Budget
Budget : Athènes reverse plus d’un milliard d’euros à Paris, un bol d’air imprévu
Quinze ans après avoir frôlé la faillite et reçu l'aide massive de ses partenaires européens, la Grèce reverse aujourd'hui plus d'un milliard d'euros à la France par anticipation. Ce geste financier survient à un moment critique pour Paris, dont les comptes publics inquiètent de plus en plus. Retour sur un retournement de situation aussi ironique que symbolique pour l'avenir de la zone euro.

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Photo: SAKIS MITROLIDIS/AFP via Getty Images
En pleine séquence budgétaire et alors que le gouvernement tente d’éviter une nouvelle dérive des comptes publics, députés et sénateurs français ont découvert une information inattendue dans les documents budgétaires : la Grèce a remboursé par anticipation 1,1 milliard d’euros à la France en 2025, après déjà 1,7 milliard versés en 2024. Un total de 2,8 milliards d’euros effacés en deux ans, bien avant l’échéancier initial (2033-2041), selon 20 Minutes. Un renversement spectaculaire pour un pays longtemps considéré comme le « cancre » financier de l’Europe.
Un remboursement anticipé qui allège les comptes français
La nouvelle tombe au moment où la France cherche désespérément à tenir la trajectoire budgétaire fixée pour 2026. Le déficit public pourrait atteindre près de 5 % du PIB l’an prochain, une estimation déjà jugée optimiste par la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, d’après Le Point. C’est dans ce contexte tendu que les parlementaires apprennent que la Grèce a retourné 1,1 milliard d’euros à Paris en 2025, après une première avance de 1,7 milliard en 2024.
Pour Jean-François Husson, rapporteur général du budget au Sénat, la situation prend une dimension symbolique : « Nous pouvons donc remercier nos amis grecs de nous aider à résorber notre déficit. » Son homologue à l’Assemblée nationale, Philippe Juvin, a interpellé la ministre non sans ironie : « Pensez-vous que l’on peut tirer des leçons de l’exemple grec ? »
Les remboursements anticipés proviennent des prêts accordés par la France en 2010 pour sauver Athènes de la faillite. Un premier effort qui avait coûté 11,4 milliards d’euros à Paris, complété ensuite par les mécanismes européens.
De la crise à la crédibilité : le spectaculaire redressement grec
Les avances de remboursement témoignent du retour en force de la Grèce sur la scène financière. Une cure d’austérité draconienne et des réformes structurelles mises en place depuis plus de quinze ans lui ont permis d’assainir ses comptes et de recouvrer la confiance des marchés. Athènes a même remboursé le FMI plus tôt que prévu.
Le Figaro rappelle que la Grèce devance désormais la France sur plusieurs maturités d’emprunt : depuis l’été 2025, « la Grèce est considérée comme un emprunteur plus sûr que la France ». En décembre 2023 déjà, elle avait réglé toutes les échéances prévues pour 2024 et 2025, avant d’anticiper celles de 2026 à 2028.
Ce retournement de situation marque un contraste frappant avec la situation française. La dette publique de l’Hexagone atteignait 3416,3 milliards d’euros fin juin 2025, soit 115,6 % du PIB.
Une trajectoire difficilement reproductible ?
Si le geste d’Athènes redonne temporairement de l’air aux finances françaises, Bercy se montre prudent. Amélie de Montchalin a souligné lors de son audition au Parlement que la comparaison avait ses limites : « Certes, la Grèce rembourse de manière anticipée ses créances vis-à-vis des autres pays européens, mais, pour réussir à rembourser sa dette, la Grèce doit générer chaque année un excédent primaire de 3 points de PIB. Pour nous, cela représenterait deux fois plus d’efforts que ce que nous essayons de faire d’ici à 2029. »
L’avance grecque ne résout donc pas les défis structurels de la France, mais elle vient opportunément atténuer le déficit du compte de concours financier « Prêts à des États étrangers ». Surtout, elle renvoie une image paradoxale de l’Union européenne : l’ancien patient de la zone euro est devenu le créancier modèle, tandis que la France voit ses marges de manœuvre se réduire.
À une semaine de l’examen final du budget à l’Assemblée, ce remboursement inattendu agit comme un révélateur politique autant que financier. Il interroge la capacité de Paris à reprendre la trajectoire promise aux institutions européennes, tandis que l’ex-maillon faible de l’Europe démontre désormais sa discipline budgétaire.
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