Opinion
Tuer pour prélever : les prélèvements forcés d’organes perdurent en Chine

Le Dr Harold King à Saint-Gilles-Croix-de-Vie (Vendée) le 28 juin 2025.
Photo: Nathalie Dieul/Epoch Times
Le 20 juillet 1999 marquait le début de la persécution du Falun Dafa en Chine, une pratique alors suivie par près d’un douzième de la population. Depuis, les pratiquants de Falun Dafa sont devenus les principales victimes d’un crime aussi effroyable que systématique : les prélèvements forcés d’organes. Dans cet article, nous retraçons les grandes étapes des enquêtes qui, au fil des décennies, ont mis au jour ces atrocités. Mais surtout, nous faisons le point sur la situation actuelle. Où en est la Chine, 26 ans jour pour jour après le début de cette persécution ?
Le prélèvement forcé d’organes consiste à tuer une personne en lui retirant, sans son consentement, un ou plusieurs organes, dans le but de les transplanter ou de les utiliser à d’autres fins médicales.
C’est ce qui se passe à grande échelle en Chine, où le Parti communiste chinois (PCC) a mis en place ce système comme moyen d’éliminer ses prisonniers de conscience.
C’est également en 2006 que le Dr Torsten Trey a fondé l’organisation DAFOH (Doctors Against Forced Organ Harvesting) aux États-Unis, avec d’autres médecins. « C’est en lisant un article d’Epoch Times sur le sujet qu’il a décidé d’agir », explique le Dr Harold King. « Epoch Times a été le premier journal à enquêter sur une suspicion de prélèvements forcés d’organes en Chine. »
Le mois suivant, en mai, une organisation a sollicité les avocats canadiens David Kilgour et David Matas pour enquêter. Le premier était ancien secrétaire d’État du Canada pour la région Asie-Pacifique, le second, avocat spécialisé dans la défense des droits de l’homme.

David Matas (à g.) et Ethan Gutmann (à dr.) lors d’une conférence à Montréal en 2014, à l’occasion de la sortie du livre Le Massacre : meurtres de masse, prélèvements d’organes et la solution secrète de la Chine au problème des dissidents. (Nathalie Dieul/Epoch Times)
À la même période, le journaliste d’investigation britannique Ethan Gutmann, spécialiste de la Chine, entamait ses propres recherches sur les prélèvements forcés d’organes. Son enquête a duré sept ans et l’a conduit à des conclusions similaires à celles de David Matas et David Kilgour.
En 2014, il publie le fruit de ses travaux dans un ouvrage marquant : The Slaughter: Mass Killings, Organ Harvesting, and China’s Secret Solution to Its Dissident Problem (Le massacre : meurtres de masse, prélèvements d’organes et la solution secrète de la Chine au problème de dissidents, ndlr).

