L’ancien Premier ministre espagnol Zapatero promeut la technologie chinoise à double usage - militaire et civil - en contraste flagrant avec l’UE

L'ancien Premier ministre espagnol José Luis Rodríguez Zapatero sur une photo d'archive
Photo: Eduardo Parra/Getty Images
Au cours de la semaine du 22 septembre, José Luis Rodríguez Zapatero, ancien président du gouvernement espagnol, s’est rendu en Chine pour l’inauguration de la Nanjing Golden Autumn Economic and Trade Fair (« Foire économique et commerciale Automne doré de Nanjing ») et, presque parallèlement, il est intervenu lors d’un forum sino-européen à Madrid.
Il a été vu au premier rang aux côtés de hauts responsables du Parti communiste chinois (PCC), lors d’une réunion visant à accélérer ses projets dans les domaines de l’intelligence artificielle, des semi-conducteurs, des véhicules électriques et de la biotechnologie, secteurs dans lesquels abondent les rapports sur l’espionnage industriel, le double usage militaire et les cyberattaques attribués au régime totalitaire chinois.
« José Luis Rodríguez Zapatero, ancien président du gouvernement espagnol et président du Conseil de coopération économique et de développement Chine-Europe, a prononcé le discours de la cérémonie d’inauguration », a indiqué le site officiel du gouvernement du Jiangsu, désignant l’ancien Premier ministre comme occupant un poste de direction qui n’est pas enregistré dans l’architecture institutionnelle européenne.
M. Zapatero a partagé la scène avec le secrétaire du Comité municipal du PCC à Nanjing, Zhou Hongbo, qui a souligné la feuille de route de Nanjing — innovation, culture, centre logistique et internationalisation — lors d’un événement qui a présenté les plans de 51 projets industriels, avec un investissement total prévu de 80,22 milliards de yuans (9,6 milliards d’euros).
La présence de l’ancien Premier ministre à la Foire économique et commerciale de Nanjing 2025, inaugurée le 23 septembre, a été considérée par ses détracteurs comme un mouvement de lobbying en faveur de ces plans d’affaires dans les secteurs technologiques stratégiques où les micropuces et l’IA jouent un rôle crucial, et qui sont en conflit avec les États-Unis et l’Union européenne. Nanjing sert de vitrine et d’incubateur pour les grandes opérations liées au plan « Made in China 2025 ».
Grâce à sa stratégie, une politique industrielle ambitieuse lancée en 2015, la Chine a renforcé sa capacité à produire de manière indépendante des semi-conducteurs, des batteries et d’autres composants à double usage, avec « un investissement public à grande échelle dans le développement de technologies militaires ». Ses batteries avancées, pierre angulaire de la production de véhicules électriques, confèrent aux drones une vitesse, une portée et des capacités de furtivité accrues. « DJI, une entreprise spécialisée dans les drones et l’IA, contrôle plus de 90 % du marché mondial des drones grand public depuis juin 2024 », selon l’Institut d’études de sécurité de l’UE (EUISS).
La décision de savoir avec qui et comment gérer l’IA, qui englobe Internet, les satellites, les câbles sous-marins et de nombreux autres composants, peut déterminer la sécurité, l’économie et les libertés civiles d’un pays — la différence entre un monde démocratique ou autoritaire, selon une analyse. Les progrès comprennent des capacités qui ne sont pas toujours visibles, telles que l’accès à des données ayant des implications directes pour la sécurité des pays.
Dans le domaine de la biotechnologie, le transfert de technologies sensibles vers la Chine suscite des inquiétudes en raison de la fabrication potentielle de « matériaux synthétiques d’inspiration biologique et, éventuellement, d’armes biologiques ».
« Permettre aux rivaux de l’Europe de prendre l’initiative augmente les vulnérabilités en matière de sécurité et risque d’éroder davantage la compétitivité mondiale de l’UE », prévient l’EUISS.
« Il faut être particulièrement vigilant face à l’achat de volontés [d’engagements] », a déclaré le 8 juillet le député européen espagnol Herman Tertsch, lors d’un débat au Parlement européen. « Nous connaissons la capacité de corruption du régime chinois […] La Chine est toujours une menace : dans l’essence totalitaire de son régime réside la volonté de s’imposer et de nous phagocyter comme elle le fait avec des pays sur d’autres continents ».
