L’illusion de la résilience : la reprise chinoise masque une fragilité systémique
Le récit officiel de la reprise économique de la Chine en 2025 tient d’une mise en scène soignée. Pékin met en avant une croissance du PIB de 5 % au premier semestre, et des indicateurs de surface laissent croire à un rebond après la stagnation de l’ère pandémique.
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Un écran affiche des chiffres du produit intérieur brut (PIB) à Shanghai, le 15 juillet 2025.
Mais derrière ce vernis décoratif se cache une structure économique friable — dépendance à la dette, déflation chronique et opacité organisée. Pour les marchés et les décideurs, le risque ne tient pas seulement à cette fragilité : il réside dans la lecture obstinément erronée d’une Chine perçue comme partenaire stable et prévisible.
En juillet, la production industrielle a progressé de 6,1 % sur un an et les exportations ont surpris avec une hausse de 7,2 %. Pourtant, ces chiffres sont soigneusement « curatés ». La croissance des ventes au détail s’est tassée à 3,7 %. L’indice des prix à la consommation (IPC) est resté à 0,0 %.
Les prix à la production reculent désormais depuis 32 mois consécutifs, faisant de la Chine un exportateur persistant de déflation. Goldman Sachs anticipe un IPC à 0,8 % sur l’ensemble de l’année. Parallèlement, les prix de gros poursuivent leur glissade : l’indice des prix à la production pour les produits industriels recule de 3,3 % sur un an, selon le Bureau national des statistiques de Chine.
Une déflation pilotée
Cette « déflation à la Xi » n’est pas une singularité macroéconomique : elle traduit un pessimisme enraciné. Les ménages diffèrent leurs achats dans l’espoir de baisses de prix, tandis que les entreprises réduisent l’investissement, incapables d’élargir leurs marges dans un contexte de demande atone. La croissance provient moins d’une production productive que de transferts et subventions pilotés par la politique. L’innovation, l’efficacité manufacturière et la compétitivité à l’export s’effacent derrière l’ingérence du régime communiste chinois.
Des navetteurs passent devant de nouvelles tours de bureaux en construction à l’heure de pointe dans le quartier d’affaires de Pékin, le 18 octobre 2024. (Kevin Frayer/Getty Images)
La réponse de Pékin a été de redoubler d’interventions budgétaires. Les subventions au « reprise contre reprise » d’appareils et de véhicules ont dopé temporairement la consommation, mais leur demi‑vie économique est modeste, se comptant en mois. Une fois le stimulus dissipé, la demande reflue. Pire : le fardeau du financement retombe toujours plus sur des collectivités locales déjà exsangues, minées par l’effondrement des ventes de terrains et des recettes fiscales léthargiques.
La dette comme perfusion
Les risques structurels inhérents à ce modèle sont flagrants. Les autorités locales se tournent vers l’émission de dette à une échelle qui alarme même les créanciers officiels. Fitch Ratings avertit que plus de 8000 milliards de yuans de dettes des véhicules de financement des gouvernements locaux (LGFV) sont vulnérables aux chocs de financement.
Yuekai Securities et d’autres analystes estiment que l’endettement total des collectivités a dépassé 51.000 milliards de yuans, une large part étant dirigée vers des projets non productifs ou politiquement orientés. L’encours a à peu près doublé depuis 2020, sous l’effet de financements hors budget et de dépenses liées aux plans de relance. Ce n’est pas du stimulus : c’est une perfusion de liquidité qui maintient en vie des entités sous‑performantes et diffère les restructurations nécessaires.
Ces dynamiques génèrent des risques de second ordre. À mesure que les gouvernements locaux réallouent des ressources au service de la dette, leur capacité à financer la santé, la protection sociale et de véritables infrastructures se réduit. Pour les investisseurs étrangers et les multinationales, l’implication est claire : les partenaires locaux sont sans doute bien plus endettés — et bien moins résilients — que ne le suggèrent les comptes publics. Les profils de risque souverain se dégradent, la stabilité contractuelle s’érode et les revirements réglementaires deviennent plus probables.
