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Grégory Villemin

Affaire Grégory : la grand-tante à nouveau mise en examen après 40 ans de mystère

Quarante ans après la mort tragique du petit Grégory Villemin, l'enquête connaît un nouveau rebondissement. Jacqueline Jacob, 81 ans et grand-tante de la victime, a été mise en examen vendredi pour association de malfaiteurs. Les magistrats la soupçonnent d'être l'auteure des lettres anonymes ayant revendiqué le meurtre de l'enfant, retrouvé noyé dans la Vologne le 16 octobre 1984, à l'âge de quatre ans.

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Jacqueline Jacob arrive avec son avocat Stéphane Giuranna (à dr.) et son mari Marcel Jacob (à g.) pour une audience devant la cour d'appel de Dijon, le 24 octobre 2025.

Photo: ARNAUD FINISTRE/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 4 Min.

Après plus d’une heure et demie d’audition à la cour d’appel de Dijon, cette mise en examen vise spécifiquement l’association de malfaiteurs criminelle, une qualification juridique permettant de poursuivre une personne soupçonnée d’avoir participé à la préparation d’un crime, même sans preuve directe de son implication dans l’acte lui-même.

La stylométrie au cœur des accusations

Les juges d’instruction s’appuient notamment sur une analyse de stylométrie, une technique scientifique moderne qui examine l’orthographe et les tournures de phrases caractéristiques d’un auteur. Cette étude soutient « très fortement l’hypothèse » que Jacqueline Jacob aurait rédigé la lettre du 16 octobre 1984, ce message glaçant qui disait : « J’espère que tu mourras de chagrin le chef (…) Voilà ma vengeance. Pauvre con ».
Les enquêteurs attribuent également à l’octogénaire l’appel téléphonique anonyme de revendication passé le jour du drame. Un élément troublant vient corroborer ces soupçons : son beau-frère, René Jacob, a déclaré en août 2022 avoir « reconnu » sa voix en écoutant un enregistrement du corbeau devant les gendarmes.

Une défense qui dénonce une « erreur judiciaire »

La défense de Jacqueline Jacob ne décolère pas. Me Stéphane Giuranna, l’un de ses trois avocats, annonce un appel immédiat « sur la forme et sur le fond ». Il souligne que sa cliente est repartie « sans aucune mesure de coercition ni même un contrôle judiciaire », preuve selon lui que cette mise en examen « ne pèse pas bien lourd et que ça vaut pas tripette ».
Me Alexandre Bouthier dénonce quant à lui un déjà-vu judiciaire. Il rappelle que Jacqueline Jacob avait déjà été mise en examen en 2017 pour « enlèvement et séquestration suivie de mort » et même emprisonnée quatre jours, avant que cette mise en examen ne soit annulée en mai 2018 pour vice de forme. « La justice n’apprend pas de ses erreurs », fustige-t-il.

Des expertises qui se contredisent

La défense s’appuie sur des éléments troublants. Une expertise vocale ancienne avait déterminé que le corbeau était « un homme âgé de 45 à 55 ans ». De plus, une expertise de 1991 avait attribué la lettre de revendication non pas à Jacqueline Jacob, mais à Bernard Laroche, cousin du père de Grégory, qui avait été inculpé puis abattu par Jean-Marie Villemin.
Me Bouthier qualifie la stylométrie de « gadget », tandis que Me Marie-Christine Chastant-Morand, avocate des parents de Grégory, défend au contraire cette technique comme « un moyen scientifique nouveau qui sonne la signature, l’empreinte de l’expression » d’une personne.
Fait notable : le procureur général de Dijon lui-même, Philippe Astruc, avait estimé dans ses réquisitions que la mise en examen de Jacqueline Jacob n’était pas justifiée, considérant que les arguments à charge « ne suffisent pas à constituer des indices graves ou concordants ».

Une haine familiale ancestrale

Dès le début de l’enquête, les investigators avaient identifié une animosité profonde entre les familles Jacob et Villemin, nourrie de jalousies tenaces typiques de certaines campagnes. Jacqueline Jacob, alors déléguée CGT, aurait traité Jean-Marie Villemin, père de Grégory et contremaître, de « chef de mes couilles » en 1982, selon plusieurs témoins. Les époux Marcel et Jacqueline Jacob ont toujours nié toute haine.
Selon les juges, il y aurait eu jusqu’à cinq « corbeaux » différents harcelant la famille Villemin pendant des années, semant lettres anonymes et appels menaçants.

Des parents qui gardent espoir

« Les parents sont déterminés », affirme Me Chastant-Morand, qui garde « espoir » que la vérité éclatera enfin, « avec tous les moyens possibles pour la faire émerger ». Après plus de quatre décennies d’une enquête chaotique, jalonnée de rebondissements et d’erreurs procédurales, l’affaire Grégory reste l’une des énigmes judiciaires les plus médiatisées de France.
Avec AFP