La corde la plus résistante du monde

Les presque invisibles deviennent visibles dans la rosée matinale d’automne. Mais après de minuscules vibrations, ils disparaissent soudain de nouveau à nos yeux. Car les merveilleuses perles d’eau scintillantes sont tombées du réseau de fils. Une question s’impose alors : les toiles d’araignées sont-elles des œuvres d’art ou des prouesses techniques ? Ou peut-être les deux à la fois ?

Mystérieusement, de minuscules créatures bâtissent dans l’ombre leurs demeures, qui servent aussi bien de nids d’amour que de dispositifs de capture ou de réserves de proies. Les araignées tisseuses (Araneae) sont les architectes de ces petits miracles à notre porte. Non seulement les types de construction de leurs toiles nous fascinent, mais nous envions également la matière dont elles sont faites. Celle-ci est produite dans leurs glandes séricigènes et se distingue par une élasticité exceptionnelle. La soie d’araignée est plus fine qu’un cheveu humain, mais elle possède une résistance à la traction quatre fois supérieure à celle de l’acier.

Avec un poids extrêmement faible, une résistance à l’eau, une grande capacité d’absorption hydrique et une résistance aux micro-organismes, la soie d’araignée représente un matériau de rêve pour l’être humain. Elle est même parfaitement biodégradable. Selon leur fonction, les fils présentent différentes structures. Il existe des matériaux destinés aux armatures des toiles, aux fils de sécurisation, d’adhérence et de descente en rappel, ainsi que des fils servant à l’émission de substances messagères.

Les femelles produisent également des fils de soie pour stocker le sperme et des fils de cocon pour prendre soin de leurs petits. Elles portent leurs œufs dans le cocon jusqu’à l’éclosion des jeunes araignées. Ces dernières produisent une soie appelée soie d’été indienne. Grâce à ces fils, elles peuvent se déplacer vers un autre endroit, un phénomène également appelé vol des araignées.

Elles utilisent des fils destinés à la transmission d’informations tactiles afin de distinguer l’ennemi, la proie et le partenaire sexuel. Si, par exemple, un mâle ne respecte pas le rituel propre à son espèce, la femelle ne l’identifie pas comme partenaire et le dévore comme un ennemi.

Chez toutes les espèces d’araignées tisseuses, les protéines constituant les fils présentent des structures différentes. Rien qu’en Allemagne, on recense environ 1000 espèces distinctes. Et comme l’élevage d’araignées est impossible, les scientifiques tentent depuis des décennies de produire ce matériau de manière synthétique.

Deux de ses propriétés le rendent particulièrement intéressant pour la médecine : il est résistant aux bactéries et n’est pas reconnu comme corps étranger par le système immunitaire humain. Des premiers succès ont ainsi été obtenus dans le revêtement des implants, qui, grâce à la soie d’araignée, ne sont pas rejetés et ne provoquent pas d’inflammations. Des cellules de tissu conjonctif et des cellules sanguines ont également déjà été cultivées sur des tissus en soie d’araignée.

En 2016, une chaussure en soie d’araignée a été mise au point, et l’industrie textile nourrit elle aussi de grands espoirs quant à des domaines d’application prometteurs. Malheureusement, les producteurs de ce matériau naturel de haute performance sont également à l’origine du trouble anxieux le plus fréquent de notre culture : l’arachnophobie, aujourd’hui bien prise en charge sur le plan thérapeutique. Dans d’autres cultures, les araignées sont tolérées à proximité des humains, car elles éliminent efficacement les insectes nuisibles, sont consommées comme mets délicat, ou même vénérées comme des divinités.