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Le plan de paix en 28 points de Donald Trump pour l’Ukraine suscite l’attention des dirigeants européens et des législateurs américains
La Maison-Blanche présente ce cadre comme une formule « gagnant-gagnant », tandis que des dirigeants européens réclament des révisions et une concertation plus étroite avec les partenaires.

Un homme se tient dans un appartement détruit après une frappe aérienne russe à Kyiv, en Ukraine, le 14 novembre 2025.
Photo: Oleksii Filippov/AFP via Getty Images
Des dirigeants européens et plusieurs parlementaires américains ont durci le ton ce week-end à l’égard de la proposition de paix en 28 points pour l’Ukraine présentée par le président Donald Trump, que la Maison-Blanche décrit comme une feuille de route pragmatique destinée à mettre fin à près de quatre années de guerre et à instaurer un cadre de sécurité « gagnant-gagnant » pour toutes les parties.
Selon l’exécutif américain, le plan offrirait de solides garanties de sécurité et de larges incitations économiques dans lesquelles la Russie comme l’Ukraine « gagnent plus qu’elles ne doivent céder », tandis que Kiev et plusieurs partenaires occidentaux clés estiment qu’il risque de contraindre l’Ukraine à des concessions majeures, d’amoindrir ses capacités de défense et de récompenser l’agression russe.
Dans une déclaration commune publiée lors du sommet du G20 en Afrique du Sud, le 22 novembre, les dirigeants des institutions de l’Union européenne (UE), ainsi que la France, l’Allemagne, la Pologne, le Royaume-Uni et d’autres pays ont jugé que le projet « contient des éléments importants qui seront essentiels pour une paix juste et durable », tout en le qualifiant de « base qui nécessitera un travail supplémentaire ».
« Nous réaffirmons clairement le principe selon lequel les frontières ne peuvent pas être modifiées par la force », indiquent-ils, en soulignant que des limitations imposées aux forces armées ukrainiennes « laisseraient l’Ukraine vulnérable à de futures attaques ».
Un groupe bipartisan de parlementaires américains – parmi lesquels les sénateurs Jeanne Shaheen (démocrate, New Hampshire), Thom Tillis (républicain, Caroline du Nord) et Chris Coons (démocrate, Delaware) – a fait part de « vives préoccupations » au sujet de ce plan, estimant, dans une déclaration conjointe datée du 22 novembre, qu’« enchaîner les concessions à Vladimir Poutine » risque de porter un coup fatal aux capacités de défense de l’Ukraine.
Le représentant républicain Don Bacon (Nebraska) a comparé la proposition à la politique d’apaisement d’avant la Seconde Guerre mondiale. « Cela ressemble à Munich en 1938 », a-t-il écrit sur X, en référence à la stratégie consistant à céder des territoires à l’Allemagne nazie, ce qui avait encouragé Adolf Hitler à envahir d’autres pays européens.
Le président russe Vladimir Poutine, à l’inverse, a accueilli favorablement le projet, le qualifiant de possible « base pour un règlement pacifique définitif », tout en précisant que Moscou a pris connaissance du plan mais n’en a pas encore discuté en détail avec Washington.
Donald Trump a déclaré aux journalistes, le 22 novembre, que, si la proposition ne constitue pas son offre finale, il est déterminé à mettre un terme au conflit.
« Non, ce n’est pas mon offre finale », a répondu le président américain à une question d’un journaliste. « Nous voulons parvenir à la paix… cela aurait dû se produire il y a longtemps. »
« Nous essayons d’y mettre fin. D’une manière ou d’une autre, il faut y mettre fin. »
La Maison-Blanche défend un cadre « gagnant-gagnant »
Selon les projets de proposition élaborés par l’envoyé spécial pour les missions de paix, Steve Witkoff, et par le secrétaire d’État, Marco Rubio, l’Ukraine devrait céder la Crimée, le Donetsk et le Louhansk, geler les lignes de front dans les régions de Kherson et de Zaporijjia, renoncer définitivement à toute adhésion à l’OTAN et plafonner ses forces armées à 600.000 soldats. En contrepartie, les sanctions contre la Russie seraient levées par étapes et Moscou serait progressivement réintégré dans l’économie mondiale, avec, à terme, un retour au format du G8.
La porte-parole de la Maison-Blanche, Karoline Leavitt, a indiqué dans un courriel adressé au média Epoch Times que ce cadre vise à garantir « la pleine sécurité et la dissuasion pour l’Ukraine, l’Europe et la Russie afin d’assurer la fin de la guerre » et à offrir « des opportunités financières pour la reconstruction de l’Ukraine et pour la réintégration de la Russie dans l’économie mondiale, au bénéfice des populations des deux pays ».
« Ce plan a été conçu pour tenir compte des réalités du terrain après des années d’un conflit dévastateur, et pour trouver le meilleur scénario gagnant-gagnant, dans lequel chaque partie obtient plus qu’elle ne cède », a-t-elle ajouté.
