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Nicolas Sarkozy condamné dans l’affaire Bygmalion : les autres dossiers qui pèsent sur l’ancien président

La condamnation de Nicolas Sarkozy dans l’affaire Bygmalion est désormais définitive, inscrivant une deuxième mention pénale à son casier judiciaire. L’ancien président est toutefois loin d’avoir tourné la page de ses démêlés avec la justice. Le point sur les procédures en cours.

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Photo: JULIEN DE ROSA/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 12 Min.

Le couperet est tombé. Ce mercredi 26 novembre, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par Nicolas Sarkozy dans l’affaire Bygmalion, rendant définitive la condamnation de l’ancien chef de l’État. Cette décision inscrit une deuxième condamnation pénale au casier judiciaire de l’ex-président, après celle prononcée dans l’affaire des écoutes dite « Bismuth ».
Dans les prochaines semaines, Nicolas Sarkozy devra donc se présenter devant le juge de l’application des peines, chargé de fixer les modalités d’exécution de cette nouvelle sanction.
Le 14 février 2024, la cour d’appel de Paris avait condamné l’ancien président à un an d’emprisonnement, dont six mois ferme, pour financement illégal de sa campagne présidentielle de 2012, une campagne finalement perdue. La juridiction avait prévu que la partie ferme soit aménagée, via un bracelet électronique.
L’affaire Bygmalion trouve son origine dans l’explosion des dépenses de la campagne de 2012 : près de 43 millions d’euros avaient été engagés, pour un plafond légal fixé à 22,5 millions. Pour masquer ce dépassement massif, un système de double facturation avait été mis en place. Une grande partie des frais de meetings avait ainsi été artificiellement transférée sur l’UMP (devenue Les Républicains en 2015), via des conventions fictives.
Nicolas Sarkozy n’était toutefois pas poursuivi pour sa participation à ce mécanisme de fausses factures, contrairement à plusieurs coprévenus, mais en tant que bénéficiaire du financement irrégulier en sa qualité de candidat.
En décembre 2024, la Cour de cassation, qui juge le respect du droit et non le fond des dossiers, avait aussi confirmé une autre peine d’un an de prison ferme contre Nicolas Sarkozy, également aménageable sous bracelet électronique, pour corruption et trafic d’influence dans l’affaire des écoutes dite « Bismuth ».

Mis en cause dans de nombreux dossiers politico-financiers au cours de la dernière décennie, Nicolas Sarkozy n’a toutefois pas fini d’affronter les prétoires. Si plusieurs enquêtes ont abouti à un non-lieu, notamment les affaires Bettencourt, Tapie ou Karachi, d’autres procédures restent encore ouvertes.

Financement libyen de la campagne 2007 : un procès en appel prévu pour mars 2026
Dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007, Nicolas Sarkozy a été condamné en première instance, le 25 septembre, à cinq ans d’emprisonnement ferme, une peine assortie d’un mandat de dépôt avec exécution provisoire, ainsi qu’à une amende de 100 000 euros. L’ancien président a immédiatement fait appel, ce qui suspend l’exécution définitive du jugement, mais pas son incarcération immédiate.
Reconnu coupable par le tribunal correctionnel de Paris d’avoir laissé ses collaborateurs solliciter, en connaissance de cause, des fonds occultes auprès du régime de Mouammar Kadhafi pour financer sa campagne victorieuse de 2007, Nicolas Sarkozy a été écroué à la prison de la Santé. Il y a passé trois semaines, avant d’être libéré sous contrôle judiciaire le 10 novembre, annonçant à cette occasion la parution d’un nouveau livre pour le 10 décembre, Journal d’un prisonnier (Fayard). Son procès en appel se tiendra du 16 mars au 3 juin 2026.
Rétractation de Ziad Takieddine : mis en examen pour subornation de témoin

Cette affaire découle du revirement spectaculaire de Ziad Takieddine, personnage central du dossier du financement libyen présumé de la campagne présidentielle de 2007. Pendant près d’une décennie, l’homme d’affaires franco-libanais avait accusé l’ancien chef de l’État d’avoir reçu plusieurs millions d’euros en espèces de la part du régime de Mouammar Kadhafi, mais le 11 novembre 2020, il déclare sur BFMTV et dans Paris Match, à la surprise générale, que Sarkozy « n’a pas touché un centime ».
Ce retournement, intervenu après des années d’accusations constantes, intrigue les enquêteurs. Les juges d’instruction mettent au jour une série de déplacements, de contacts et d’intermédiaires franco-libanais susceptibles d’avoir joué un rôle dans cette rétractation publique. Ils soupçonnent l’existence du dispositif coordonné pour obtenir de Takieddine une déclaration exonérant Sarkozy, à un moment stratégique pour la défense de l’ancien président.
En mai 2021 s’ouvre une information judiciaire consacrée aux conditions d’organisation de cette interview, sur fond de soupçons de subornation de témoin. Le 5 juin 2021, Michèle Marchand, dite « Mimi » Marchand, figure de la presse people et proche du couple Sarkozy, est mise en examen et placée sous contrôle judiciaire, notamment pour « subornation de témoin ».
Dans les mois qui suivent, plusieurs autres protagonistes sont également mis en examen : Arnaud de la Villesbrunne, ancien directeur de Publicis ; Pierre Reynaud, homme d’affaires décédé en mai 2023 ; Noël Dubus, intermédiaire déjà condamné pour escroquerie ; David Layani, entrepreneur.
Tous sont suspectés d’avoir participé, de différentes façons, à une tentative visant à obtenir de Ziad Takieddine le retrait, contre compensation, de ses accusations contre Nicolas Sarkozy. Les enquêteurs cherchent aussi à déterminer si l’ancien chef de l’État a pu donner son accord ou son soutien à cette opération.

