Lumière du matin et pieds nus sur la terre : les bienfaits d’un rituel ancestral

Silhouette d'un garde forestier au lever du soleil au mémorial national du vol 93 à Shanksville, en Pennsylvanie, le 11 septembre 2025.
Photo: Jeff Swensen/Getty Images
Nous vivons dans un monde inondé de lumière artificielle. Les enfants passent des heures devant des écrans, apprenant souvent davantage de pixels que d’enseignants. Les adultes, eux, travaillent sous la lueur crue des LED, défilent des flux jusqu’au cœur de la nuit et dorment le téléphone à portée de main. Cette clarté constante trompe notre corps, lui faisant croire que le jour ne se termine jamais. Elle dérègle les rythmes censés nous permettre de nous reposer, de nous réparer et de penser avec lucidité. Observer ce phénomène chez moi m’a ramené vers deux pratiques ancestrales, dénuées de toute technologie : poser mes pieds nus sur la terre et regarder le soleil se lever.
Un rituel familial au lever du jour
Désormais, la plupart des matins, ma famille se réunit au bord du perron, les pieds dans l’herbe. Nous attendons en silence que la première lumière se glisse au-dessus des collines. Mon fils de deux ans me rappelle à l’ordre si nous sommes en retard. Celui de dix ans crie de joie dès que la première ligne dorée apparaît. Même nos animaux participent. Les chiens s’immobilisent, où qu’ils soient, et tournent leur museau vers le soleil dès qu’il franchit l’horizon. Ils le font chaque matin. Les chats aussi. Les chiens, bien sûr, vivent en contact permanent avec le sol : leurs pattes nues foulent la terre et l’herbe toute la journée. Ils n’oublient jamais ce contact que nous, humains, fuyons trop souvent sous nos semelles et sur nos trottoirs. En les observant, je ne peux m’empêcher de penser qu’ils savent, à un niveau plus profond que les mots, que ce rituel compte.
La science redécouvre l’évidence
Ce rituel n’a rien d’un simple romantisme. Il s’appuie sur des données mesurables. Le « grounding », ou « mise à la terre », consiste à renouer un contact direct avec la surface terrestre.
Plusieurs études suggèrent que ce geste modifie la physiologie : il réduirait l’inflammation, soutiendrait le système immunitaire, accélérerait la cicatrisation et soulagerait certaines affections chroniques.
D’autres travaux indiquent que le contact avec la terre change la charge électrique des globules rouges, réduisant la viscosité du sang — un facteur clé pour la santé cardiovasculaire. Une étude pilote a montré que dormir sur des tapis conducteurs, reliés à la terre, améliore le rythme du cortisol, diminue le stress nocturne et favorise un sommeil plus profond.
Lumière du matin, horloge du corps
Le lever du soleil joue un rôle différent, mais tout aussi puissant. La première lumière du jour est le signal qui réinitialise l’horloge maîtresse du cerveau, celle qui régule le sommeil, les hormones et le métabolisme. La lumière du matin, particulièrement riche en spectre bleu, supprime la mélatonine, augmente la vigilance et stabilise le cortisol. Elle contribue ainsi à une énergie plus régulière durant la journée et à un sommeil plus profond la nuit.
À l’échelle cellulaire, la lumière rouge et infrarouge proche — présente au lever et au coucher du soleil — interagit avec les mitochondries, ces véritables centrales énergétiques de nos cellules. Ces longueurs d’onde activent des enzymes qui améliorent la production d’énergie et réduisent le stress oxydatif. Ce processus a fait l’objet de recherches pour sa capacité à renforcer la résilience cellulaire et même à soutenir les fonctions cérébrales.
Écrans, lumière artificielle et signaux perdus
Nos sociétés modernes ont remplacé ces signaux naturels par ceux des écrans et des ampoules. La recherche montre que les enfants exposés aux écrans en soirée dorment moins bien et peinent davantage à se concentrer le lendemain.
En troquant la lumière du soleil contre celle de nos appareils, nous déréglons les horloges internes qui structurent notre santé et notre bien-être.
Des effets tangibles, un ancrage retrouvé
Depuis que j’ai adopté ce rituel matinal, les changements ont été profonds. Mon anxiété s’est apaisée. Mon sommeil est plus profond, plus réparateur. Les gonflements dans mes mains et mes pieds au réveil ont diminué. J’ai expérimenté les draps dits « connectés », tissés de fils d’argent conducteurs reliés à la mise à la terre d’une prise. Ils ont apporté une légère amélioration, mais rien de comparable à l’effet du contact direct des pieds nus sur la terre et de la première lumière sur la peau. Le plus important, c’est que cette pratique est devenue un moment attendu de toute la famille. Les enfants me pressent de sortir lorsque le soleil s’apprête à franchir l’horizon. Il nous semble que nous retrouvons quelque chose que l’humanité a toujours su.
J’observe aussi la réaction des animaux. Les chiens se tournent systématiquement vers le soleil à l’aube. Personne ne le leur apprend. C’est inscrit dans leur nature même. Et cela me dit quelque chose d’essentiel : si même les animaux savent chercher la lumière du matin, peut-être nos instincts ne sont-ils pas trompeurs lorsque nous ressentons cette attirance. Peut-être avons-nous simplement oublié.
Un savoir ancien, confirmé par la science
Les études convergent : la mise à la terre réduit l’inflammation, améliore le sommeil, diminue les hormones du stress et favorise la circulation. La lumière du matin aide à réguler les rythmes circadiens et à stabiliser l’humeur. Les longueurs d’onde rouges et infrarouges soutiennent la santé mitochondriale. Ces pratiques, simples et sans danger, s’intègrent naturellement à la physiologie humaine.
Au-delà des chiffres et des courbes, il subsiste quelque chose de plus ancien : une vérité de contact, de silence, de lumière.
Pour ma famille, cette habitude quotidienne est devenue plus qu’une routine de santé : un rappel du rythme, de la gratitude et de la connexion. Dans une culture souvent fragmentée et anxieuse, ces matinées silencieuses nous offrent un instant de paix.
Demain matin, essayez
Nous n’avons pas été faits pour craindre le soleil ni pour vivre coupés de la terre. Nous avons été faits pour nous éveiller à la lumière, sentir le pouls du sol et emporter cette présence en nous.
Demain matin, sortez. Posez vos pieds nus sur la terre. Regardez le soleil se lever. Et voyez ce qui se passe en vous.

Mollie Engelhart, agricultrice et éleveuse, est engagée dans la souveraineté alimentaire, la régénération des sols et l\'éducation à l\'agriculture familiale et à l\'autosuffisance.
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