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TDAH et traumatisme : quel lien et comment le traiter efficacement ?

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Photo: Thanasis Zovoilis/Getty Images

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Durée de lecture: 8 Min.

Une lettre scientifique publiée dans l’Indian Journal of Pediatrics rapporte le cas suivant :

Une fillette de 5 ans, en maternelle, présentait depuis trois mois des crises émotionnelles, de l’agressivité et un comportement obstiné. En apparence, elle semblait souffrir d’un trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH). En réalité, elle montrait l’impact d’un traumatisme.

À la maison, sa famille traversait une période difficile, marquée par le chômage et des conflits constants, créant un environnement de stress.

Les traumatismes et les expériences négatives vécues durant l’enfance n’augmentent pas seulement le risque de développer un TDAH, ils peuvent aussi en amplifier les symptômes, parfois jusqu’à l’âge adulte. C’est pourquoi, lors du choix d’un traitement, il est essentiel de prendre en compte le vécu de l’enfant et de lui offrir un accompagnement qui renforce son sentiment de sécurité, plutôt que de se concentrer uniquement sur son comportement ou sur la médication.

Le lien entre TDAH et traumatisme

« Il existe très clairement un lien entre le traumatisme et le TDAH », explique le Dr Samuel Ponnuthurai, psychiatre, dans une interview accordée à Epoch Times.

Un traumatisme peut perturber le développement cérébral et les processus cognitifs, contribuant ainsi à l’apparition du TDAH et laissant une empreinte durable sur les plans émotionnel, cognitif et neuronal.

Les enfants exposés à un traumatisme peuvent développer un biais de mémoire négatif – ils se souviennent davantage des expériences douloureuses que des positives. Ce biais peut accroître le stress et la réactivité émotionnelle, aggravant les difficultés d’attention, de contrôle des impulsions et d’hyperactivité – des symptômes souvent associés au TDAH.

De plus, un passé marqué par l’adversité place fréquemment la personne dans un état de lutte ou de fuite, la rendant plus sensible au stress, ajoute le Dr Ponnuthurai. Sur le plan familial, le TDAH est hautement héréditaire.

« Il est courant qu’un parent et un enfant partagent des traits du TDAH, ce qui peut compliquer les interactions quotidiennes », précise-t-il.

Le stress généré par les affrontements constants entre parent et enfant – disputes répétées, incompréhensions, frustrations – peut s’ancrer sur plusieurs générations, rendant les familles plus vulnérables à des cycles de traumatismes.

Le traumatisme peut revêtir de nombreuses formes. Il peut découler d’un événement unique, comme la perte d’un proche, un grave accident ou le fait d’avoir été témoin d’un acte violent. Cependant, il n’a pas toujours un aspect spectaculaire vu de l’extérieur. Chez un enfant sensible, des situations qui semblent mineures – un sentiment d’impuissance ou d’insécurité, être sévèrement critiqué à l’école, constamment réprimandé par un parent, ou encore exclu ou harcelé par des camarades – peuvent laisser une marque profonde.

Plus un enfant rapporte d’expériences négatives, plus il est susceptible de développer des symptômes de TDAH.

Les parents peuvent aider en repérant les signes de stress, en offrant un soutien bienveillant et en cherchant de l’aide rapidement, avant que les difficultés ne deviennent accablantes.

Des approches thérapeutiques centrées sur le traumatisme

« On ne peut savoir si les symptômes de TDAH d’un enfant sont liés à un traumatisme qu’en examinant l’ensemble de son histoire, en comprenant qui il est et ce qu’il a vécu », explique dans Epoch Times Patricia Worby, spécialiste du traumatisme.

Les évaluations classiques échouent souvent à cerner la situation dans sa globalité, car elles se concentrent surtout sur le traitement des symptômes.

Le traitement standard du TDAH repose généralement sur la médication ou la psychothérapie. Bien que ces approches restent importantes, la prise en charge s’élargit aujourd’hui à des interventions physiques, sociales et professionnelles – parfois en complément des soins traditionnels, parfois comme principale modalité de traitement, précise le Dr Ponnuthurai.

Dans le cas de la fillette de 5 ans, l’approche centrée sur le traumatisme allait bien au-delà de ses symptômes : elle visait à instaurer un environnement sûr et bienveillant. Les soins se sont axés sur le renforcement du lien d’attachement mère-enfant. Sa mère a été encouragée à « la prendre dans ses bras, interagir avec elle, lui poser des questions, lui lire des histoires et parler avec elle » – une stratégie pratique connue sous l’acronyme HEART – afin de l’aider à se sentir en sécurité et soutenue tout en travaillant sur ses difficultés comportementales.

Travailler dans des environnements non cliniques, comme les écoles ou les foyers, permet aux thérapeutes d’aborder les besoins liés au TDAH de façon concrète, souligne Patricia Worby.

Toutefois, une intervention précoce reste cruciale.

Pour le traitement, Patricia Worby met en avant les approches corporelles ou somatiques, comme les exercices de respiration, le yoga, la désensibilisation et le retraitement par les mouvements oculaires (EMDR) – une thérapie qui aide à traiter les souvenirs traumatiques – ou encore le Somatic Experiencing.

Ces techniques permettent aux enfants de se reconnecter à leur corps, de libérer les mémoires émotionnelles et de retrouver un sentiment de sécurité et de stabilité. « Il faut inverser l’expérience traumatique en apprenant à l’enfant des outils et techniques qui favorisent la sécurité corporelle », explique-t-elle.

La société, elle aussi, a un rôle à jouer.

« Nous sommes submergés de fausses connexions qui perturbent la régulation du système nerveux », ajoute Patricia Worby. Les enfants grandissent aujourd’hui dans un environnement de comparaison et de jugement constants, amplifiés par les réseaux sociaux.

Ce dont les jeunes ont le plus besoin, ce sont de relations réelles, sincères et sécurisantes, ainsi que de structures de soutien – clubs de sport, associations ou groupes communautaires – qui leur apportent un sentiment d’appartenance et de sens. Enfin, le traitement ne doit pas se limiter aux difficultés mais doit aussi valoriser les points forts.

Il est essentiel, conclut le Dr Ponnuthurai, « de trouver comment utiliser les forces que les personnes atteintes de TDAH possèdent dans différents domaines de leur vie. Dans les zones de difficulté, nous pouvons relier les adaptations liées au TDAH à ces forces et trouver un équilibre pour construire des solutions ».

 
Zena le Roux est journaliste santé (MA) et coach certifiée santé & bien-être, spécialisée en nutrition fonctionnelle. Elle est également formée en nutrition sportive, en alimentation consciente, en systèmes familiaux internes et en théorie polyvagale appliquée. Elle travaille dans un cabinet privé et est éducatrice en nutrition pour une école de santé basée au Royaume-Uni.

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