Un haut responsable américain a précisé à Epoch Times que le document avait été rédigé à l’issue de discussions avec Rustem Oumerov, l’un des principaux conseillers du président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui aurait donné son accord à la majorité des points avant de les présenter au chef de l’État. M. Oumerov a indiqué ne pas disposer du mandat nécessaire pour approuver quelque accord que ce soit, tout en reconnaissant la poursuite des consultations.
« L’Ukraine étudie avec attention chaque proposition de ses partenaires et expose clairement sa propre position », a déclaré M. Oumerov dans un communiqué publié sur Telegram, citant une traduction de son message. « Aucune décision n’existe – ni ne peut exister – en dehors du cadre de notre souveraineté, de la sécurité de notre population et de nos lignes rouges. »
L’Europe salue l’initiative, mais réclame des ajustements
Les capitales européennes, largement écartées des premières négociations, ont contesté les volets territoriaux et militaires du projet tout en affirmant leur volonté de poursuivre les discussions avec Kiev et Washington afin de parvenir à un accord final garantissant une paix « durable ».
Dans leur déclaration commune au sommet du G20 à Johannesburg, les dirigeants européens soulignent qu’aucun élément du plan Trump concernant l’UE ou l’OTAN ne pourra s’appliquer sans l’aval préalable des États membres concernés et réaffirment leur soutien total à l’Ukraine, en annonçant qu’ils « continueront à se coordonner étroitement avec Kiev et avec les États-Unis dans les prochains jours ».
Le président français Emmanuel Macron a expliqué devant la presse que la proposition de l’administration Trump « reprend des idées déjà connues » et consacre des principes essentiels en matière de souveraineté et de garanties de sécurité, tout en regrettant que ce plan « n’ait pas été négocié avec les Européens » alors même qu’il leur assigne des obligations.
« Beaucoup de choses ne peuvent pas relever d’une simple initiative américaine », a insisté Emmanuel Macron. « Les avoirs gelés sont détenus par les Européens. L’intégration européenne de l’Ukraine est du ressort des Européens… Et le fonctionnement de l’OTAN dépend des États membres de l’Alliance. »
Le Premier ministre britannique Keir Starmer a tenu un discours similaire à Johannesburg, soulignant que « toutes les questions concernant l’Ukraine doivent, en dernier ressort, être tranchées par l’Ukraine elle-même » et qu’aucune paix durable ne sera possible sans « véritables garanties de sécurité ».
Le chancelier allemand Friedrich Merz a indiqué avoir rappelé directement cette position européenne à Donald Trump lors d’un long entretien téléphonique, juste avant son départ pour le G20, en insistant sur la nécessité de prendre en compte les besoins de sécurité de l’Ukraine et les précédentes violations de traité par la Russie. M. Merz affirme avoir souligné que Moscou avait déjà rompu ses engagements au titre du mémorandum de Budapest.
« À l’époque, l’Ukraine avait renoncé à un important arsenal, notamment nucléaire, en échange de l’engagement de la Russie à respecter durablement l’intégrité territoriale du pays », a rappelé le chancelier. « La Russie n’a pas honoré cette promesse. »
La cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, a rappelé devant les journalistes, à Bruxelles, que l’UE a « toujours soutenu une paix juste, durable et globale », en précisant que l’objectif du bloc reste d’affaiblir les capacités de nuisance de la Russie tout en renforçant l’Ukraine.
« Notre ligne n’a pas changé. Pour qu’un plan de paix aboutisse, il doit être approuvé par l’Ukraine et par l’Europe », a-t-elle déclaré.
En réaction à ce plan, Volodymyr Zelensky a affirmé que l’Ukraine traverse « l’un des moments les plus difficiles de [son] histoire », décrivant des pressions sans précédent pour l’amener à accepter des termes qu’il a déjà rejetés à plusieurs reprises.
« Soit la perte de la dignité, soit le risque de perdre un partenaire clé », a-t-il résumé, le 21 novembre, dans une allocution à la nation. « Nous ferons – et nous devons faire – tout ce qui est nécessaire pour que, au bout du compte, la guerre prenne fin, mais que l’Ukraine ne disparaisse pas. »
Des négociateurs ukrainiens, américains, britanniques, français et allemands doivent se retrouver dimanche à Genève, en Suisse, alors que les capitales européennes préparent des contre-propositions et que Kiev cherche une formule de paix que Volodymyr Zelensky présente comme « fondée sur des garanties de sécurité et sur la justice ».
« Dans les prochains jours, des consultations auront lieu avec nos partenaires sur les étapes nécessaires pour mettre fin à la guerre », a déclaré le président ukrainien dans son allocution du 22 novembre. « Nos représentants savent comment défendre les intérêts nationaux de l’Ukraine et exactement ce qu’il faut faire pour empêcher la Russie de lancer une troisième invasion, une nouvelle offensive contre notre pays. »

Tom possède une vaste expérience du journalisme, de l'assurance-dépôts, du marketing et de la communication, ainsi que de l'éducation des adultes. Le meilleur conseil en écriture qu’il ait jamais écouté est celui de Roy Peter Clark : « Atteignez d'abord votre objectif » et « gardez le meilleur pour la fin ».
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