Le Japon affirme, dans une lettre à l’ONU, que les propos de la Première ministre Takaichi sur Taïwan ont été déformés par Pékin
« Nous ne pouvons pas accepter ce que dit la Chine », a déclaré le principal porte parole du gouvernement japonais.
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Kazuyuki Yamazaki, représentant permanent du Japon auprès des Nations unies, s’exprime lors d’une séance du Conseil de sécurité sur l’intelligence artificielle au siège de l’ONU, à New York, le 19 décembre 2024.
L’ambassadeur du Japon auprès des Nations unies a rejeté l’interprétation par Pékin des récents propos de la Première ministre japonaise Sanae Takaichi au sujet de Taïwan, qualifiant les affirmations du régime chinois de « contraires aux faits » dans une lettre datée du 24 novembre adressée à l’ONU.
« L’affirmation de la Chine selon laquelle le Japon exercerait son droit à l’autodéfense même en l’absence d’attaque armée est erronée », écrit l’ambassadeur Kazuyuki Yamazaki dans une lettre adressée au secrétaire général de l’ONU, António Guterres.
Cette prise de position intervient alors que le Parti communiste chinois (PCC) accentue la pression diplomatique et les représailles économiques contre le Japon, exigeant le retrait des déclarations de Mme Takaichi sur Taïwan, démocratie autogérée que le PCC considère comme une province sécessionniste devant être reprise, au besoin par la force.
Mme Takaichi avait évoqué la possibilité théorique d’un blocus maritime de Taïwan, située à un peu plus de 100 km des côtes japonaises, en déclarant, le 7 novembre, qu’un tel scénario pourrait être qualifié de « situation menaçant la survie » du Japon. Elle avait recouru à un terme juridique permettant au pays de mobiliser ses Forces d’autodéfense.
Dans une lettre datée du 21 novembre et adressée à M. Guterres, l’ambassadeur chinois auprès de l’ONU, Fu Cong, affirmait que les propos de Mme Takaichi constituaient « la première menace de recours à la force émise par le Japon contre la Chine » depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, selon un communiqué publié sur le site de la mission chinoise à l’ONU.
En réponse, le diplomate japonais rappelle, dans sa lettre, que la doctrine de défense fondamentale de Tokyo repose sur une « posture de défense passive, exclusivement défensive, à l’opposé de ce que prétend la partie chinoise ».
Sans nommer explicitement le PCC, M. Yamazaki exprime l’opposition de Tokyo aux tentatives de certains États de modifier unilatéralement le statu quo par la force ou la coercition.
« La paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan sont extrêmement importantes, non seulement pour le Japon, mais aussi pour la stabilité de l’ensemble de la communauté internationale », écrit‑il. « Nous réaffirmons notre position constante : nous attendons que les questions relatives à Taïwan soient réglées pacifiquement, par le dialogue. »
Un employé dans un supermarché de produits japonais à Pékin, le 19 novembre 2025. (Pedro Pardo/AFP via Getty Images)
Le diplomate critique également le récent avertissement lancé par le PCC contre les voyages et les études au Japon, ainsi que les menaces de blocage des importations de produits de la mer japonais.
« Ce recours à des mesures coercitives contre les déclarations et les politiques d’autres pays, au seul motif qu’elles ne correspondent pas à ses propres intentions, est une approche à laquelle la communauté internationale devrait s’opposer », souligne M. Yamazaki dans sa lettre, ajoutant que le Japon continuera de « répondre avec sang‑froid, par le dialogue ».
Le principal porte‑parole du gouvernement japonais a, lui aussi, vivement critiqué la lettre du diplomate chinois à M. Guterres, lors d’un point de presse ultérieur à Tokyo.
« La position de la Chine ne repose pas sur les faits et, par conséquent, nous ne pouvons pas accepter ce qu’elle affirme. Le gouvernement japonais doit faire connaître ce que fait la Chine », a déclaré le secrétaire général du Cabinet, Kihara Minoru, lors d’une conférence de presse régulière, le 25 novembre, selon la traduction officielle.
Lors d’un point presse tenu plus tard dans la journée à Pékin, Mao Ning, porte‑parole du ministère chinois des Affaires étrangères, a réitéré la demande du régime visant à obtenir de Mme Takaichi qu’elle retire ses propos sur Taïwan, alors qu’on l’interrogeait sur le gel de l’agrément de films japonais et l’annulation de plus d’une douzaine de concerts d’artistes nippons en Chine.
Le 24 novembre, le dirigeant du PCC, Xi Jinping, a déclaré au président américain Donald Trump que la « réunification » de Taïwan constituait un élément central de la vision du régime pour l’ordre mondial d’après‑guerre, selon le compte rendu de l’entretien publié par le ministère chinois des Affaires étrangères.
Le régime communiste chinois n’a, de son histoire, jamais exercé sa souveraineté sur Taïwan.
Après l’appel, Donald Trump a indiqué sur les réseaux sociaux qu’il avait évoqué avec Xi une série de sujets, parmi lesquels les achats chinois de soja américain et la guerre entre la Russie et l’Ukraine, sans toutefois mentionner Taïwan.
La Première ministre japonaise Sanae Takaichi répond aux questions de la presse au sujet de son entretien téléphonique avec le président américain Donald Trump, à la Primature, à Tokyo, le 25 novembre 2025. (JIJI Press/AFP via Getty Images)
Quelques heures après ses échanges avec M. Xi, Donald Trump s’est entretenu par téléphone avec Mme Takaichi, réaffirmant que Washington continuerait de coopérer étroitement avec Tokyo dans le contexte international actuel, selon le compte rendu publié par le ministère japonais des Affaires étrangères.
Ce compte rendu précise que Donald Trump a indiqué à Mme Takaichi qu’il serait disposé à recevoir ses appels « à tout moment ».
Ni Donald Trump ni la Maison‑Blanche n’avaient commenté l’appel avec la Première ministre japonaise au moment de la publication de l’article.