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Ce qui se joue alors que Donald Trump exhorte l’Ukraine à passer à l’offensive

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Le président américain Donald Trump s'adresse à la 80e session de l'Assemblée générale des Nations unies au siège de l'ONU à New York, le 23 septembre 2025.

Photo: MEHMET ESER/Middle East Images/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 11 Min.

Le président américain Donald Trump a affiché un nouvel optimisme quant à la capacité de l’Ukraine à récupérer l’ensemble de son territoire antérieur à 2014 sur la Russie, insufflant potentiellement un nouvel élan à la combativité de Kiev après plus de trois années et demie de conflit coûteux.
Dans un discours prononcé devant l’Assemblée générale de l’ONU le 23 septembre, Donald Trump a montré sa disposition à accentuer la pression sur la Russie, à condition que ses alliés européens réduisent drastiquement leur dépendance aux exportations énergétiques russes. Le même jour, le président américain a affirmé qu’avec un soutien européen suffisant, les forces ukrainiennes pourraient effectivement regagner l’ensemble des territoires perdus face à la Russie au fil des années.
Donald Trump avait précédemment évoqué la possibilité d’un règlement négocié, qui consisterait soit à figer le conflit sur les lignes de front actuelles, soit à envisager certains échanges de territoires entre la Russie et l’Ukraine.
L’expression d’un nouvel optimisme de la part du président américain quant à l’avantage ukrainien sur le terrain fait suite à des mois de discussions avec le président russe Vladimir Poutine, mais sans réelle avancée vers un cessez-le-feu.
« Après avoir pris connaissance et compris pleinement la situation militaire et économique entre l’Ukraine et la Russie, et constaté les difficultés économiques auxquelles la Russie fait face, je pense que l’Ukraine, avec l’appui de l’Union européenne, est en mesure de combattre et de RECONQUÉRIR l’entièreté de son territoire originel », a écrit Trump dans une publication sur Truth Social le 23 septembre.
Si la perspective de reconquérir la totalité du territoire ukrainien marque une rupture avec les précédentes analyses de l’administration Trump sur ce conflit, celui-ci a toujours encouragé l’Europe à assumer davantage la sécurité dans la région.
Par ailleurs, les propos de Trump sur la nécessité d’un soutien européen à l’Ukraine s’inscrivent dans la continuité des démarches qu’il avait entreprises durant l’été pour intensifier les livraisons d’armes occidentales à Kiev.
En juillet, il avait annoncé la mise en place d’un nouveau cadre d’assistance sécuritaire avec l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), selon lequel les membres de l’alliance achèteraient du matériel militaire auprès des États-Unis pour le fournir à l’Ukraine.
Malgré cet appui extérieur, les tentatives ukrainiennes de regagner du territoire ont donné des résultats mitigés jusqu’ici.
À la fin de l’été 2022, les forces ukrainiennes ont inversé certains acquis russes. Une autre contre-offensive ukrainienne, menée à l’été 2023, s’est essoufflée sans infliger de réel revers aux lignes russes.

Situation sur le champ de bataille

Aujourd’hui, les troupes russes contrôlent environ un cinquième du territoire ukrainien d’avant-guerre, y compris la péninsule de Crimée annexée en 2014 et une vaste partie de l’Est de l’Ukraine.
D’après la dernière évaluation du Conseil des relations extérieures (Council on Foreign Relations), la communauté internationale a envoyé quelque 407 milliards de dollars en armes et aide financière à l’Ukraine depuis le début de cette phase du conflit, en février 2022. Cela inclut environ 118 milliards de dollars d’aide directe des États-Unis.
« Aucune des deux parties n’est en mesure de réaliser une percée soudaine et décisive, mais l’équilibre évolue selon la capacité de l’Ukraine à mener des campagnes de frappes en profondeur contre les dépôts et les infrastructures logistiques », explique Irina Tsukerman, analyste en sécurité nationale et fondatrice du cabinet Scarab Rising, à Epoch Times.
Ces dernières semaines, les forces ukrainiennes ont signalé la reprise de plusieurs villages dans la région de Dobropillia, oblast de Donetsk.

Des soldats ukrainiens de la 59e brigade mobile de défense aérienne tirent avec un canon antiaérien double ZU-23 de fabrication soviétique sur un drone russe depuis un champ de tournesols, lors d’une attaque aérienne près de Pavlograd, dans la région de Dnipropetrovsk, le 19 juillet 2025, dans le contexte de l’invasion russe en Ukraine. (ROMAN PILIPEY/AFP via Getty Images)