Selon lui, la Chine devrait savoir que « nous voulons des relations sobres et correctes dans la réciprocité », mais « les diplomates chinois osent menacer et intimider les députés du Parlement européen, dans cette enceinte », afin de faire avancer leur programme et « n’aiment pas que l’on défende les droits de l’homme et la liberté en Chine ».
Selon des sources américaines spécialisées dans la cyberdéfense, le PCC n’est plus seulement perçu comme un acteur de l’espionnage industriel, mais comme la principale menace cybernétique, capable non seulement d’espionner, mais aussi de saboter des infrastructures critiques, a rapporté Epoch Times en août 2025.
Ce n’est pas un fait isolé
Le voyage de M. Zapatero et ses contacts avec le PCC ne sont pas un cas isolé. Il a été précédé par d’autres rencontres, comme celle de 2024 à Pékin avec Yin Li, secrétaire du Comité municipal du PCC dans la capitale chinoise, et avec Ma Hui, vice-ministre du Département international du Comité central. M. Ma a félicité M. Zapatero pour son « engagement ferme » envers la Chine, consolidant ainsi une relation politique qui se concrétisait désormais à Nanjing.
Ce dernier voyage s’inscrit dans le cadre des activités du Gate Center, une plateforme créée en 2022 dont M. Zapatero est le président du conseil consultatif, et qui se décrit comme un centre d’influence favorable à la Chine. Son site web rend compte de ses contacts avec Wang Chao, président de la CPIFA, une institution civile alignée sur l’État chinois, fondée en 1949 après la proclamation de la République populaire et s’inscrivant dans le cadre d’un régime à parti unique, le PCC.
La CPIFA se considère comme un organisme dédié à la diplomatie populaire et, selon diverses analyses, elle a servi à légitimer internationalement le nouveau gouvernement, à contrer l’isolement diplomatique initial de la RPC (République populaire de Chine) et à éroder la reconnaissance de la République de Chine, établie à Taïwan.
Après la création du Gate Center, M. Zapatero s’est rendu à Pékin en 2023 pour rencontrer Liu Jianchao, ministre du Département des relations extérieures du Comité central du Parti communiste chinois (PCC), puis en août 2024, Liu Qibao, vice-président du 13e Comité national de la Conférence consultative politique du peuple chinois (CCPPC). M. Qibao a salué la visite de M. Zapatero en Chine et a reconnu ses efforts pour renforcer les relations avec la Chine.
Le Gate Center se définit comme une plateforme qui fait connaître « les tendances […] dans l’économie, les changements sociaux, la technologie et leur impact sur l’ordre politique international ».
Miguel Sebastián, ancien ministre socialiste de l’Industrie (2008-2011) et coordinateur académique du Gate Center, a donné le ton du centre le 7 février 2023 :
« Il est clair que la tendance est à ce que la Chine dépasse les États-Unis sur le plan économique. Et sur le plan technologique, nous étudions cette possible remontée ».
Le 15 mai 2020, lors d’un événement organisé par le Grupo de Puebla, un forum réunissant les leaders de la gauche progressiste d’Amérique latine, M. Zapatero a déclaré : « Nous devons faire en sorte que la Chine, et si possible l’Union européenne, mettent les États-Unis dans une situation impossible ». Son intervention s’inscrivait dans le contexte de la pandémie, qui a particulièrement touché les États-Unis.
« Zapatero veut que l’Espagne s’allie à la Chine et à Maduro pour faire la guerre aux États-Unis. Je pense que nous devrions commencer à envisager de nous allier aux États-Unis afin que Zapatero, son héritier et quelques autres finissent par purger leur peine vêtus d’orange comme Noriega », a déclaré M. Tertsch.
Le conseil d’administration du Gate Center comprend Daniel Romero-Abreu Kaup, président du centre, et Feng Yi Zhang, président du Gate Center Asia, basé à Pékin, membre de l’organisation des Jeunes leaders de Shanghai. Le Gate Center est géré par Thinking Heads (« Têtes pensantes »), fondé par M. Romero-Abreu en 2003.