L’opacité érigée en politique
L’opacité entourant les données économiques chinoises aggrave ces risques. Une enquête du Wall Street Journal a documenté la suppression de centaines de séries statistiques — des ventes de terrains aux flux d’investissement étranger, jusqu’à la production de sauce soja. Rhodium Group estime que le PIB pourrait être surévalué d’au moins 10 %, soit 1,7 billion de dollars.
La difficulté d’obtenir des informations fiables tient à la censure des données doublée d’une répression politique : des économistes et analystes critiques à l’égard des politiques de Xi Jinping ont disparu ou ont été réduits au silence au titre de « secrets de travail » dans la version révisée de la loi sur les secrets d’État.
Pour un système financier mondial qui s’appuie sur la transparence pour évaluer le risque‑prix, le blackout sélectif de la Chine constitue un danger systémique. Lorsque la décision publique repose sur des données compromises, les allocations inefficaces s’intensifient. Des investisseurs habitués à trianguler entre publications officielles, enquêtes indépendantes et signaux de terrain se retrouvent face à une incertitude accrue pour identifier des entrées fiables.
Ondes de choc mondiales
Ce choix de gouvernance interne produit des conséquences internationales. L’inondation d’exportations à bas coûts comprime les prix à l’échelle mondiale, mettant sous pression les industriels ailleurs qui peinent à préserver leurs marges. Souvent adossées à l’État, des entreprises vendent à perte, rendant la concurrence intenable pour des acteurs d’économies de marché. Parallèlement, des collectivités locales chinoises, étranglées par la dette, assouplissent l’application de certaines règles pour attirer des capitaux étrangers : un ajustement qui rapporte vite, mais au prix d’atteintes durables à la stabilité et à la confiance.
Recalibrage stratégique
Les implications exigent de revoir la manière d’interagir avec Pékin. Les investisseurs étrangers ne peuvent plus traiter la Chine comme un placement à rendement élevé, étanche au calcul politique. L’exposition doit être recalibrée, en pondérant fortement le risque politique, la volatilité des subventions et la probabilité bien réelle de contraintes soudaines de liquidité chez les partenaires.
Les décideurs des pays commerçants doivent rechercher des vérifications indépendantes des statistiques chinoises peu fiables avant d’ajuster taux d’intérêt, politique commerciale ou mécanismes de filtrage des investissements. Les multinationales sont tenues d’incorporer une résilience opérationnelle à leur stratégie Chine, en planifiant des revirements de politique abrupts et en intégrant un risque d’instabilité régionale en cas de détresse budgétaire locale.
Le vrai bulletin
La présentation d’une économie chinoise résiliente masque une fragilité de nature structurelle, non conjoncturelle. Le triptyque — statistiques « ingéniérées », allocation de crédit dictée par le politique et épuisement budgétaire rampant — n’a rien de durable ni d’inoffensif. Prendre le récit officiel pour argent comptant crée du risque financier et peut nourrir des erreurs d’alignement stratégique.
Le Parti communiste chinois peut paraître stable en surface, à la faveur de chiffres soigneusement gérés et d’un contrôle serré du récit. Mais lorsque cette stabilité repose sur une dette dissimulée et des pratiques financières opaques, elle est fragile en son cœur. Aux dirigeants du monde entier, la leçon est simple : ne prenez pas pour argent comptant l’histoire officielle de la Chine. Ce n’est pas une photographie neutre de l’économie ; c’est un récit stratégique, du maquillage posé sur une réalité rétive.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
Charles Davis est un vétéran de l'armée et un conférencier spécialisé dans le renseignement. Ses récompenses militaires sont : deux médailles de service Bronze Star, la médaille du service méritoire de la défense, deux médailles du service méritoire, la médaille du service de l'OTAN, la médaille de la campagne d'Irak, la médaille de la campagne d'Afghanistan, la médaille de la libération de l'Arabie saoudite et la médaille de la libération du Koweït.