Mme Tsukerman estime que les récents gains territoriaux ukrainiens ont pu inciter Trump à tenir des propos rassurants sur la direction du conflit. Elle précise que les succès sur le terrain pour les forces ukrainiennes dépendent de leur capacité à coordonner les frappes de longue portée, à contrer le brouillage des signaux russes et à mobiliser de nouvelles troupes capables d’exploiter les failles dans les dispositifs adverses.
Daniel L. Davis, officier retraité de l’US Army et chercheur principal au sein du groupe de réflexion Defense Priorities (Think-tank Defense Priorities), se montre quant à lui nettement plus pessimiste sur les chances ukrainiennes. « Il n’existe aucune chance, pas même une infime, pour que l’Ukraine récupère son territoire d’avant-guerre », a-t-il affirmé à Epoch Times.
Depuis la contre-offensive ukrainienne de 2023, « ce sont les avancées russes qui n’ont jamais cessé ».
Selon lui, les forces ukrainiennes manquent de puissance de feu pour espérer mener une offensive majeure contre la Russie. Même si elles en disposaient, M. Davis pointe également un manque de troupes suffisamment formées pour pouvoir utiliser cette puissance de feu de manière efficace.

Positionnement de l’Europe

Au lendemain des déclarations de Trump sur la possible reconquête ukrainienne, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a continué d’appeler la communauté internationale à soutenir son pays lors d’un discours à l’ONU.
« Bien sûr, nous faisons tout pour que l’Europe apporte une aide réelle. Et naturellement, nous comptons sur les États-Unis », a déclaré Zelensky. « Je mesure tout le soutien que nous recevons. »
Durant le conflit, le chef de l’État ukrainien a œuvré pour une intégration de son pays dans l’OTAN et pour disposer des garanties sécuritaires de l’alliance. Faute de cela, il a demandé que les membres de l’OTAN, en particulier en Europe, poursuivent l’appui militaire et apportent une forme d’assurance à son pays.
Alp Sevimlisoy, stratégiste géopolitique et spécialiste au sein de l’Atlantic Council (Conseil atlantique), formule l’hypothèse que les pays membres de l’OTAN pourraient organiser leurs forces militaires d’une façon « qui permettrait à l’Ukraine de disposer d’une marge de manœuvre suffisante » pour reconquérir son territoire.

Des soldats roumains participent à l’exercice militaire multinational Sea Shield 25 à bord de la frégate « Regina Maria » le 8 avril 2025 en mer Noire, au large des côtes de Constanta. (Andrei Pungovschi/Getty Images)

« Nous devons mettre en place des instruments de guerre qui permettent des représailles directes contre la Russie, et disposer de structures de dissuasion capables de démanteler sérieusement l’appareil sécuritaire du Kremlin », explique M. Sevimlisoy à Epoch Times.
Daniel L. Davis se montre plus réservé concernant l’idée d’un renforcement des forces de l’OTAN près de la Russie afin de détourner ou menacer Moscou en plein conflit ukrainien. Selon lui, le simple positionnement de ces forces, même sans intention d’intervention directe, accroît le risque d’un malentendu ou d’une mauvaise interprétation pouvant déboucher sur un affrontement direct avec Moscou.
Peu optimiste pour une victoire sur le champ de bataille, M. Davis suggère que Trump a peut-être lié le succès ukrainien au soutien européen afin de s’exonérer de la résolution du problème.
« Plutôt que de dire ‘je tourne la page’, ce qui lui vaudrait toutes sortes de critiques, il s’en remet à une solution ‘plus simple’ », commente-t-il.

Options pour la diplomatie

Tandis que la semaine dernière, Trump affichait son optimisme sur les capacités ukrainiennes à résoudre le conflit par la force, le vice-président J.D. Vance a estimé que les propos du président ne constituaient « pas un changement de position ».
Lors d’un déplacement en Caroline du Nord le 24 septembre, Vance a affirmé que l’administration Trump négociait de bonne foi avec la Russie et l’Ukraine, tout en estimant que Moscou « ne mettait pas assez d’éléments sur la table pour conclure la paix ».
Vance souligne que le conflit nuit autant à la Russie qu’à l’Ukraine, ainsi qu’aux États-Unis, et que toutes les parties auraient intérêt à privilégier les voies diplomatiques.
« Mais si les Russes refusent de négocier loyalement, les conséquences seront très graves pour leur pays », avertit Vance.

Le président américain Donald Trump et le président ukrainien Volodymyr Zelensky écoutent le vice-président JD Vance (à dr.) lors de leur rencontre dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC, le 28 février 2025. (SAUL LOEB/AFP via Getty Images)

Pour sa part, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov répond, après les déclarations récentes de Trump et Vance, que Moscou considère que l’administration Trump reste avant tout attachée à la résolution du conflit par la négociation.
« Pour l’instant, nous considérons que Washington conserve la volonté politique, et le président Trump la détermination, de poursuivre les efforts en vue d’un règlement pacifique du conflit en Ukraine », déclare Peskov. « Nous soutenons ces initiatives et la Russie reste ouverte à la tenue de pourparlers de paix. »
Avec Reuters