Intolérance à la tyramine : une cause cachée de migraines et de fluctuations de la pression artérielle

Photo: Johana Mlichova/Shutterstock
À 45 ans, Zoe pensait bien connaître son corps, jusqu’à ce qu’elle soit prise au dépourvu par des épisodes soudains de palpitations et une anxiété accablante, qu’elle a d’abord attribués au stress lié au travail. Elle n’avait mangé qu’une part de pizza au pepperoni et une banane mûre plus tôt dans la journée.
Cependant, lorsqu’un mal de tête lancinant l’a frappée quelques heures seulement après son réconfortant dîner habituel de pâtes au fromage et un verre de vin rouge, elle a commencé à soupçonner un lien avec l’alimentation, d’autant plus que les symptômes sont revenus après qu’elle a répété le même repas le lendemain soir.
Zoe est partie à la recherche de réponses dans le monde de la nutrition. Elle a découvert qu’elle réagissait à des niveaux élevés de tyramine, un composé naturel présent dans les fromages affinés comme le parmesan, les charcuteries et le vin rouge. Le composé s’était accumulé dans son système et avait déclenché ces réactions déstabilisantes.

La sensibilité à la tyramine survient lorsque le corps ne parvient pas à décomposer correctement la tyramine, faute de niveaux suffisants de l’enzyme monoamine oxydase-A (MAO-A). Cette carence enzymatique peut déclencher des symptômes comme des pics de pression artérielle, des palpitations cardiaques, des nausées, des migraines et de l’anxiété. Des niveaux faibles de MAO-A peuvent être d’origine génétique ou liés à des médicaments. Les migraines chroniques sont également fréquentes. Les symptômes apparaissent généralement 1 à 12 heures après avoir consommé des aliments riches en tyramine.
Pour déterminer si la sensibilité à la tyramine est à l’origine d’un inconfort, il faut commencer par suivre ses symptômes et son régime alimentaire. Ce composé peut s’accumuler si on consomme, sans le savoir, des aliments riches en tyramine. La recherche montre que la prise de conscience est un atout majeur en matière de sensibilités et d’intolérances alimentaires.
Le système de défense du corps contre la tyramine
L’enzyme MAO-A décompose les neurotransmetteurs ou substances chimiques cérébrales comme la sérotonine, la dopamine et la norépinéphrine, ainsi que des composés alimentaires appelés amines, comme la tyramine. Tous les neurotransmetteurs nécessitent un équilibre, car leur accumulation peut entraîner des maladies neurologiques. Le gène MAO-A régit la vitesse d’activité de l’enzyme MAO-A. Les variations génétiques affectent la dégradation de la tyramine, ce qui est corrélé à une sensibilité plus élevée à la tyramine, ainsi qu’à des réponses aux antidépresseurs moins efficaces chez certaines personnes.
Le stress chronique aggrave ce problème en augmentant les niveaux de norépinéphrine, ce qui peut submerger une activité MAO-A déjà réduite et intensifier des symptômes comme l’hypertension et les sautes d’humeur. Les symptômes apparaissent souvent des heures après la consommation d’aliments riches en tyramine, ce qui complique le diagnostic.
La sensibilité à la tyramine peut entraîner les conditions suivantes :
1. Migraines
Les poussées de norépinéphrine induites par la tyramine contractent les vaisseaux sanguins, activant les voies de la douleur. Cet effet est retardé, frappant souvent des heures après avoir mangé, ce qui complique le diagnostic.
2. Anxiété et changements d’humeur
L’excès de norépinéphrine perturbe la régulation émotionnelle. Dans une étude, des variants génétiques ont été liés à la gravité de l’anxiété de base chez des patients psychiatriques, soulignant le rôle de la MAO-A dans la santé mentale.
3. Crises hypertensives
Pour les personnes sous inhibiteurs de la MAO (une forme de médicament antidépresseur qui empêche la dégradation de certains neurotransmetteurs), les aliments riches en tyramine peuvent provoquer des pics de tension artérielle dangereux. Ce phénomène a été noté pour la première fois sous le nom de « réaction au fromage » dans les années 1960. Même de petites quantités de fromage (6 à 10 mg) peuvent déclencher des symptômes chez les personnes sensibles. À noter que le fromage cheddar contient environ 42 mg par portion de 28 g.

