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Université de Lille

L’université de Lille face à une crise budgétaire sans précédent

L'université de Lille traverse une tempête financière d'une ampleur inédite. Avec ses 80 000 étudiants, ce mastodonte de l'enseignement supérieur français annonce un déficit prévu de 44,9 millions d'euros pour 2026, soit plus du double du trou budgétaire anticipé cette année. Sur un budget total de 770 millions d'euros voté jeudi dernier, cette saignée financière marque un tournant critique pour l'établissement.

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Le ministre français de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Philippe Baptiste, quitte l'Élysée après la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, à Paris, le 10 décembre 2025.

Photo: Bertrand GUAY / AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 4 Min.

La situation est suffisamment grave pour que le rectorat prenne une décision rare : pour la première fois, il a émis un avis défavorable sur ce budget. Un signal d’alarme qui résonne dans tout le paysage universitaire français.

« On attaque la moelle » : le cri d’alarme du président

Régis Bordet, fraîchement reconduit à la présidence de l’université, ne mâche pas ses mots. « C’est une grosse alerte », confie-t-il, soulignant que ce déficit atteint un niveau « jamais atteint » auparavant. Plus inquiétant encore, il prévient : « On attaque la moelle ».
Cette formule percutante fait écho aux propos de la présidente de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, qui évoquait récemment une université française touchée jusqu’à « l’os ». Le président lillois va même plus loin en annonçant que « l’année 2026 sera une année de bascule », avec le basculement dans le rouge de trois indicateurs cruciaux : le fonds de roulement, la trésorerie et la pression de la masse salariale.

Les racines d’une crise annoncée

Cette débâcle financière ne sort pas de nulle part. Régis Bordet tire la sonnette d’alarme depuis plusieurs années déjà, pointant du doigt une accumulation de facteurs délétères. En première ligne : un patrimoine immobilier vieillissant nécessitant des rénovations coûteuses et le « choc énergétique » de 2022 qui a fait exploser les factures.
Mais le président identifie un coupable principal : les « mesures non compensées par l’État ». L’université de Lille, comme nombre de ses consœurs, subit de plein fouet le poids croissant de plusieurs charges imposées au niveau national. La contribution aux pensions, les revalorisations du point d’indice des fonctionnaires et la nouvelle protection sociale complémentaire des agents publics pèsent lourdement dans les comptes.

L’État dans le viseur

Le grief est clair : des décisions prises au sommet, des hausses de salaires et de cotisations sociales décidées nationalement, mais aucune compensation financière de l’État pour en assumer le coût. En 2023, le gouvernement avait pourtant annoncé des mesures de soutien financier aux universités. Mais ces compensations n’ont pas été reconduites en 2024 et 2025, laissant les établissements seuls face à leurs difficultés.
Face à cette impasse, Régis Bordet se veut néanmoins optimiste sur la capacité de dialogue : « On va travailler avec le ministère et le rectorat dès le premier trimestre 2026 », indique-t-il, « en espérant que tout le monde puisse tenir ses engagements ».

Des assises en urgence

La multiplication des signaux d’alarme dans les universités françaises n’est pas passée inaperçue. Le ministre de l’Enseignement supérieur a réagi en annonçant mardi soir l’organisation d’assises sur le financement des universités prévues pour janvier. Une initiative qui arrive à point nommé, alors que la question du modèle économique de l’enseignement supérieur public devient cruciale pour l’avenir du système universitaire français.
L’université de Lille, fleuron académique du Nord, cristallise ainsi les tensions qui traversent l’ensemble du secteur. Son cas pourrait bien devenir emblématique d’une crise systémique qui menace la capacité des universités françaises à assumer leurs missions fondamentales.
Avec AFP