Déficit : le taux d’intérêt de la dette française à 30 ans atteint son plus haut niveau depuis 2011

Éric Lombard, ministre de l'Économie et des Finances.
Photo: LUDOVIC MARIN/AFP via Getty Images
Le taux de la dette française à 30 ans a franchi mardi le seuil de 4,50 %, une première depuis 2011, marquant une détérioration du climat de confiance des investisseurs face à l’incertitude budgétaire. Cette situation survient à quelques jours du vote de confiance crucial pour le Premier ministre François Bayrou, prévu le 8 septembre à l’Assemblée nationale.
Depuis plusieurs années, la France doit composer avec un déficit public élevé et une dette représentant plus de 110 % du PIB, dans un contexte de ralentissement économique et de pressions politiques importantes. La conjoncture actuelle est marquée par une défiance croissante des marchés envers les finances publiques françaises, renforcée par l’instabilité politique et la difficulté à mettre en œuvre des mesures d’économie.
Hausse record des taux
Mardi à 10h10, le taux français à 30 ans, considéré comme un indicateur clé de la confiance des marchés à long terme, atteignait 4,50 %, contre 4,45 % à la clôture la veille. La dernière fois que ce seuil avait été franchi en séance, c’était en novembre 2011, au plus fort de la crise des dettes souveraines en zone euro.
Le taux est en hausse continue depuis lundi, où il s’élevait à 4,42 %, dans un contexte où la majorité pour le gouvernement Bayrou lors du prochain vote apparaît de plus en plus incertaine.
Le taux d’emprunt français à dix ans, référence sur les marchés, a grimpé à 3,57 %, se rapprochant de celui de l’Italie, autrefois considéré comme le « mauvais élève » budgétaire de l’Europe. Cette tendance est, selon Aurélien Buffault de Delubac AM, « un signe très négatif de défiance » des investisseurs envers la France. Jim Reid, économiste chez Deutsche Bank, souligne que la crainte d’une nouvelle paralysie politique pourrait rendre la rigueur budgétaire plus complexe, une inquiétude accentuée par le niveau élevé du déficit français.
Le taux d’intérêt auquel la France emprunte plus élevé que celui de la Grèce
En septembre 2024, le taux d’intérêt à 5 ans pour la France a atteint 2,48 %, dépassant les 2,40 % pour la Grèce. Même le taux de référence à 10 ans français a fini par égaler, voire dépasser brièvement, celui de la Grèce autour de 3,045 % contre 3,04 % dans certains épisodes de tension sur les marchés. Cette inversion concerne principalement les obligations récentes ; historiquement, la France bénéficiait de taux sensiblement plus faibles.
Ce revirement souligne une inquiétude nouvelle pour la solidité financière de la France et met en lumière le spectaculaire redressement de la gestion budgétaire grecque. Désormais, la France doit consacrer une part plus importante de son budget au paiement des intérêts de la dette, réduisant d’autant les marges de manœuvre pour les politiques publiques ou les investissements. Ce signal inquiète tant les observateurs que les responsables politiques, car il signifie que la France inspire momentanément moins de confiance que la Grèce sur certains segments obligataires.
Conséquences politiques et européennes
François Bayrou, qui a lancé lundi une série de consultations politiques avec divers partis, y compris le Parti communiste, poursuit ses efforts malgré les doutes exprimés jusque dans sa propre coalition. Il doit rencontrer cette semaine les représentants des partis soutenant le gouvernement et ceux du Rassemblement national.
Les incertitudes pesant sur la France ont des répercussions sur le marché obligataire européen. En Allemagne, le rendement à 30 ans s’approche de ses sommets post-crise de 2011, tandis qu’au Royaume-Uni, il atteint son plus haut niveau depuis 1998, à 5,69 %.
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