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Opinion

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Petites fermes : quand la transformation des aliments devient une question de survie

L’expression « produits à valeur ajoutée » paraît suffisamment claire. Bien sûr, ils ajoutent de la valeur. Mais tant que vous n’avez pas pris, sur votre ferme, quelque chose dont personne ne veut — un fruit abîmé, trop vert ou marqué par le gel — pour en faire quelque chose que les gens s’arrachent, vous ne comprenez pas vraiment ce que cette expression signifie.

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Photo: UliAb/Shutterstock

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Durée de lecture: 8 Min.

Pour de nombreuses petites fermes, les produits à valeur ajoutée représentent la différence entre ne pas s’en sortir du tout et survivre de justesse. Ils sont une question de survie. Ils sont une forme de liberté. Ils sont ce qui permet de rester sur la terre plutôt que de la perdre.

J’ai entendu Joel Salatin en parler pendant des années, et désormais les lecteurs dEpoch Times l’entendent régulièrement aussi. Ce qu’il ne cesse de défendre, c’est un système alimentaire libre de répondre au marché au lieu d’être étranglé par la bureaucratie. Il a raison. Le problème, c’est que beaucoup, y compris parmi les agriculteurs, ne perçoivent pas réellement à quel point les produits transformés peuvent être révolutionnaires — ni à quel point l’ingérence gouvernementale les entrave.

Dans notre ranch au Texas, nous avons la chance de disposer d’une cuisine certifiée via notre restaurant, et je suis moi-même certifiée pour la mise en conserve. Cela nous offre une flexibilité que beaucoup de fermes n’ont pas. Cette semaine en a été l’illustration parfaite.

Un coup de froid est passé, faisant mûrir toutes nos figues d’un seul coup — mais pas comme le soleil le fait. Mes enfants ont mordu dedans et m’ont dit : « Maman, Dieu a oublié de mettre du sucre dedans ». Ils avaient raison. Elles étaient fades, pas assez sucrées pour être vendues. En même temps, le gel avait brûlé certains de nos piments, qu’il fallait donc récolter immédiatement sous peine de les perdre.

En avançant dans le restaurant, entre les tables à débarrasser et les margaritas à préparer, je ne cessais de voir ces deux caisses : des figues destinées au compost et des piments voués aux cochons. J’ai décidé que ce ne serait pas leur destin ce jour-là.

Entre le service du midi et celui du soir, j’ai commencé à nettoyer les fruits et les piments avant de les mettre dans une marmite avec du vinaigre, du sel, de la ciboulette du jardin, des herbes et un peu de sucre. L’après-midi, tout le restaurant embaumait. Le soir venu, après avoir stérilisé les bocaux et vérifié la température et le pH, j’avais une première tournée de sauce piquante figue-piment en train de refroidir.

Le coût de ces produits était quasiment nul puisqu’ils étaient promis au compost. Ce lot a rapporté près de 1400 euros en sauce pour notre boutique à la ferme.

Quelques jours plus tard, j’ai transformé des patates douces en sauce barbecue pour une valeur de plus de 2000 euros. Elle restera en rayon tout l’hiver, période où les produits frais se font rares. On ne peut pas vendre autant de patates douces en une journée, mais on peut les transformer en une sauce qui rapporte bien davantage.

Nous fabriquons toutes sortes de choses au ranch : sauce piquante à la fraise, sauce barbecue au potiron, vinaigre de kaki, vinaigre de pêche, pâte de curry à partir de notre citronnelle, curcuma et gingembre, tisanes, ou encore mélanges à fumer à base de molène, laitue amère, menthe et pétales de rose. Lorsqu’un animal est abattu, je transforme le suif en crème pour le visage, baume à lèvres et cirage pour chaussures. Rien n’est gaspillé. Tout devient quelque chose d’utile.

C’est ainsi que les familles réussissent à faire vivre une ferme. Pourtant, dans de nombreux États, la plupart de ces pratiques seraient illégales.

Il y a des années en Californie, je l’ai appris de la manière la plus violente. Je fabriquais une sauce piquante appelée Mollie Hot. Nous cultivions les piments, l’ail, les oignons, et nous fabriquions même le vinaigre. Nos clients en raffolaient. Elle était servie sur chaque table et vendue à l’entrée du restaurant. Nous n’avions jamais eu le moindre problème sanitaire.

Puis un jour, des agents du gouvernement sont entrés simultanément dans tous mes restaurants.

Ils ont saisi des milliers de bocaux de sauce et entouré les étagères de rubans rouge et blanc portant la mention « sous embargo ». Ils ont prélevé des échantillons pour les analyser dans un laboratoire universitaire — analyses que j’ai dû financer. Tous les résultats sont revenus impeccables. Aucun agent pathogène. Aucun botulisme. Rien de dangereux.

J’ai immédiatement demandé toutes les licences qu’ils m’avaient indiquées. J’ai enregistré l’un des restaurants comme établissement de mise en conserve. J’ai suivi un cours de certification en conserverie de dix jours, commençant chaque matin à 5 heures.

Et après tout cela, l’État a tout de même décidé que chaque bocal devait être détruit.

Pas seulement jeté. Détruit sous leurs yeux.

Mes employés et moi avons passé des heures à vider bocal après bocal. Des centaines de caisses. J’aurais pu tout jeter dans un compacteur, mais je voulais sauver les bouteilles en verre et les bouchons. Ils m’ont obligée à les détruire eux aussi. Ils restaient là, payés à l’heure pour superviser ce qui tenait de l’humiliation publique. Je ne l’ai jamais oublié.

Lorsque les familles ont la liberté de fabriquer des produits à valeur ajoutée, les fermes, les restaurants et les entreprises alimentaires peuvent prospérer. Quand elles n’y sont pas autorisées, ces mêmes entreprises peinent ou disparaissent tout simplement.

Les produits transformés nous permettent de capturer des nutriments à leur apogée et de les rendre stables sur l’étagère pendant l’hiver. Ils créent des emplois. Ils maintiennent l’économie rurale vivante. Ils réduisent le gaspillage. Ils renforcent la résilience.

Tout cela dynamise les économies locales sans coûter un centime au gouvernement.

Je ne prétends pas savoir comment démêler les réglementations qui ont envahi notre système alimentaire comme une vigne. Mais je sais que les assouplir permettrait d’économiser de l’argent, de soutenir les petites entreprises et de restaurer une véritable sécurité alimentaire locale.

Le gouvernement ne peut pas nous sauver. Il ne l’a jamais fait. Mais peut-être pourrait-il desserrer son étreinte, juste assez pour que les produits à valeur ajoutée puissent, enfin, ajouter de la valeur à nouveau.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Mollie Engelhart, agricultrice et éleveuse, est engagée dans la souveraineté alimentaire, la régénération des sols et l\'éducation à l\'agriculture familiale et à l\'autosuffisance.

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