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Des drones repérés près d’une base aérienne pourraient relever d’une opération d’espionnage, estime le ministre belge de la Défense
Le ministre a écarté la possibilité que l’incident puisse être l’œuvre d’amateurs, révélant un niveau de sophistication dans l’opération.

Le ministre de la Défense et du Commerce extérieur Theo Francken lors de l’arrivée du navire belge M940 Oostende, lundi 3 novembre 2025, à la base navale de Zeebruges.
Photo: KURT DESPLENTER/BELGA MAG/AFP via Getty Images
Des drones observés à proximité d’une base militaire abritant des armes nucléaires américaines pourraient faire partie d’une opération d’espionnage, a déclaré le 3 novembre le ministre de la Défense belge, Theo Francken.
M. Francken a confirmé lors d’un entretien à la radio La Première que des drones avaient survolé la base militaire de Kleine-Brogel durant trois jours, à partir du 31 octobre.
Il a précisé que la première journée impliquait « de petits drones pour tester les fréquences radio », tandis que « samedi et dimanche [il s’agissait de] grands drones pour l’observation et la déstabilisation ». Le ministre a ajouté qu’il pensait que les opérateurs cherchaient à « créer la panique en Belgique ».
« Cela ressemble à une opération d’espionnage. Par qui, je l’ignore. J’ai quelques idées, mais je vais rester prudent », a-t-il déclaré au service public, selon la traduction de ses propos.
La Russie a été tenue responsable d’incursions dans l’espace aérien européen ces derniers mois, notamment en Pologne et en Estonie, bien que Moscou ait nié les accusations de violations répétées proférées par l’OTAN.
M. Francken n’a pas souhaité désigner immédiatement des responsables pour ces incidents, déclarant : « L’enquête est en cours pour l’instant ; je préfère rester très prudent. »
Opération trop complexe pour des amateurs
Le ministre a également exclu la possibilité que l’incident soit le fait d’amateurs ou d’une plaisanterie, révélant que l’opération montrait un certain degré de sophistication.
Il a expliqué à La Première que du matériel de brouillage avait été utilisé afin de tenter de perturber les signaux radio des drones, mais sans succès.
« Le brouilleur n’a pas fonctionné parce qu’ils ont testé notre fréquence radio et l’ont changée. Ils possèdent leurs propres fréquences. Un amateur n’aurait jamais su faire cela », a détaillé M. Francken.
Des observations de drones au-dessus de l’aéroport de Berlin‑Brandebourg, en Allemagne, ont également entraîné la suspension des vols pendant environ deux heures dans la nuit du 31 octobre. L’aéroport de Munich a été contraint de fermer début octobre pour les mêmes raisons.
Interrogé sur l’impossibilité d’abattre les drones, M. Francken a répondu : « Quand ils sont au-dessus d’une base militaire, nous pouvons les abattre. Quand ils sont juste à côté, nous devons être très prudents car s’ils tombent sur une maison, une voiture ou une personne, c’est une autre histoire. »
Il a ajouté qu’il existait des obstacles juridiques. « Ce n’est pas totalement clair. Il faut clarifier la base légale », a précisé le ministre de la Défense.
Quatre ans de retard
M. Francken a également évoqué l’état des stratégies de défense de la Belgique, affirmant que ses capacités de lutte contre les drones accusent quatre ans de retard.
« Nous courons après la menace », a‑t‑il confié à La Première.
« Nous aurions dû acheter des systèmes anti-aériens [pour neutraliser les drones] il y a cinq ou dix ans. L’OTAN le dit depuis des années. Je suis ministre de la Défense depuis neuf mois… Nous avons quatre ans de retard. J’essaie d’accomplir le plus possible depuis neuf mois. »

Le député britannique Tom Tugendhat s’adresse à ses invités à côté d’un drone d’attaque iranien Shahed‑136 abattu, utilisé par la Russie en Ukraine, au Parlement britannique, le 14 octobre 2025. (Leon Neal/Getty Images)
Le mois dernier, la Commission européenne a estimé que l’Europe devait se préparer à faire face à de nouvelles formes de guerre, y compris le sabotage de câbles sous-marins, les cyberattaques et les incursions de drones, des menaces que sa présidente Ursula von der Leyen a qualifiées de « guerre hybride ».
L’OTAN décrit la guerre hybride comme un mélange de moyens conventionnels et non conventionnels, comprenant la subversion ou la déstabilisation de l’adversaire et des attaques menées de façon à rendre difficile l’identification des responsables.
La guerre hybride survient souvent dans la zone grise, en‑deçà du seuil de guerre conventionnelle, et peut inclure des cyberattaques, des agressions contre des infrastructures critiques et de l’espionnage.
« Nous devons non seulement réagir ; nous devons dissuader, car si nous hésitons à agir, la zone grise ne fera que s’étendre », a prévenu Mme von der Leyen.
L’autonomie européenne
Le 16 octobre, Mme von der Leyen a dévoilé de nouvelles propositions pour quatre projets phares en matière de défense, incluant la construction d’un « mur de drones » et le renforcement de la frontière orientale de l’Europe, dans le cadre des mesures à adopter d’ici 2030.
Des experts en défense ont souligné que la réaction rapide de l’Union européenne pourrait redéfinir la défense de l’espace aérien du continent et renforcer son rôle au sein de l’OTAN.
Bartosz Grodecki et Maciej Romanow, spécialistes du think tank polonais Sobieski Institute, ont récemment déclaré à Epoch Times que les plans de Bruxelles montrent « que l’Europe ne se repose plus passivement sur les États-Unis, mais investit activement dans sa propre défense ».
« Cela renforce la crédibilité de l’Europe à Washington et démontre un réel engagement en faveur du partage des charges », ont‑ils affirmé.
Ce changement « transforme le statut de l’Europe, d’importatrice de sécurité à fournisseur », ont‑ils estimé.
« Pour les États-Unis, cela signifie un partenariat plus équilibré dans lequel les alliés européens assument une partie du fardeau financier et technologique. »

Victoria Friedman est une journaliste basée au Royaume-Uni qui couvre un large éventail de sujets nationaux.
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