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Lagardère et CNews attaquent à leur tour les présidentes de France Télévisions et Radio France

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Arnaud Lagardère, PDG du groupe Lagardère.

Photo: JULIEN DE ROSA/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 5 Min.

Le conflit s’intensifie entre l’audiovisuel public français et Cnews. Delphine Ernotte Cunci, présidente de France Télévisions, a franchi un cap jeudi en qualifiant CNews de « chaîne d’extrême droite » dans une interview au Monde, provoquant une riposte immédiate des groupes visés.
Cette escalade verbale intervient dans le contexte de l’affaire Legrand-Cohen, qui concerne deux journalistes de l’audiovisuel public accusés de connivence avec les socialistes après la diffusion, début septembre, d’images prises à leur insu en juillet lors d’un rendez-vous dans un restaurant parisien.

Une lettre commune à l’Arcom

Les groupes publics France Télévisions et Radio France ont dénoncé une « campagne de dénigrement » des médias dans le giron du milliardaire Vincent Bolloré, dont CNews et Europe 1, dans une lettre commune à l’Arcom consultée mercredi par l’AFP.
« Certains des propos dénigrants relevés sur les antennes » de CNews et Europe 1 « ont occupé ces derniers jours un temps d’antenne très significatif », écrivent les dirigeantes des deux médias publics au régulateur de l’audiovisuel. Pour mesdames Ernotte Cunci et Veil, « le caractère outrancier et déséquilibré de cette campagne dépasse désormais le simple débat d’opinions », ce qui contribue « à fragiliser la qualité du débat démocratique ».

La riposte d’Arnaud Lagardère

Face à ces accusations, Arnaud Lagardère, gérant de Lagardère Radio qui détient Europe 1, a répliqué jeudi soir par un communiqué ferme. Il a dénoncé « les attaques excessives » des deux patronnes de l’audiovisuel public, estimant que ces propos « traduisent une fébrilité surprenante de la part de ces responsables de services publics et constituent une manœuvre grossière de victimisation quand l’heure devrait être aux explications après l’affaire Cohen Legrand ».
Le dirigeant a particulièrement mis en cause le fait que « ces propos mettent en cause le travail et l’honorabilité de tous les journalistes et collaborateurs d’Europe 1, ce que je ne peux tolérer ». Il a rappelé « les obligations légales de pluralisme » auxquelles est soumise sa radio, soulignant ainsi le cadre réglementaire dans lequel évolue le média.

CNews contre-attaque

La chaîne d’information a estimé que Delphine Ernotte tentait de détourner l’attention d’une affaire gênante pour l’audiovisuel public, accusant cette dernière de vouloir « masquer les questions légitimes » sur l’impartialité du service public.
« Delphine Ernotte Cunci a choisi d’allumer de façon scandaleuse des contre-feux », a ajouté la chaîne dans son communiqué, pointant « des attaques qui ne font qu’illustrer la gêne que suscite chez ses concurrents le succès de CNews », rappelant sa position de leader habituelle des chaînes info en part d’audience.
L’escalade verbale a pris une dimension particulière avec les déclarations de Pascal Praud, vedette de CNews, qui a estimé que qualifier sa chaîne d' »extrême droite » « met une cible » sur les journalistes.

L’origine de la polémique

Tout est parti d’une vidéo diffusée début septembre par le média conservateur L’Incorrect, montrant Thomas Legrand (France Inter) et Patrick Cohen (France Inter) en discussion avec des dirigeants du Parti socialiste dans un restaurant parisien. Cette révélation a suscité une vive polémique politico-médiatique sur l’indépendance journalistique.
Depuis le déclenchement de cette affaire, les médias de la galaxie Bolloré – CNews, Europe 1 et le Journal du dimanche – ont largement commenté ces images, y voyant un signe de parti pris politique du service public audiovisuel.

Un conflit structurel

Cette polémique révèle des tensions profondes entre deux conceptions du journalisme et de l’information. D’un côté, l’audiovisuel public revendique son indépendance et dénonce ce qu’il considère comme une campagne orchestrée. De l’autre, les médias privés mettent en avant leur rôle de contre-pouvoir et leur liberté éditoriale.
L’Arcom a d’ailleurs convoqué Sibyle Veil et Delphine Ernotte pour recueillir leurs explications en matière d’indépendance de l’audiovisuel, témoignant de la gravité que revêt cette affaire pour le régulateur.

Des enjeux démocratiques

Au-delà des personnalités impliquées, cette confrontation soulève des questions fondamentales sur le rôle des médias dans le débat démocratique français. La multiplication des échanges de communiqués et des déclarations publiques témoigne d’une polarisation croissante du paysage médiatique.
Les accusations mutuelles de partialité et les remises en cause de l’honorabilité professionnelle illustrent la difficulté à maintenir un débat apaisé dans un contexte de forte concurrence entre médias publics et privés.
Cette guerre des communiqués s’inscrit dans un contexte plus large de remise en question des équilibres traditionnels de l’audiovisuel français, où la ligne de partage entre information et opinion devient de plus en plus ténue, alimentant les interrogations sur l’indépendance et la pluralité du secteur médiatique.