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Redécouvrir la lumière oubliée du Moyen Âge

Peintures, mosaïques et vitraux : loin de la grisaille qui hante notre imaginaire, l’art médiéval baignait dans la lumière. Les chercheurs restituent aujourd’hui sa splendeur oubliée.

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L'intérieur de la Sainte-Chapelle, une chapelle gothique à Paris.

Photo: Domaine public

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Durée de lecture: 5 Min.

L’imaginaire collectif associe volontiers le Moyen Âge à une époque obscure, marquée par la misère, la maladie et la saleté. Du cinéma à la littérature, l’image d’un monde sinistre s’est imposée. On la retrouve dans Le Nom de la rose, roman et film où les bâtiments se dressent froids et austères, ou encore dans Game of Thrones, dont l’univers fictif, largement inspiré du médiéval, baigne dans la guerre, la violence et la mort. Même la série Les Piliers de la Terre reprend cette esthétique d’édifices romans sévères et rugueux, avec leurs murs de pierre nue et leurs palais glacés. Le Moyen Âge semble condamné à la grisaille et à la boue.

Image extraite du film Le Nom de la rose, adaptation cinématographique par Jean-Jacques Annaud du roman d’Umberto Eco. (IMDB)

Pourtant, depuis plusieurs décennies, les travaux des médiévistes, appuyés sur de nouvelles techniques de reconstitution numérique, bousculent cette vision stéréotypée. L’étude des sources écrites, archéologiques et matérielles révèle une tout autre réalité : celle d’un monde éclatant de couleurs et de lumière.

Un autre regard sur le Moyen Âge

La plupart des spécialistes situent l’émergence de l’art et de l’architecture médiévaux au IVᵉ siècle. Les bâtiments parvenus jusqu’à nous sont souvent altérés, voire en ruine, mais les chercheurs parviennent peu à peu à en restituer l’aspect d’origine. C’est le cas de l’ancienne basilique Saint-Pierre, à Rome, édifiée par l’empereur Constantin et depuis remplacée par l’édifice actuel. Grâce aux données réunies par les historiens, un modèle virtuel a permis d’en redécouvrir la splendeur : un espace vaste et lumineux, orné de marbres, de mosaïques, de textiles précieux et de colonnes élancées.
Loin de l’image d’une architecture sombre et lugubre, ce lieu respirait la clarté et la richesse. Beaucoup d’églises de l’époque étaient d’ailleurs peintes de couleurs vives, aujourd’hui effacées par le temps. Ces restitutions numériques ne relèvent pas de la fantaisie : elles s’appuient sur des années de documentation minutieuse.
Les monastères, basiliques et cathédrales médiévales n’étaient pas des espaces austères aux murs nus. Même lorsqu’ils ont disparu, comme la cathédrale romane de Gérone, en Catalogne (Espagne), les travaux de reconstitution permettent d’en imaginer la splendeur : murs peints, tentures d’or et d’argent, tissus somptueux, chandelles illuminant chaque recoin.

La lumière gothique

Les grandes cathédrales gothiques souffrent elles aussi d’une réputation injuste. Dans Notre Dame de Paris de Victor Hugo, comme dans le film d’animation Le Bossu de Notre Dame, la cathédrale parisienne apparaît sombre et inquiétante. Rien n’est pourtant plus éloigné de la réalité. Les prouesses techniques du gothique, entre le XIIᵉ et le XVᵉ siècle, ont permit d’ouvrir de vastes baies ornées de vitraux. Ces verrières diffusaient une lumière mouvante, caressant les murs, les colonnes et les autels, transformant l’espace en un lieu d’élévation spirituelle destiné à rapprocher le fidèle de Dieu.

L’intérieur de la cathédrale de Santa María de Regla à León. (Madrugada Verte / Shutterstock)

Si nombre de meubles et d’ornements ont disparu, les recherches de spécialistes comme Fernando Gutiérrez Baños permettent de reconstituer virtuellement les retables et tabernacles perdus. Des tapisseries et des tissus recouvraient alors les murs, sols et autels, conférant à ces édifices une somptuosité aujourd’hui insoupçonnée — hélas souvent anéantie par les incendies, l’humidité ou le pillage.

Des espaces éclatants de couleur

Les cathédrales gothiques françaises, notamment Notre-Dame de Paris et celle d’Amiens, ont fait l’objet d’études approfondies par les chercheurs Stephen Murray et Andrew Tallon. À l’aide de relevés de laser et d’analyses structurelles, leurs travaux ont été déterminants pour la restauration de ces monuments, en particulier de Notre-Dame après l’incendie d’avril 2019.
On sait désormais que l’art médiéval était foisonnant de couleurs. La restauration chromatique de la façade de la cathédrale d’Amiens , avec ses rouges et bleus éclatants, en témoigne. Les techniques de rendu 3D appliquées à l’architecture et à l’art du Moyen Âge offrent un outil précieux pour comprendre le passé.
À condition toutefois de s’appuyer sur des recherches rigoureuses — textes, fouilles, œuvres conservées — ces reconstitutions permettent de redonner vie à un patrimoine souvent méconnu. Le Moyen Âge, loin de l’obscurité à laquelle on le réduit, se révèle alors comme une ère de lumière, de clarté et de couleurs.