Opinion
Ni le nouveau plan économique de Pékin ni la trêve commerciale avec les États-Unis ne peuvent sauver l’économie chinoise
Le leader chinois Xi Jinping semble croire que le quinzième plan quinquennal et la détente dans la guerre commerciale sino-américaine permettront de relancer l’économie chinoise, mais cela n’arrivera pas.

Des conteneurs au port de Nankin, dans la province du Jiangsu, à l’est de la Chine, le 12 août 2025.
Photo: AFP via Getty Images
Le président Donald Trump a rencontré Xi le 30 octobre sur la base aérienne de Gimhae à Busan, en Corée du Sud. Il s’agissait de leur première rencontre en six ans et chacun a salué la réussite du sommet.
La réunion a débouché sur une trêve commerciale d’un an et plusieurs accords clés : les États-Unis s’engagent à alléger les droits de douane et, en échange, la Chine reprend ses importations de soja américain, retarde ses restrictions sur cinq métaux de terres rares et intensifie ses efforts de lutte contre le trafic de fentanyl. L’accord comprend aussi une réduction partielle des droits de douane américains sur les produits chinois, passant de 57 % à 47 %, Trump ayant qualifié la rencontre de « 12 » sur une échelle de zéro à dix.
Cependant, la réunion n’a duré qu’une heure quarante, suggérant que les discussions se limitaient à des points déjà négociés. Plus important, cet accord reste informel : rien n’a été signé, des négociations doivent se poursuivre. Trump n’a fait que suspendre son projet d’instaurer une surtaxe de 100 %, signifiant que chacun a évité l’escalade mais qu’aucune résolution ferme n’a été convenue.
Les médias chinois proclament que l’avenir s’éclaircit après le sommet et que la Chine demeure une destination attractive pour l’investissement. Xi a repris cet optimisme, affirmant : « Les faits ont prouvé que quiconque s’implante sur le marché chinois saisit une opportunité décisive dans la concurrence internationale de plus en plus âpre » et « Investir en Chine, c’est investir dans l’avenir. »
Il a lié cette confiance au prochain quinzième plan quinquennal (2026–2030), présenté comme une « fenêtre d’opportunité » pour une croissance soutenue et la coopération internationale élargie.
La grande stratégie de relance de Xi s’organise autour du concept de « développement de haute qualité », misant sur l’autonomie technologique, la réforme, l’élévation du niveau de vie et la sécurité nationale. Pourtant, la Chine poursuit ses ambitions dans les hautes technologies et la production à valeur ajoutée depuis plus de dix ans, sans obtenir les résultats souhaités.
Le quinzième plan reprend largement les ambitions précédentes, formulées sous des slogans tels que « autonomie technologique », « industrie avancée », « modernisation industrielle », « stimulation de la consommation intérieure », « transition verte » et l’initiative « AI‑Plus », le tout structurant un vaste ensemble d’objectifs de modernisation.
Les buts présentés dans le quinzième plan quinquennal ne diffèrent guère des politiques historiques et des ambitions de documents du Parti communiste datant de plus de vingt ans. Nombre de ces concepts — comme le développement technologique — remontent déjà aux années 1980.
La notion d’autonomie technologique fait remonter à 2005–2006, avec le Plan national de développement scientifique et technologique à moyen et long terme, qui introduit le terme « innovation autochtone ». Celui‑ci prolonge les slogans de « l’autonomie » de l’époque maoïste, passant dans les années récentes à « autosuffisance et amélioration autonome ». Les origines remontent même au Programme 863 de 1986, l’une des premières initiatives chinoises pour développer les industries technologiques.
Les politiques suivantes se sont inscrites dans cet héritage. « Made in China 2025 », lancé en 2015, visait l’amélioration du secteur manufacturier et l’ascension dans la chaîne de valeur globale. L’initiative des Industries émergentes stratégiques de 2010 ciblait déjà sept secteurs clés, dont les équipements haut de gamme et le numérique nouvelle génération. Le 14ᵉ plan quinquennal (2021–2025) renforçait ces priorités autour de la modernisation industrielle et de l’autonomie technologique.