En février, El Economista a souligné que Thinking Heads réalisait un chiffre d’affaires de près de 6 millions d’euros et qu’en 2022, selon les comptes déposés au registre du commerce, ses revenus avaient augmenté de 30 %, précisément l’année où le Gate Center a été créé et où M. Zapatero est apparu.
Il a également rapporté, en citant El Confidencial, que pour lancer le Gate Center, ils auraient bénéficié du soutien financier et des contacts de « l’homme d’affaires chinois Fanyong Du, alias Miguel Duch, à qui le CNI a même refusé la nationalité espagnole en raison de ses liens avec les services de renseignement de Pékin ».
Le contraste avec la ligne de Bruxelles
La participation de M. Zapatero à Nanjing a été interprétée en Chine comme un soutien politique renforçant l’idée que « l’Europe reste ouverte à la Chine ».
Ce clin d’œil contraste avec les avertissements de Bruxelles, dont l’objectif dans ses relations avec Pékin est de réduire les dépendances et les vulnérabilités dans les chaînes d’approvisionnement, les technologies critiques et le contrôle des données. C’est la ligne qui guide aujourd’hui le paquet de sécurité économique.
Ursula von der Leyen soutient que « l’Union européenne doit définir ses futures relations avec la Chine et d’autres pays dans des domaines sensibles de haute technologie tels que la microélectronique, l’informatique quantique, la robotique, l’intelligence artificielle, la biotechnologie […] ».
« Lorsque des fins à double usage ne peuvent être exclues ou que les droits de l’homme risquent d’être affectés, il convient d’établir clairement si les investissements ou les exportations servent nos propres intérêts en matière de sécurité. »
En janvier 2024, la Commission a lancé le paquet « Sécurité économique », qui comprend de nouveaux outils pour protéger les connaissances et la R&D européennes (sécurité de la recherche, contrôles à l’exportation et révision du cadre d’investissement).
En 2025, Bruxelles a recommandé aux États membres d’examiner les investissements sortants des entreprises de l’UE dans les secteurs stratégiques.
Le Forum sino-européen de Madrid

(De g. à dr.) Le dirigeant chinois Hu Jintao trinque avec la reine Sofia d’Espagne, le Premier ministre José Luis Rodriguez Zapatero et la princesse Cristina d’Espagne lors d’un dîner de gala au Palais royal de Madrid, le 14 novembre 2005. Hu Jintao s’est rendu en Espagne pour une visite d’État de deux jours. (AFP PHOTO/POOL/Alberto Martin via Getty Images)
Après son escale à Nanjing, M. Zapatero est retourné en Espagne et, le 25 septembre, l’ancien président du gouvernement espagnol a participé à Madrid à l’événement China-Europe Talent Forum, reliant sa présence en Chine à un événement sur le territoire européen, projetant le même programme de rapprochement et où Li Chenglin (en vidéo), membre du Comité permanent du PCC et chef du département de l’organisation du PCC au niveau du comité municipal, a marqué sa présence.
L’objectif de M. Zapatero était « d’ouvrir un canal stable de coopération en matière de talents et d’intelligence artificielle entre la Chine et l’Europe », selon les autorités chinoises. La réunion, co-organisée par The Adecco Group et le Beijing Talent Work Bureau, s’est tenue au Mandarin Oriental Ritz et avait pour thème « partage, coexistence et gagnant-gagnant » à l’ère de l’IA.
Dans l’auditorium, M. Zapatero est intervenu avec un message visant à transformer l’IA en « intelligence civique », et M. Chenglin a souligné que « l’IA est une force qui change la façon dont les gens produisent et vivent. Face à cette situation, le mieux est de [s’]unir ».

Journaliste et rédactrice. Elle a étudié trois ans et demi en médecine à l'Université du Chili, en plus de faire de la musique au conservatoire Rosita Renard et au piano à la Suzuki Method School. Après avoir participé à un cours d'écriture créative en Italie, elle a étudié et pratiqué le journalisme à Epoch Times.
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