En octobre 2023, Nicolas Sarkozy est lui-même mis en examen pour recel de subornation de témoin et association de malfaiteurs en vue de préparer une escroquerie au jugement en bande organisée. En juillet 2024, c’est son épouse, Carla Bruni-Sarkozy, qui est mise en examen à son tour pour « recel de subornation de témoin » et « participation à une association de malfaiteurs en vue de commettre l’infraction d’escroquerie au jugement en bande organisée ». Elle est placée sous contrôle judiciaire.

Sarkozy nie catégoriquement toute implication, parlant d’une affaire « absurde » et dénonçant une persécution judiciaire. Ziad Takieddine, figure clé de ce dossier tentaculaire, est décédé en septembre dernier, 48 heures avant l’annonce de la première condamnation de Nicolas Sarkozy dans l’affaire du financement libyen.

Affaire russe (Reso-Garantia) : enquête préliminaire
À l’été 2020, le Parquet national financier (PNF) a ouvert une enquête préliminaire visant Nicolas Sarkozy pour trafic d’influence. Cette procédure porte sur les rémunérations perçues par l’ancien président de la République de la part de Reso Garantia, une importante société d’assurances russe contrôlée par deux milliardaires d’origine arménienne, Sergueï et Nikolaï Sarkissov.

Selon les informations de Mediapart, Nicolas Sarkozy aurait signé en 2019 un contrat pluriannuel d’un montant total de 3 millions d’euros. Toujours d’après le site d’information, une première tranche de 500 000 euros lui aurait été versée début 2020 sur un compte ouvert à la banque Edmond de Rothschild.

L’enquête vise à déterminer si Nicolas Sarkozy est intervenu auprès d’autorités françaises ou étrangères au profit des frères Sarkissov, ce qui pourrait relever du trafic d’influence, ou s’il s’est borné à fournir des prestations de conseil, une activité parfaitement licite pour un ancien chef de l’État.

« La justice cherche à vérifier si l’ancien chef de l’État a seulement agi comme consultant (…) ou s’il se serait adonné à des activités de lobbying potentiellement délictuelles pour le compte des oligarques russes », écrivait Mediapart. Cette enquête préliminaire du PNF est toujours en cours, sans mise en examen à ce stade.

Coupe du monde au Qatar : enquête préliminaire
S’il n’est pas mis en examen à ce stade ici non plus, Nicolas Sarkozy se trouve au cœur de plusieurs enquêtes liées au Qatar, en particulier l’information judiciaire ouverte en 2019 pour corruption dans l’attribution de la Coupe du monde de football 2022.
Le volet parisien de ce « Qatargate » se concentre sur un déjeuner organisé à l’Élysée le 23 novembre 2010 par le président de la République d’alors, en présence de Michel Platini. Une semaine après cette rencontre, le patron de l’UEFA accordait son vote au Qatar, abandonnant la candidature des États-Unis qu’il avait jusque-là soutenue. Les magistrats du Parquet national financier cherchent à établir si un pacte de corruption a pu être scellé ce jour-là.
D’après les éléments réunis par les enquêteurs, Nicolas Sarkozy aurait négocié plusieurs contreparties avec l’émir Tamim Al-Thani en échange du ralliement de Michel Platini, au profit de deux de ses proches : les hommes d’affaires Arnaud Lagardère et Sébastien Bazin. Tous deux ont par la suite confié des missions rémunérées à l’ancien chef de l’État.
Selon France Football, Nicolas Sarkozy aurait plaidé lors de ce déjeuner pour une entrée du Qatar au capital du groupe Lagardère, une opération concrétisée un mois plus tard. À peine battu à la présidentielle de 2012, il était recruté comme avocat par le groupe pour deux missions, dont l’une directement liée à l’émirat, avant d’intégrer son conseil d’administration en 2020, où il a perçu 118 750 euros euros l’an dernier.
Les relations entre l’ancien président et Doha sont également scrutées dans un autre volet judiciaire, celui qui vaut à Arnaud Lagardère d’être mis en examen, aux côtés notamment de Ramzi Khiroun, son ancien directeur des relations extérieures, de Pierre Leroy, dirigeant historique du groupe, et de Nasser Al-Khelaïfi, président du Paris Saint-Germain.
Le patron de Lagardère est soupçonné d’avoir obtenu en 2018 le soutien de Qatar Holding LLC, filiale du fonds souverain Qatar Investment Authority et actionnaire majeur de son groupe, lors d’un vote décisif en assemblée générale. En contrepartie, les Qataris auraient obtenu la promesse de faire nommer un diplomate britannico-marocain proche de Doha au conseil de surveillance de Lagardère SCA.
Selon des documents judiciaires, Nicolas Sarkozy aurait œuvré en coulisses dans ces tractations, mettant à profit sa proximité avec les dirigeants du Qatar Investment Authority pour épauler Arnaud Lagardère, avant de devenir administrateur du groupe.