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L’invasion de Taïwan serait prohibitive pour la Chine

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Des réservistes participent à un entraînement précombat lors du 41ᵉ exercice militaire annuel Han Kuang à Miaoli, Taïwan, le 9 juillet 2025.

Photo: Annabelle Chih/Getty Images

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Durée de lecture: 7 Min.

Alors que le dirigeant chinois Xi Jinping a ordonné à son armée de se préparer à envahir Taïwan d’ici 2027, ce scénario préoccupe de nombreux dirigeants à travers le monde.
Avec ses 1,4 milliard d’habitants face aux 23 millions de Taïwanais, et une armée forte de deux millions de soldats actifs soutenue par un budget annuel de 290 milliards de dollars — contre 169.000 militaires et 19 milliards pour Taïwan —, beaucoup estiment que la Chine écraserait rapidement l’île.
Pourtant, une analyse détaillée publiée par le Stimson Center en août 2025 dans un rapport de 36 pages intitulé « Repenser la menace : Pourquoi il est peu probable que la Chine envahisse Taïwan » démontre qu’une telle opération serait extrêmement improbable. Quatre grands facteurs y sont identifiés : le risque d’escalade, les répercussions politiques internes, les conséquences économiques et les difficultés opérationnelles. Chacun de ces éléments suffirait à faire réfléchir Xi Jinping. Concentrons‑nous ici sur la dimension opérationnelle, véritable cauchemar stratégique.
Selon le Stimson Center, « une campagne militaire visant à conquérir Taïwan serait la plus vaste et la plus complexe de toute l’histoire, plus encore que le débarquement de Normandie en 1944 ».
Le détroit de Taïwan, large de 160 kilomètres, demeure une barrière redoutable, tandis que son littoral accidenté complique tout débarquement. Comme la guerre entre la Russie et l’Ukraine l’a rappelé, même une rivière étroite constitue un obstacle majeur pour des forces offensives ; alors, que dire d’un détroit aussi vaste ?
Même si Taïwan bénéficie de solides atouts naturels, la Chine conserve une supériorité écrasante en effectifs, en capacité industrielle, en puissance aérienne et navale. L’armée de l’air et la marine taïwanaises ne pourraient probablement jouer qu’un rôle limité dans la défense nationale.
Une étude du Rand Corporation datant de 2016 estimait que les avions de chasse taïwanais, même abrités dans des bunkers, seraient inutiles si leurs pistes étaient détruites, et recommandait d’investir plutôt dans des systèmes de défense antiaérienne mobiles et dissimulables. Ces unités ne devraient pas tenter d’intercepter la masse de missiles chinois, mais constituer une menace dissuasive pour les appareils habités de l’adversaire.
Un document du Center for Strategic and International Studies, publié en janvier 2023 et fondé sur plusieurs simulations, reconnaît que la densité de tir chinoise rendrait quasi inopérantes les forces navales et aériennes de Taïwan. Toutefois, il précise que les forces terrestres deviendraient déterminantes dans l’issue du conflit.
Les sous-marins taïwanais constitueront néanmoins une sérieuse épine dans le pied de la Chine. Comme le souligne un rapport du War Zone, ces bâtiments sont particulièrement difficiles à contrer : la mise en service prévue de trois sous-marins d’attaque diesel‑électriques en 2026 pourrait s’avérer cruciale. Si les États‑Unis y ajoutaient leurs propres sous-marins, les chances de succès d’une invasion chuteraient encore ; mais rien ne garantit que Washington intervienne militairement, hypothèse que cette analyse écarte.
Quoi qu’il en soit, entre ses défenses naturelles, son terrain montagneux, son peuple attaché à la démocratie et sa capacité à produire massivement des drones, Taïwan reste une forteresse difficile à conquérir.

Un franchissement périlleux

Toute tentative de traversée du détroit exposerait les navires chinois à une avalanche de missiles antinavires, de drones aériens, maritimes et sous‑marins, de mines et de torpilles — autant d’armes destinées à transformer la zone en un « fossé bouillonnant » hérissé d’« alligators » métaphoriques. Mais franchir le détroit ne serait que le début des difficultés.
Les troupes chinoises débarquées affronteraient des centaines de milliers de soldats taïwanais dans un environnement qui est, selon certains analystes, « le rêve d’un défenseur et le cauchemar d’un envahisseur ».

Un terrain défensif redoutable

Plus de 70 % du territoire taïwanais est montagneux, percé d’un vaste réseau de tunnels et d’abris souterrains. Ses reliefs escarpés, ses forêts denses et ses nœuds urbains offriraient autant de zones de résistance où les 169.000 militaires actifs et quelque 760.000 réservistes pourraient ralentir ou repousser les troupes de l’Armée populaire de libération.
Même conserver des têtes de pont serait pour la Chine un combat quotidien. Le défi logistique — maintenir à flot les navires chargés d’acheminer des millions de tonnes de ravitaillement vers les troupes — paraît presque insurmontable. Les leçons de la guerre en Ukraine, où les lignes d’approvisionnement ont souvent été ciblées, illustrent ce risque.
Taïwan compte au total environ 1,66 million de réservistes : 760.000 ont récemment servi et pourraient être mobilisés rapidement, tandis que les 900.000 restants seraient rappelés par étapes. Ces forces, déjà stationnées sur place, bénéficieraient d’une logistique beaucoup plus aisée que les assaillants dépendant d’une flotte exposée.
En parallèle, de nombreux civils se disent prêts à s’engager en cas d’invasion, soutenus par la politique de « résilience défensive de toute la société ». L’essor de formations privées en maniement des armes, largement suivies, traduit cette préparation populaire à un conflit total.

Une détermination civile décisive

Certes, ces volontaires manqueraient d’expérience initialement, mais la guerre d’Ukraine a démontré qu’une population motivée, disposant de positions fortifiées et appuyée par l’artillerie et les drones, peut infliger des pertes majeures à un envahisseur.
Combinées à ses avantages naturels et à ses infrastructures de défense, ces capacités pourraient faire de Taïwan l’un des bastions les plus redoutables du monde.
La Chine, forte de sa puissance industrielle et militaire, pourrait théoriquement l’emporter au prix de lourds sacrifices. Mais le jeu en vaudrait‑il la chandelle ?
En cas d’invasion, les forces taïwanaises détruiraient sans doute leurs précieuses usines de semi‑conducteurs — ces installations de plusieurs milliards de dollars qui produisent la majorité des puces électroniques avancées de la planète.
Entre le coût humain, les sanctions économiques, la dévastation de l’île et la destruction probable de ce qui la rend précieuse, le calcul politique tourne nettement en défaveur de Pékin. Une invasion paraît dès lors, sinon impossible, du moins hautement improbable.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Mike Fredenburg écrit sur la technologie militaire et les questions de défense, en mettant l'accent sur la réforme de la défense. M. Fredenburg est titulaire d'une licence en génie mécanique et d'une maîtrise en gestion des opérations de production.

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