Logo Epoch Times

Médicament contre le diabète : risque oculaire doublé ?

top-article-image

Photo: Cynthia A Jackson/Shutterstock

author-image
Partager un article

Durée de lecture: 7 Min.

Le tirzépatide, ce médicament populaire contre le diabète vendu sous les noms de Mounjaro et Zepbound, doublerait le risque de développer une affection oculaire grave menaçant la vision chez les patients ayant déjà des lésions oculaires. C’est ce qu’indique une vaste étude récemment publiée dans Diabetologia.
La recherche a révélé que 1,1 % des utilisateurs de tirzépatide ont développé une rétinopathie diabétique proliférante (RDP), une forme sévère de maladie oculaire diabétique pouvant entraîner la cécité. Ce chiffre est à comparer à seulement 0,5 % des patients ne prenant pas le médicament.
La plupart de ces cas sont survenus chez des patients qui présentaient déjà des lésions rétiniennes légères dues au diabète.
Données de près de 7000 patients
Les chercheurs ont analysé les dossiers médicaux électroniques de plus de 6800 adultes atteints de diabète de type 2 au centre de diabète de l’Imperial College de Londres. L’étude a comparé 3435 patients ayant pris du tirzépatide pendant au moins 6 mois avec un nombre égal de patients appariés qui n’ont pas utilisé le médicament.
La recherche s’est concentrée sur les patients ayant subi des dépistages oculaires avant et après que le tirzépatide est devenu disponible à la clinique en octobre 2022. Les patients ont été méticuleusement appariés en fonction du sexe, de la durée du diabète, du contrôle initial de la glycémie, de l’état de santé de la rétine et des autres médicaments.
Dans la population diabétique générale, la prévalence de la rétinopathie diabétique proliférante (RDP) est d’environ 2,3 % à 7,5 %.
Les chercheurs ont découvert que l’utilisation du tirzépatide était associée à un risque un peu plus que doublé (115 %) de développer une RDP par rapport à ceux qui ne prenaient pas le médicament. Cela représente un taux d’incidence d’environ 7 cas pour 1000 personnes-années chez les patients sous tirzépatide. Dans la RDP, des vaisseaux sanguins anormaux (néovascularisation) se développent sur la rétine – et potentiellement le disque optique – entraînant une perte de vision si non traités. Cette affection est le stade le plus sévère de la rétinopathie diabétique, une complication du diabète.
Sans traitement, les conséquences peuvent inclure l’hémorragie du vitré, le décollement de la rétine et le glaucome néovasculaire, qui peuvent entraîner la cécité. Les options de traitement comme la photocoagulation au laser, les injections et la chirurgie peuvent aider à prévenir ou à réduire la perte de vision.
Délai et facteurs de risque
Le délai moyen de détection de la RDP était d’environ 11 mois après le début de la prise de tirzépatide. La plupart des patients présentaient déjà des lésions rétiniennes légères et un œdème dû au diabète.
Les patients sans antécédents de lésions rétiniennes avaient un risque plus faible de développer des complications rétiniennes. Chez ces patients, la prise de tirzépatide était associée à une réduction de 27 % des risques de développer toute forme de rétinopathie pendant le suivi.
Changements brusques de glycémie et risque oculaire
Le tirzépatide agit en mimant les hormones corporelles qui stimulent la libération d’insuline et suppriment l’appétit, entraînant des réductions significatives de la glycémie. Des recherches antérieures ont montré que des réductions rapides de la glycémie peuvent parfois déclencher une aggravation précoce de la rétinopathie diabétique, éventuellement parce que des changements soudains des niveaux de sucre dans le sang stressent les vaisseaux sanguins rétiniens fragiles.
Ce phénomène est depuis longtemps associé à un contrôle glycémique intensif, comme l’a noté le Dr Meenal Agarwal, optométriste certifiée non impliquée dans l’étude. Une réduction de la glycémie peut provoquer des changements dans le flux sanguin et perturber la barrière hémato-rétinienne, ce qui peut contribuer aux lésions rétiniennes, a-t-elle expliqué.
Bien que les patients de cette étude aient connu une baisse moyenne modeste de l’HbA1c – qui reflète la moyenne des niveaux de glucose sur les deux à trois derniers mois – d’environ 0,4 %, l’association avec une augmentation des cas de RDP (rétinopathie diabétique proliférante) suggère que la réduction rapide de la glycémie n’est peut-être pas le principal facteur de ce risque accru.

« Cela ne signifie pas pour autant qu’il faut éviter le tirzépatide chez ces patients », a ajouté le Dr Agarwal, « mais qu’il faut commencer avec une surveillance appropriée et une réduction progressive de la glycémie ».

Importance de la surveillance de la santé oculaire

Ces résultats renforcent l’importance de protocoles de suivi ophtalmologique réguliers pour les patients débutant un traitement par tirzépatide, en particulier ceux présentant déjà des lésions rétiniennes.

Les patients à qui ce médicament est prescrit doivent être informés des signes précoces d’aggravation de la rétinopathie diabétique, précise le Dr Agarwal.

Ces signes comprennent notamment :

• Des changements soudains de la vision.

• Des taches sombres ou des ombres (également appelées scotomes) dans la vision centrale ou périphérique.

• Des éclairs lumineux, pouvant indiquer une traction ou un décollement de la rétine.

• Une distorsion des lignes droites, pouvant signaler un œdème maculaire (gonflement de la macula).

Parmi les stratégies clés pour prévenir ou gérer l’aggravation de la rétinopathie chez les patients sous traitements hypoglycémiants, figurent :

• Un contrôle rigoureux de la glycémie et des lipides.

• Une réduction progressive du taux de sucre pour éviter des baisses trop rapides de l’HbA1c – en particulier chez les patients atteints d’un diabète mal contrôlé de longue date, a ajouté le Dr Agarwal.

Les chercheurs ont noté que, même si le tirzépatide offre des bénéfices importants en matière de contrôle glycémique et de prévention des complications du diabète à long terme, les cliniciens doivent peser les risques avec précaution, surtout chez les patients ayant déjà des atteintes oculaires.