« J’en ai rien à péter de la rentabilité des agriculteurs » : les propos choc de Sandrine Rousseau

La députée Les Écologistes Sandrine Rousseau.
Photo: Crédit photo EMMANUEL DUNAND/AFP via Getty Images
Dans une interview accordée à Média TV vendredi dernier, la députée écologiste Sandrine Rousseau a qualifié de « scandaleux » l’adoption de la controversée loi Duplomb, récemment adoptée par le Parlement.
Adoptée le 8 juillet dernier au Parlement, la loi Duplomb-Menonville prévoit notamment la réintroduction à titre dérogatoire et sous conditions de l’acétamipride, un pesticide. Interrogée sur cette loi agricole, Sandrine Rousseau a suscité une vive polémique, ce vendredi 11 juillet dans l’émission La Contre-Matinale. Fermement opposée à cette loi, elle a ouvertement signifié qu’elle se désintéressait totalement de la rentabilité des agriculteurs.
« Ce n’est pas de la rentabilité en fait, c’est de l’argent sale »
Si la loi Duplomb assouplit en partie les restrictions jusque-là imposées aux agriculteurs, elle est loin de faire l’unanimité. Farouchement opposée à ce texte, Sandrine Rousseau a dénoncé, ce 11 juillet, un compromis dangereux où, selon elle, la défense de la compétitivité agricole se fait au détriment de la santé publique et de l’environnement.
Interrogée sur l’argument avancé par les agriculteurs concernant la nécessité de cette loi pour améliorer leur rentabilité, l’élue de gauche a vivement réagi : « J’en n’ai rien à péter de leur rentabilité. Et puis je pense que ce n’est pas le sujet. » « La rentabilité de l’agriculture par des produits chimiques au détriment des sols, de la biodiversité, de notre santé, ce n’est pas de la rentabilité en fait, c’est de l’argent sale », s’est-elle agacée. Elle a qualifié l’acétamipride de « chlordécone d’aujourd’hui », alertant sur le fait que ce pesticide « va rester dans la terre, polluer les sols et les cours d’eau pendant des décennies ».
L’une des mesures les plus décriées de la loi Duplomb est la réintroduction encadrée et à titre dérogatoire de l’acétamipride, qui est un insecticide de la famille des néonicotinoïdes, interdit depuis 2018 mais autorisé en Europe jusqu’en 2033.
Un « hold-up du pouvoir »
Qualifiant cette décision de « retour en arrière », la députée écologiste a également dénoncé l’influence de la FNSEA. Ayant notamment été choquée par la mobilisation de tracteurs devant l’Assemblée nationale, elle a estimé qu’il s’agissait d’un rapport de force « bien viril ». Pour elle, ces actions « dignes d’un lobbyisme agressif » sont le signe d’une « bascule démocratique ». Elle a particulièrement ciblé Arnaud Rousseau, le président de la FNSEA, le décrivant comme un « chef d’entreprise de l’agro-business au chiffre d’affaires colossal ».
Sandrine Rousseau a purement et simplement appelé à l’arrêt complet des pesticides et à une refonte en profondeur du modèle agricole. « On continue de faire comme si on pouvait produire toujours plus, toujours moins cher, et on en meurt », a-t-elle martelé, ne cachant pas sa colère.
La députée a également critiqué la loi Clément Beaune – dite loi Gremier – qui prévoit la construction de 14 nouveaux réacteurs nucléaires dans le cadre du plan de transition écologique. Dénonçant une « dissociation » entre les décisions politiques et les attentes de la population, elle a qualifié cette orientation de véritable « hold-up du pouvoir ».
La réponse de la Coordination Rurale
Les propos de l’élue écologiste ont provoqué des remous sur X, alors que le monde agricole est confronté à d’énormes difficultés économiques. Selon les chiffres de l’Insee, en trente ans, le revenu moyen des agriculteurs a chuté de 40 %. De plus, 18 % d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté.
La Coordination Rurale a notamment apporté une réponse à Sandrine Rousseau, ce 16 juillet, expliquant que si demain les agriculteurs n’ont plus de moyens de production, il restera « une agriculture de proximité, réservée à une élite, une alimentation « pour les gueux », importée, de basse qualité, surtraitée, et source de problèmes de santé ». « Nous discutons avec tous les politiques, peu importe leur bord. Mais l’écologie n’est pas une politique, c’est une responsabilité collective », a encore déclaré le syndicat agricole.
Plusieurs internautes ont souligné le drame des suicides chez les agriculteurs, très élevé, regrettant que Sandrine Rousseau n’en ait « rien à péter » de leurs conditions de vies.
Des députés de gauche saisissent le Conseil constitutionnel
Ce 11 juillet, les députés de gauche ont saisi le Conseil constitutionnel contre cette loi agricole Duplomb. Bien que le texte prévoie une réintroduction sans délai de ce pesticide, avec toutefois une clause de réexamen par un conseil de surveillance, trois ans après, puis annuelle, les élus de gauche considèrent que cette mesure est incompatible avec la préservation de l’environnement et le droit à la santé.
Ces députés LFI, écologistes et communistes visent aussi l’article qui prévoit notamment une présomption d’« intérêt général majeur » pour certains ouvrages de stockage d’eau, dans l’intention de faciliter les constructions. Les requérants jugent que cette présomption « dispense les autorités d’examiner les risques environnementaux ».
Enfin, ils estiment qu’il n’existe aucune « caractérisation juridique de ce que pourrait constituer une menace grave compromettant la production agricole », censée fonder la dérogation pour utiliser l’acétamipride.

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