La stratégie de « double circulation », introduite en 2020 puis intégrée au 14ᵉ plan, visait à renforcer la production et la consommation intérieures tout en réduisant la dépendance vis‑à‑vis de la demande étrangère. Le 11ᵉ plan (2006–2010) incluait une dimension « verte », centrée sur la réduction de rejet, non sur une mutation économique. La Chine tire profit de la fabrication et de l’exportation de biens « verts », mais une rupture totale avec le charbon et la lourde industrie mettrait en péril sa base manufacturière et sa stabilité globale.
Les objectifs de modernisation à long terme — comme le « développement modéré » d’ici 2035 — sont constamment reconduits dans chaque plan successif. Le quinzième plan reprend ces orientations existantes sans expliquer le moyen de les atteindre.
Xi semble croire qu’en levant les droits de douane américains et en redonnant aux États-Unis leur rôle de principal débouché, la Chine verra revenir investisseurs et usines, ouvrant la voie au quinzième plan. Mais les investisseurs restent prudents : l’expérience montre que si la Chine ne respecte pas l’accord — ce qui reste probable — Trump rétablira rapidement les droits, empêchant les entreprises chinoises d’exporter ou d’accéder aux technologies clés.
La confiance des investisseurs a aussi fondu sous l’effet du contrôle strict des capitaux et de l’emprise croissante de Xi sur les sociétés locales et étrangères. En cause : la hausse des coûts salariaux, la contraction de la jeunesse au travail et la concurrence grandissante des marques chinoises, rendant le marché chinois de plus en plus difficile pour les étrangers. L’exemple emblématique : le 3 novembre 2025, Starbucks a vendu sa filiale chinoise à Boyu Capital pour 4 milliards de dollars après avoir vu sa part de marché fondre de 34 % en 2019 à 14 % en 2024.
Les marques occidentales comme Nike ou Adidas rencontrent des difficultés similaires alors que les entreprises locales comme Anta et Li-Ning assoient leur domination. Le chiffre d’affaires de Nike en Chine est passé de 7,25 milliards en 2023 à 6,59 milliards en 2025, les ventes trimestrielles chutant de plus de 20 %. Ce déclin découle du phénomène « guochao » — la « vague nationale » — qui voit les jeunes consommateurs privilégier les marques locales, moins chères que les enseignes étrangères.
Dans le même temps, l’économie chinoise reste en crise. L’industrie s’essouffle, la demande extérieure demeure faible. L’immobilier, surendetté, est devenu une bombe à retardement, les observateurs anticipant la prochaine faillite majeure. La dette publique atteint près de 309 % du PIB et nombre de collectivités locales sont au bord de la cessation de paiement, incapables de financer les projets d’infrastructure ou de développement nécessaires au quinzième plan. La déflation, la faiblesse de la demande intérieure et le chômage des jeunes continuent de peser.
La focalisation de Pékin sur l’industrie, l’intelligence artificielle et la haute technologie — piliers du nouveau plan — risque d’aggraver la surcapacité dans des secteurs déjà confrontés à une demande médiocre. Au final, les deux moteurs proclamés de la reprise — le quinzième plan et l’accord commercial sino-américain — manquent de consistance. Le plan n’est qu’un ensemble d’objectifs vagues sans mesures concrètes, tandis que l’accord commercial reste encore à formaliser.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Antonio Graceffo, docteur en philosophie, a passé plus de 20 ans en Asie. Il est diplômé de l'Université des sports de Shanghai et titulaire d'un MBA chinois de l'Université Jiaotong de Shanghai. Il travaille aujourd'hui comme professeur d'économie et analyste économique de la Chine, écrivant pour divers médias internationaux.
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