Comment détecter la sensibilité à la tyramine
Un journal alimentaire et d’humeur aide à identifier les aliments qui provoquent des symptômes et la quantité que l’on peut tolérer avant de réagir (l’« effet de seau »). Voici comment procéder :
• Noter tout ce qui est mangé et bu, y compris l’heure et la quantité.
• Indiquer l’humeur et tous les symptômes ressentis (comme des maux de tête, des nausées, de la transpiration, un rythme cardiaque rapide ou de l’anxiété). Les réactions aux composés alimentaires sont souvent retardées de plusieurs heures.
• Suivre le niveau de stress, le sommeil et tout autre facteur susceptible d’affecter les symptômes.
• Passer en revue son journal après une semaine ou deux pour repérer des schémas. Par exemple, si on a mal à la tête après avoir mangé du poulet réchauffé, on saura l’éviter la prochaine fois.
Comment gérer la sensibilité à la tyramine
Gérer la sensibilité à la tyramine peut sembler accablant au début, mais en le décomposant en étapes simples – et en suivant ses progrès avec un journal alimentaire et d’humeur – cela peut devenir plus facile. Maintenant, on peut commencer à appliquer cette prise de conscience à de nouveaux choix alimentaires pour créer des habitudes qui aideront à se sentir mieux.
1. Choisir des aliments frais
Opter pour des viandes, poissons, fruits et légumes frais plutôt que des aliments affinés, fermentés ou transformés. Par exemple, manger de la mozzarella ou de la ricotta au lieu du cheddar affiné, et choisir de la dinde fraîche au lieu du salami.
Éviter les aliments trop mûrs, les restes de plus de 24 à 48 heures, ou tout ce qui a dépassé sa date de péremption, car la teneur en tyramine augmente à mesure que les aliments vieillissent ou se gâtent.
Conserver les aliments en toute sécurité : congeler les restes juste après qu’ils aient refroidi, et manger les aliments cuits dans les 48 heures.

2. Gérer le stress et maintenir une routine
Le stress peut aggraver les réactions à la tyramine. Essayer des activités de pleine conscience simples comme la respiration profonde, la méditation ou le yoga doux. Maintenir des heures de sommeil et de repas régulières pour aider le corps à mieux gérer le stress.
3. Trouver ses limites personnelles
Le « seau » de tyramine de chacun est différent. Si on remarque des symptômes après certains aliments, essayer d’en manger moins ou de les éviter pendant quelques jours pour laisser le corps « vider le seau ». Si on n’est pas sûr, apporter son journal au nutritionniste – il pourra apporter son aide à l’identification des déclencheurs et des aliments sans danger. Des tests génétiques peuvent aider à minimiser les essais et erreurs lors des changements de régime alimentaire, mais commencer d’abord par les bases.
Sheridan Genrich, BHSc., est une nutritionniste clinique et naturopathe dont la pratique de consultation depuis 2009 s'est spécialisée dans l'aide aux personnes aux prises avec des troubles digestifs, des dépendances, des troubles du sommeil et de l'humeur. Au cours de ses études universitaires en médecine complémentaire, Sheridan a développé une passion pour la compréhension des neurosciences comportementales et des déséquilibres intestin-cerveau. Depuis lors, elle a obtenu de nombreuses certifications postuniversitaires en nutrigénomique, en théorie polyvagale des traumatismes et en d'autres approches de guérison nutritionnelle utilisant les principes de la « nourriture d'abord ». En tant que personne très sensible qui a appris à s'épanouir à nouveau après des années d'adversité extraordinaire, Sheridan croit que les gens peuvent libérer leur potentiel inné et guérir avec les bons outils et le bon soutien. Elle se tient activement au courant des recherches fondées sur des preuves tout en intégrant des approches ancestrales personnalisées et alignées sur les rythmes de la nature.
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