite et l’avenir risque de ne pas être aussi radieux », résume le Norvégien Jon Aars, responsable du programme « ours polaires » au NPI.

Le chef du programme sur les ours polaires, Jon Aars, change le collier GPS d’une femelle ours polaire dans l’est du Spitzberg, dans l’archipel du Svalbard, le 15 avril 2025. (OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images)

De 50 à 70 ours polaires capturés pour l’étude
Il base son constat sur l’étude de 50 à 70 ours polaires capturés chaque année sur deux décennies.
Depuis quarante ans le NPI observe ce mammifère au Svalbard, où il est touché à la fois par les « polluants éternels » produits au bout du monde et par le réchauffement climatique trois à quatre fois plus important en Arctique que la moyenne mondiale.
Environ 300 ours polaires vivent au Svalbard toute l’année, selon l’Institut polaire.
Analyse minutieuse sur « les tissus graisseux » des ours
En avril, huit scientifiques ont participé à une expédition sur le brise-glace de recherche Kronprins Haakon,

Le brise-glace scientifique Kronprins Haakon navigue dans un fjord recouvert de glace de mer dans l’est du Spitzberg, le 6 avril 2025. (OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images)

Expédition au cours de laquelle de nouvelles méthodologies ont été expérimentées.

Le chef du programme sur les ours polaires, Jon Aars (2e à dr.) de Norvège, donne un briefing aux scientifiques Marie-Anne Blanchet (2e à g.) de France, Laura Pirard (en haut à g.) de Belgique, Sofie Soderstrom de Suède, le pilote d’hélicoptère Stig Folid (à dr.) de Norvège et le mécanicien d’hélicoptère Elias birkeflet (à g.) de Norvège, dans l’est du Spitzberg, alors qu’ils naviguent vers l’archipel du Svalbard à bord du « Kronprins Haakon », le 4 avril 2025. (OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images)

Les experts ont pour la première fois prélevé des tranches de tissus graisseux où les PFAS viennent se loger pour évaluer leur impact sur la santé de l’ours.

La scientifique française Marie-Anne Blanchet examine des oursons avant de prélever des biopsies du tissu adipeux et des échantillons de sang sur leur mère sous sédatif, à l’est du Spitzberg, dans l’archipel du Svalbard, le 6 avril 2025. (OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images)

Ils ont également relevé les données de capteurs cardiaques implantés l’an passé sur des femelles et qui, couplés avec des GPS, doivent donner des informations sur leurs dépenses énergétiques selon une nouvelle technologie.

Marie-Anne Blanchet, analyste spatiale française, montre un enregistreur cardiaque implanté sur une femelle ours polaire dans un laboratoire à bord du brise-glace scientifique « Kronprins Haakon », alors qu’elle navigue dans l’est du Spitzberg, dans l’archipel du Svalbard, le 7 avril 2025. (OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images)

Entre deux sorties, ils ont fait part de leur constat à un photographe de l’AFP qui les a accompagnés pour cette mission.

Marie-Anne Blanchet, analyste spatiale française, montre le tracé d’un enregistreur cardiaque sur une femelle ours polaire dans un laboratoire à bord du brise-glace scientifique « Kronprins Haakon », alors qu’elle navigue dans l’est du Spitzberg, dans l’archipel du Svalbard, le 8 avril 2025. (OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images)

« Succès des réglementations »
« Au cours des années, il y a des ours que nous avons recapturés à plusieurs reprises, parfois six ou huit fois, et nous avons observé une diminution des niveaux de polluants chez certains d’entre eux. Cela reflète le succès des réglementations au cours des dernières décennies », relève l’écotoxicologue finlandaise Heli Routti qui travaille sur ce programme depuis 15 ans.

Heli Routti, toxicologue finlandais spécialisé dans les mammifères marins, à bord du brise-glace scientifique « Kronprins Haakon » dans l’est du Spitzberg, dans l’archipel du Svalbard, le 8 avril 2025. (OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images)

Les experts du NPI contribuent au Programme de surveillance et d’évaluation de l’Arctique (Amap), sous la houlette du Conseil de l’Arctique, dont les conclusions sont prises en compte pour l’adoption de règlementations contre différents types de polluants.
Diminution des polluants, mais substances chimiques en augmentation
« La concentration de nombreux polluants, soumis à règlementation, a diminué en quarante ans dans l’eau de l’Arctique. Mais la variété des polluants a augmenté. Nous observons maintenant davantage de types de substances chimiques », poursuit Mme Routti évoquant des pesticides organochlorés interdits mais retrouvés dans les tissus adipeux ou des composés perfluorés identifiés dans le sang du mammifère.

Des échantillons de sang d’ours polaires dans l’est du Spitzberg, dans l’archipel du Svalbard, le 9 avril 2025. (OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images)

Quasi indestructibles et présents dans quantité d’objets et produits comme les poêles antiadhésives ou les cosmétiques, les « polluants éternels » sont des substances chimiques per- et polyfluoroalkylés qui s’accumulent dans l’air, le sol, l’eau, la nourriture et, in fine, dans le corps humain, notamment dans le sang et les tissus du rein ou du foie. Ces PFAS inquiètent pour plusieurs effets toxiques sur la santé, incluant notamment des cancers pour certains.
« L’environnement change, la banquise recule »
En ce qui concerne le réchauffement climatique,  » ce qu’on voit clairement, c’est que l’environnement change, la banquise recule.
 

Un ours polaire mâle observe un phoque barbu sur la banquise près des glaciers de l’est du Spitzberg, dans l’archipel du Svalbard, le 9 avril 2025. (OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images)

Les ours ne peuvent plus l’utiliser comme il y a 20 ou 30 ans. Il y a aussi une variabilité inter-annuelle importante : d’une année à l’autre, les conditions changent beaucoup, ce qui rend l’environnement de plus en plus imprévisible. C’est difficile à suivre pour les animaux », explique la Française Marie-Anne Blanchet, spécialiste d’écologie spatiale.

La scientifique française Marie-Anne Blanchet examine des oursons avant de prélever des biopsies du tissu adipeux et des échantillons de sang sur leur mère sous sédatif, à l’est du Spitzberg, dans l’archipel du Svalbard, le 6 avril 2025. (OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images)

Il sait s’adapter

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« Mais les ours ont un avantage : ils vivent longtemps, accumulent de l’expérience et apprennent tout au long de leur vie. Cela leur donne un certain potentiel d’adaptation. Par exemple, ces dernières années, les ours locaux de Svalbard ont commencé à chasser davantage de rennes », poursuit Mme Blanchet.
« Est-ce parce que la population de rennes augmente ? Ou bien parce qu’ils n’arrivent plus à attraper de phoques à cause du recul de la glace ? Difficile à dire. Mais cette diversification alimentaire peut les aider à s’adapter. » Tant que l’on n’atteint pas un point de bascule « au-delà duquel les ours ne pourraient plus faire face aux changements », ajoute-t-elle.
L’Institut polaire norvégien (Norsk Polarinstitutt), basé à Tromso, est un organisme public chargé de la recherche scientifique et de la gestion des zones polaires.

Le bâtiment abritant l’Institut norvégien de recherche marine (IMR) et l’Institut polaire norvégien (Norsk Polarinstitutt) dans le centre-ville de Tromso le 11 janvier 2019. (OLIVIER MORIN/AFP via Getty Images)

Il est principalement financé par l’État norvégien avec des compléments provenant de projets nationaux et internationaux.