Le livre d’Ethan Gutmann lors de son lancement à Montréal en 2014. (Nathalie Dieul/Epoch Times)
Entre 60.000 et 100.000 transplantations par an en Chine
En 2016, les trois enquêteurs — David Kilgour, David Matas et Ethan Gutmann — ont uni leurs forces pour publier une nouvelle enquête de grande envergure visant à évaluer l’ampleur réelle des prélèvements forcés d’organes en Chine.
Leur rapport de 680 pages s’appuie notamment sur l’analyse de 169 hôpitaux autorisés à pratiquer des greffes par le ministère chinois de la Santé. Leur estimation : entre 60.000 et 100.000 transplantations par an depuis les années 2000. Ce qui représenterait plus d’un million de greffes au moment de la publication du rapport.
« C’est deux à trois fois plus que les États-Unis, et cela sans aucun système de don d’organes légitime », s’alarme le Dr Harold King, directeur adjoint de DAFOH. Il souligne que ces chiffres pour la seule Chine dépassent ceux de tous les autres pays réunis, y compris les États-Unis, qui disposent pourtant du système de don d’organes le plus développé et le plus transparent au monde.
Un tribunal indépendant confirme les crimes : le China Tribunal
À partir de 2018, un tribunal indépendant siégeant à Londres, le China Tribunal, a été présidé par Sir Geoffrey Nice, ancien procureur principal lors du procès de Slobodan Milosevic devant le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie.
Le tribunal a examiné l’ensemble des preuves disponibles concernant les prélèvements forcés d’organes en Chine.
« Le jugement a été rendu en 2019, après un an d’analyse minutieuse de tous les documents », explique le Dr Harold King. « Deux séries d’auditions ont été organisées, avec des témoignages de victimes, d’experts et d’enquêteurs. Au terme de ce processus rigoureux, le tribunal a conclu que les prélèvements forcés d’organes ont bel et bien lieu en Chine, qu’ils continuent encore aujourd’hui, et que les pratiquants de Falun Gong en sont la principale source. »
Au fil des années, les témoignages se sont multipliés. « Ce qui était prévisible s’est produit : de plus en plus de témoins sont apparus — des médecins, des patients, des citoyens chinois qui ont décidé de révéler ce qu’ils avaient vu », explique le Dr Harold King, directeur de DAFOH pour l’Europe.
La crise du Covid-19 a également levé le voile sur certains aspects du système chinois. Elle a mis en lumière le fonctionnement opaque du Parti communiste chinois, notamment dans le secteur médical. Plusieurs médecins qui avaient tenté d’alerter sur la propagation du virus sont morts peu après leurs révélations. « Plus récemment encore, un étudiant en médecine a disparu peu après avoir dénoncé un trafic d’organes dans l’hôpital de Xiangya, où il travaillait », souligne le Dr King.
Pendant la pandémie de Covid-19, la Chine a réalisé ce que les autorités ont présenté comme une première mondiale : une double transplantation pulmonaire sur un patient atteint du virus. Deux autres opérations similaires ont suivi, toutes avec un point commun troublant : les poumons nécessaires ont été trouvés en moins de 48 heures.
« Les poumons sont parmi les organes les plus difficiles à transplanter », explique le Dr Harold King. « Ils doivent non seulement être compatibles sur le plan immunologique, mais aussi avoir la bonne taille pour s’adapter à la cage thoracique du receveur. »
La vitesse à laquelle les organes ont été « trouvés » pour ces interventions a suscité l’incompréhension, voire l’inquiétude, dans la communauté médicale internationale.
Car ce n’est pas un cas isolé. Depuis le début des années 2000, la Chine réalise régulièrement des greffes avec des délais étonnamment courts, avec une date d’opération fixée à l’avance — une pratique impossible dans les pays où les dons d’organes sont volontaires et anonymes.
Ce type de procédure coercitive n’a rien d’exceptionnel. Depuis plus de 20 ans, les pratiquants de Falun Dafa arrêtés en Chine sont systématiquement soumis à des prises de sang, dans le cadre de la persécution orchestrée par le Parti communiste chinois (PCC). L’objectif : alimenter une vaste base de données biologique, permettant d’identifier rapidement un donneur « compatible » lorsqu’un patient a besoin d’un organe.
« Depuis le début de la persécution, les pratiquants arrêtés subissent des examens médicaux complets : prises de sang, radiographies, échographies cardiaques et rénales, ainsi que des analyses d’urine », détaille le Dr Harold King, directeur de DAFOH Europe. « Tout cela vise à évaluer l’état de leurs organes. »
Les perspectives d’évolution du système mis en place par le Parti communiste chinois (PCC) sont tout aussi préoccupantes.
Dans le cadre de l’initiative de la Ceinture et la Route (Belt and Road Initiative), le régime chinois a annoncé dès 2016 son intention de promouvoir le développement des transplantations d’organes dans les pays partenaires. Autrement dit, le modèle chinois de transplantation — opaque, rapide, sans transparence sur l’origine des organes — pourrait être étendu à d’autres régions du monde, en particulier dans les pays liés économiquement et médicalement à Pékin.
Derrière cette façade de coopération médicale, c’est en réalité une stratégie de banalisation du crime des prélèvements forcés qui se dessine.
« Certains pourraient penser que c’est bénéfique pour les patients en attente d’un organe, surtout en situation d’urgence. Mais accepter un organe prélevé sans consentement, c’est franchir une ligne rouge. »
« La médecine est déjà dévoyée en Chine par ces pratiques. Exporter ce modèle reviendrait à détruire les fondements mêmes de l’éthique médicale dans le monde entier. »
Face à cette menace, certains pays ont pris position. Taïwan, la Corée du Sud et le Japon ont refusé de coopérer avec la Chine dans le domaine des transplantations d’organes, envoyant un message fort en faveur du respect des droits humains et de l’éthique médicale.
Le Parti communiste chinois mise sur le silence pour couvrir les violations massives des droits humains, notamment contre les pratiquants de Falun Gong. Briser ce silence, c’est déjà affaiblir son pouvoir. « Plus on parle de ces crimes, plus on fissure le mur du silence que le PCC a patiemment bâti à l’étranger », insiste le Dr King.
1. S’informer et sensibiliser autour de soi est une première action accessible à tous. Une dizaine de documentaires et films abordent le sujet en profondeur, notamment le plus récent : Organes d’État. En parler à ses proches, partager ces ressources, et relayer l’information sur les réseaux sociaux, c’est contribuer à faire la lumière sur une réalité que Pékin tente d’étouffer depuis plus de vingt ans.
2. Signer la pétition G7 + 7. Cette initiative internationale demande aux pays du G7 ainsi qu’à sept autres pays d’agir fermement pour mettre fin à ces crimes, notamment contre les prisonniers de conscience. En signant, vous contribuez à faire pression sur les gouvernements pour qu’ils prennent position.
3. Interpeller les représentants politiques. Vous pouvez écrire à votre député, sénateur ou tout autre élu pour les sensibiliser à ce sujet souvent méconnu. Il est également possible de s’impliquer localement avec DAFOH (Doctors Against Forced Organ Harvesting), par exemple en organisant la projection du documentaire Organes d’État dans votre ville.
4. Mobiliser le secteur médical. Les professionnels de santé ont un rôle central à jouer. « Le plus important, c’est qu’ils en parlent entre eux, qu’ils s’informent et s’interrogent sur l’éthique de la transplantation d’organes en Chine », souligne le Dr King.
DAFOH accueille médecins, chercheurs et spécialistes du secteur, et NAFOH, sa branche dédiée aux infirmiers et infirmières, permet à chacun de s’engager selon son domaine d’expertise. L’adhésion est gratuite.
5. Faire connaître l’enjeu. Qu’il s’agisse de conversations en famille, de publications sur les réseaux sociaux ou d’initiatives citoyennes, chaque voix compte pour briser le silence. En rendant visible cette tragédie, on en limite la portée.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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