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« De graves violations des droits humains » : la Corée du Sud reconnaît enfin sa responsabilité dans des adoptions abusives

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Le président sud-coréen Lee Jae-myung.

Photo: JUNG YEON-JE/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 4 Min.

Pour la première fois, la Corée du Sud a reconnu jeudi sa responsabilité dans des dizaines de milliers d’adoptions abusives d’enfants sud-coréens à l’international.

« L’État n’a pas pleinement assumé ses responsabilités. Au nom de la République de Corée, j’adresse mes sincères excuses et mes mots de réconfort aux personnes adoptées à l’étranger, à leurs familles ainsi qu’à leurs familles biologiques qui ont enduré des souffrances », a déclaré le président sud-coréen Lee Jae-myung.

Plus de 140.000 enfants sud-coréens adoptés à l’étranger

Ces excuses interviennent à la suite de « décisions judiciaires récentes et des investigations menées par la Commission vérité et réconciliation révélant que, dans certains cas, de graves violations des droits humains ont été commises lors des procédures d’adoption à l’étranger », a-t-il ajouté. Entre 1955 et 1999, plus de 140.000 enfants sud-coréens ont été envoyés à l’étranger pour adoption, selon les chiffres officiels.

Des pratiques frauduleuses

Depuis des années, d’anciens enfants adoptés en France et ailleurs réclament le droit de connaître leurs origines. Beaucoup affirment que leur mère biologique a été contrainte à l’abandon et que leurs dossiers d’adoption avaient été falsifiés pour les rendre légalement adoptables. Face à ces témoignages, l’État sud-coréen a fini par instaurer une instance d’enquête indépendante.

La Commission vérité et réconciliation a rendu en mars un rapport historique, concluant à la culpabilité du gouvernement dans la facilitation d’adoptions via des pratiques frauduleuses. Les méthodes incriminées incluent des « enregistrements frauduleux d’orphelins, des falsifications d’identité et un contrôle inadapté des parents adoptifs ». Le rapport relève également que les consentements légaux de nombreuses mères biologiques n’ont pas été respectés, révélant qu’en 1984, 99% des adoptions internationales avaient été validées le jour même ou le lendemain de la demande.

Un système influencé par des intérêts économiques

Il est également reproché aux autorités de ne pas avoir encadré les frais d’adoption, favorisant ainsi la transformation de l’adoption internationale en un secteur lucratif. Le phénomène avait commencé après la guerre de Corée pour éloigner les enfants métis, puis a connu un essor dans les années 1970-1980, en parallèle du développement économique du pays, faisant des agences d’adoption des acteurs économiques puissants.

Des pratiques toujours en débat aujourd’hui

Même dans les années 2020, des centaines d’enfants sud-coréens sont adoptés chaque année à l’étranger. Le vivier des adoptions concerne aujourd’hui principalement les enfants de femmes célibataires, qui dans une société coréenne conservatrice et patriarcale, sont souvent confrontées à l’abandon de leur bébé à la naissance.

Réformer le système

En juillet, la Corée du Sud a promis de réformer son système d’adoption en privilégiant le secteur public et en mettant fin à la prédominance d’agences privées peu contrôlées. « L’État prend maintenant l’entière responsabilité d’assurer la sécurité et les droits de tous les enfants adoptés », a assuré Kim Sang-hee, responsable du ministère de la Santé.

Des excuses attendues depuis des décennies

En 1998 déjà, l’ancien président Kim Dae-jung avait exprimé des regrets devant des personnes adoptées à l’étranger mais sans reconnaître naguère la responsabilité : « Du fond du cœur, je suis sincèrement désolé. Je suis profondément convaincu que nous avons commis une grave injustice à votre égard. » Il n’avait cependant pas reconnu, à l’époque, la responsabilité de l’État dans ces années de pratiques abusives.

Avec AFP