Logo Epoch Times

Opinion

plus-icon

Martin Garagnon : « C’est la pression des parlementaires, et non celle des socialistes, qui pèse sur le gouvernement »

ENTRETIEN – Le gouvernement de Sébastien Lecornu n’a pas été censuré la semaine dernière. Mais de son côté, le Premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure a mis en garde le gouvernement mardi sur RTL. « Si la copie [du budget 2026] n’était pas corrigée […] nous aurions un jugement extrêmement sévère sur la copie finale » avant d’ajouter que « la censure est possible à tout moment. » Des propos pouvant laisser penser que le gouvernement est à la merci des socialistes.

top-article-image

Photo: Crédit photo : Martin Garagnon

author-image
Partager un article

Durée de lecture: 5 Min.

Martin Garagnon est conseiller national Renaissance et vice-président du groupe Renaissance des Hauts-de-Seine. Nous vivons l’époque la plus parlementaire de la Ve République, analyse-t-il.
Epoch Times – Le Premier ministre n’est-il pas en train d’exercer ses responsabilités sous la pression des socialistes ?
Martin Garagnon – Je ne crois pas. Je dirais plutôt sous la pression des parlementaires dans leur ensemble. Nous vivons l’époque la plus parlementaire de la Ve République. Une situation dont le Premier ministre a d’ailleurs pris acte dès son arrivée à Matignon.
Maintenant, c’est au tour des trois blocs de reconnaître qu’aucun d’entre eux ne dispose de la majorité absolue, d’agir en conséquence au lieu de chercher des boucs émissaires, que ce soit à l’Élysée ou parmi nos compatriotes.
Je considère que les appels incessants à la dissolution reviennent à dire aux Français qu’ils ont mal voté en juin 2024 et qu’ils doivent retourner aux urnes. Les Français se sont très clairement exprimés lors de ces élections législatives. La participation a été massive et historique. La composition actuelle de l’Assemblée est donc parfaitement légitime. C’est maintenant aux parlementaires de trouver un terrain d’entente.
On sait que LFI et le RN sont dans une posture de censure a priori. Le PS et LR doivent donc prendre leurs responsabilités et travailler avec le bloc central.
Le budget adopté ne sera ni celui souhaité par le PS, LR ou encore le bloc central, mais un budget de compromis. Alors ne perdons plus de temps et travaillons ensemble. Nous le devons aux Français.
La suspension de la réforme des retraites a calmé les ardeurs des socialistes, mais a irrité la droite, notamment les sénateurs LR. Il va donc aussi falloir ménager les Républicains ?
C’est à l’évidence un jeu d’équilibre difficile à tenir, surtout pour le Premier ministre. Mais encore une fois, aucun parti ne peut prétendre détenir la vérité du suffrage universel.
La situation ne permet à aucune formation politique d’imposer l’entièreté d’un programme.
Les députés, mais aussi les sénateurs doivent par conséquent se réunir autour d’une table et avancer ensemble.
L’annonce de la suspension de la réforme des retraites était une condition qui avait été posée par la gauche. À titre personnel, je la désapprouve sur le fond parce que c’est une réforme vitale pour les générations futures. Néanmoins, je reconnais qu’elle permet d’ouvrir le dialogue parlementaire et évite ainsi tout blocage immédiat.
Cette suspension ne risque-t-elle pas de déchirer Renaissance ?
Élisabeth Borne et Olivier Dussopt ont porté cette réforme dans un contexte difficile au début du quinquennat.
Pourtant, cela ne les a pas empêchés de reconnaître que sa suspension était nécessaire pour débloquer la situation à l’Assemblée nationale.  Cette réforme est vitale et une autre devra également être mise en œuvre dès 2027. Mais la position de l’ancienne Première ministre et de l’ancien ministre du Travail force quand même le respect.
Emmanuel Macron a réuni le 16 octobre des cadres et des députés Renaissance à l’Élysée. « Le Premier ministre a la liberté et la responsabilité de ses compromis », a-t-il expliqué aux invités. Peut-on dire qu’il va désormais exercer ses fonctions de chef de l’État autrement ?
 Oui, d’une certaine manière. Je constate que les oppositions ont formulé des critiques paradoxales à l’encontre d’Emmanuel Macron ces derniers temps. Ils l’enjoignent à s’exprimer davantage sur la situation politique tout en lui reprochant une forme d’« omniprésidence. »
Le président respecte les articles de la Constitution. Il préside le pays et laisse le gouvernement gouverner.
C’est donc au Premier ministre de mener ce type de discussions, de trouver des compromis et de les assumer devant l’Assemblée, qui est la seule instance devant laquelle il est responsable.
La relation de confiance qui existe entre Emmanuel Macron et Sébastien Lecornu va, à mon sens, faciliter ce travail.
En choisissant de renoncer à l’utilisation de l’article 49-3, Sébastien Lecornu ne s’est-il pas privé d’un moyen efficace pour faire adopter un budget ?
L’article 49.3 est avant tout utilisé lorsqu’on dispose d’une majorité à l’Assemblée. Or, il n’y a pas de majorité. Ce renoncement à l’utilisation de cet article est une manière de remettre la balle au centre de l’Assemblée et de faire en sorte que les parlementaires prennent leurs responsabilités.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.