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La magie de Shakespeare en douze minutes de musique

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Le 31 mars 2013, le Théâtre Mariinsky de Moscou présentait une adaptation chorégraphique du chef-d’œuvre de Felix Mendelssohn, offrant au public la poésie de Shakespeare sublimée par la musique et la danse.

Photo: Crédit photo Sergey Petrov/Shutterstock

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Durée de lecture: 4 Min.

À 17 ans à peine, Felix Mendelssohn découvrait Le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare. Subjugué par la fantaisie et la poésie de cette comédie, il s’est installé au piano et a composé, en une douzaine de minutes, une ouverture orchestrale qui restitue toute la magie, la confusion, l’hilarité et la folie amoureuse de l’univers shakespearien.

Ceci a été l’acte inaugural d’une carrière fulgurante qui allait inscrire le jeune prodige au panthéon des plus grands compositeurs du XIXᵉ siècle, aux côtés de ses contemporains Schumann, Chopin ou Berlioz. Le futur musicologue George Grove qualifiera cette page d’« incomparable prodige de jeunesse, le plus grand que la musique ait jamais connu ».

Shakespeare et la musique, un dialogue fécond

Si Shakespeare a inspiré de nombreux opéras — Verdi à lui seul signa un triptyque inoubliable avec Macbeth, Otello et Falstaff —, les compositions purement orchestrales issues de son théâtre se révèlent étonnamment moins abondantes. Le répertoire retient surtout deux Roméo et Juliette : l’ouverture dramatique de Tchaïkovski et le ballet de Prokofiev. Plus discret demeure le grand projet de Berlioz, sa symphonie chorale Roméo et Juliette.

C’est Mendelssohn qui, avec son Songe d’une nuit d’été, a su donner à la musique instrumentale le pouvoir d’incarner l’univers shakespearien.

Une œuvre en expansion

Car le compositeur ne s’est pas arrêté à cette ouverture. Vingt-cinq ans plus tard, il ajoutait quarante minutes de musique destinées à accompagner une représentation scénique complète. De cet ensemble est née une suite dont la célèbre Marche nuptiale est devenue un incontournable des cérémonies comme des productions théâtrales.

Pourtant, l’Ouverture du Songe d’une nuit d’été jouée seule conserve une aura particulière. Sans paroles, elle parvient à donner vie aux personnages : l’agitation légère des violons évoque les fées de Titania, un braiement grotesque de cuivres et de bois figure la métamorphose de Bottom en âne sous l’espièglerie de Puck. L’intrigue entière ne saurait bien sûr se condenser en musique, mais l’esprit de la comédie féerique de Shakespeare, son humour et sa légèreté, y vibrent avec évidence.
C’est dans cet esprit que l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam a donné sa propre interprétation de l’œuvre. (Écoutez)

Une architecture musicale exemplaire

La partition s’ouvre par quatre accords des bois, établissant la tonalité de mi majeur. À 0’28, les violons lancent leur danse féerique en mi mineur : premier thème d’une sonate admirablement construite. Ce schéma classique présente plusieurs thèmes, les développe — en les variant ou en les amplifiant — avant de les reprendre sous une forme transformée.

À 1’16, une transition annonce la cour royale d’Athènes, puis, à 2’15, surgit le thème de l’amour. Un crescendo dramatique mène à 3’15 au braiement du malheureux Bottom. Les cors de chasse clôturent la première section, avant que les cordes féeriques ne reprennent le fil à 4’01, ouvrant le développement.

La récapitulation, annoncée à 6’23 par le retour des accords initiaux, met l’accent sur la musique amoureuse, même si Bottom vient encore troubler la sérénité à 8’20. Enfin, à 10’48, le thème de la cour se dissout dans un voile sonore assoupi, comme bercé par l’enchantement. Les quatre accords d’ouverture résonnent une dernière fois : la boucle est bouclée, et la magie intacte.