Opinion
Une guerre sur deux fronts : la menace coordonnée de la Chine et de la Russie visant à affaiblir l’Occident

Le président russe Vladimir Poutine s’entretient par appel vidéo avec le dirigeant chinois Xi Jinping à la résidence officielle du président russe de Novo-Ogaryovo, près de Moscou, le 21 janvier 2025.
Photo: Gavriil Grigorov/Pool/AFP via Getty Images
De hauts dirigeants militaires occidentaux tirent la sonnette d’alarme face à la possibilité de devoir riposter sur deux théâtres de guerre en cas d’attaque de Taïwan par Pékin qui entraînerait Moscou dans une offensive coordonnée contre les forces de l’Occident.
Mark Rutte, secrétaire général de l’OTAN, a averti que si le régime chinois envisageait d’envahir Taïwan, il se coordonnerait probablement avec la Russie pour lancer des attaques simultanées sur le territoire de l’OTAN en Europe, créant ainsi un scénario de guerre sur deux fronts pour les membres de l’Alliance atlantique et leurs alliés.
La Chine et la Russie ont officialisé leur « partenariat sans limites » lors de la rencontre de Xi Jinping et Vladimir Poutine à Pékin début février 2022. Moins de trois semaines après cette rencontre, juste après la clôture des JO de Pékin, la Russie a lancé son invasion de l’Ukraine. Depuis lors, Pékin a discrètement soutenu l’effort de guerre de Moscou, tout en revendiquant sa neutralité. Le renforcement de leur alliance augmente la probabilité que la Chine se coordonne avec la Russie lors de toute action militaire majeure, y compris une éventuelle invasion de Taïwan.
Selon M. Rutte, Xi Jinping demanderait probablement à Vladimir Poutine de lancer une attaque sur le territoire européen de l’OTAN afin de détourner l’attention de l’Amérique – première puissance militaire et économique occidentale – pendant que la Chine attaque Taïwan. Cela forcerait les États-Unis à s’engager dans une guerre sur deux fronts contre les principales puissances autoritaires mondiales. Alors que les forces américaines se déplacent vers le Pacifique, la Russie pourrait profiter de l’occasion pour frapper les flancs vulnérables de l’OTAN – comme les États baltes, l’archipel norvégien du Svalbard ou d’autres zones stratégiques – en vue d’obtenir des gains rapides avant que l’OTAN ne puisse riposter.
Il est largement admis que Xi Jinping vise 2027 pour une éventuelle invasion de Taïwan, date marquant le 100e anniversaire de son Armée populaire de libération (APL) – une étape importante dans le programme de modernisation militaire de l’État-parti chinois.
Cependant, si l’APL n’est pas toujours prête à affronter seule les forces américaines, Xi Jinping pourrait solliciter le soutien de la Russie pour joindre les forces et combler les lacunes restantes. Une alliance formelle fusionnerait deux des plus grandes armées du monde, combinant des effectifs considérables ayant de grandes capacités terrestres, maritimes et aériennes.
Selon Global Firepower, leurs forces navales comprennent 1173 navires de guerre, dont quatre porte-avions, quatre porte-hélicoptères et une puissante flotte de 124 sous-marins, dont beaucoup sont capables de lancer des missiles nucléaires. La Chine possède la plus grande marine du monde en nombre de navires, tandis que la Russie possède une vaste expertise en guerre sous-marine.
Dans les airs, leurs forces combinées comprennent au moins 7600 avions, et sur terre, elles déploient plus de 12.550 chars et plus de 18.000 pièces d’artillerie (ceci sans compter la Corée du Nord, leur fidèle allié). En outre, la flotte marchande combinée de la Chine et la Russie comprend 11.224 navires, ce qui leur confère une énorme capacité de transport de troupes, de fournitures et d’équipements sur de vastes distances, à l’appui des opérations militaires.
L’une des évolutions les plus alarmantes est la croissance rapide de l’arsenal nucléaire chinois. Selon le Pentagone, le stock d’ogives nucléaires opérationnelles de la Chine a presque triplé entre 2020 et 2024, atteignant environ 600 ogives en 2025. La Chine possède désormais l’arsenal nucléaire dont la croissance est la plus rapide parmi les neuf États dotés d’armes nucléaires et elle est la seule signataire du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) à accroître significativement son arsenal.
Associée à l’arsenal russe, la menace devient encore plus grave. La Russie possède environ 4309 ogives nucléaires affectées à des forces stratégiques et non stratégiques, auxquelles s’ajoutent 1150 ogives retirées du service en attente de démantèlement, ce qui porte son inventaire total à environ 5459 ogives, selon le Bulletin of the Atomic Scientists. Parmi celles-ci, environ 1477 sont des armes nucléaires non stratégiques, notamment des ogives déployées dans les forces navales, aériennes, terrestres et les systèmes de défense aérienne.
Parmi les principaux systèmes de lancement figurent le missile balistique à courte portée Iskander, le missile de croisière Kalibr, divers intercepteurs de défense aérienne et le missile hypersonique Kinzhal. En 2024, la Russie a également abaissé son seuil d’utilisation des armes nucléaires, ce qui signifie que le niveau de provocation requis par le droit russe pour justifier une riposte nucléaire a été réduit, augmentant encore les enjeux de toute confrontation potentielle impliquant la Chine et la Russie.
Affronter deux puissants adversaires dotés de l’arme nucléaire sur des fronts distincts placerait les États-Unis et leurs alliés dans une position stratégique peu enviable. Le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, a plaidé pour un déplacement de l’attention américaine de l’Europe vers l’Indo-Pacifique, le qualifiant de « théâtre prioritaire ». Cependant, un tel changement de cap dépend d’une plus grande prise en charge par l’Europe de sa propre défense.
C’est l’une des raisons pour lesquelles Donald Trump a adopté une ligne dure à l’égard de l’OTAN, demandant aux pays européens de jouer un rôle plus actif dans leur propre sécurité, notamment en portant leurs dépenses de défense à 5 % du PIB.
À l’approche de 2027, les stratèges militaires occidentaux s’empressent de se préparer à des actions agressives simultanées, renforçant le flanc oriental de l’OTAN tandis que les États-Unis consolident leurs alliances dans le Pacifique, notamment avec le Japon et la Corée du Sud.
Si le secrétaire général de l’OTAN a raison, le sort de Taïwan et du monde pourrait dépendre d’un réarmement suffisant de l’Europe, permettant à l’Amérique de concentrer ses efforts sur la dissuasion de la Chine communiste.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Antonio Graceffo, docteur en philosophie, a passé plus de 20 ans en Asie. Il est diplômé de l'Université des sports de Shanghai et titulaire d'un MBA chinois de l'Université Jiaotong de Shanghai. Il travaille aujourd'hui comme professeur d'économie et analyste économique de la Chine, écrivant pour divers médias internationaux.
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