Opinion
Pas de meurtre au paradis ? Les idéologues modernes exigent que nous rejetions la vérité et acceptions ce qu’ils nous disent
Lorsqu’une société commence à accorder plus de valeur à l’idéologie qu’aux faits réels, elle revêt la cape spirituelle du marxisme sans afficher le symbole du marteau et de la faucille.

Une œuvre artistique illustrant les dangers du communisme est installée le long de l’autoroute Interstate 15 en Californie, le 6 janvier 2025.
Photo: John Fredricks/Epoch Times
Il y a plusieurs années, je suis tombé sur Netflix sur un film intitulé Enfant 44 (Child 44). Je l’ai trouvé troublant et captivant — un récit inhabituellement honnête de la pourriture au cœur des régimes totalitaires.
J’ai été moins heureux de découvrir que la plupart des critiques avaient rejeté ce film comme ennuyeux ou confus. Comme on pouvait s’y attendre, il a disparu des archives de Netflix plus vite que la liberté d’expression sur de nombreux campus universitaires.
Car ce film ne s’attaquait pas au capitalisme, au racisme, ni aux autres suspects habituels des films modernes — il dénonçait les mensonges d’un régime se proclamant socialiste – cette première étape de la société communiste selon la théorie marxiste-léniniste. Il convient de noter que, d’après leurs Constitutions, la Chine et la Corée du Nord sont des États socialistes.
Peut-être cela rendait-il Enfant 44 un peu trop décalé pour les goûts progressistes. À une époque où la sensibilité idéologique l’emporte souvent sur le courage artistique, l’honnêteté désarmante du film était peut-être trop frappante.
Situé dans la paranoïa de l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) stalinienne, le film raconte l’histoire d’un enquêteur, Leo Demidov, qui risquait tout pour résoudre l’énigme d’une série de meurtres d’enfants. Mais son plus grand obstacle n’était pas le meurtrier — c’était l’État lui-même.
Les responsables soviétiques affirmaient que de tels crimes étaient impossibles, car l’URSS était un paradis socialiste. « Il ne peut pas y avoir de meurtre au paradis », martelait un bureaucrate. Admettre le contraire aurait percé l’illusion qui soutenait le régime. Cette phrase reflétait le cœur psychologique du marxisme : la subordination de la vérité au discours idéologique.
L’idée qu’il ne pouvait pas y avoir de meurtres dans une terre promise socialiste n’était pas une simple remarque. Elle résumait une habitude mentale qui définissait les systèmes marxistes depuis leur naissance : l’élévation de la doctrine au-dessus de la vérité.
En Union soviétique, reconnaître la famine, l’échec ou la corruption morale équivalait à de la trahison. La famine de l’Holodomor dans les années 1930 fut niée ; le massacre de Katyń — des milliers d’officiers polonais exécutés par la police politique soviétique — fut imputé aux Allemands ; les données économiques étaient falsifiées pour maintenir le mythe du progrès.
Les régimes marxistes ne survivent pas grâce à la croyance en la vérité, mais par une imposition rigoureuse de la tromperie. Ils ne peuvent tout simplement pas tolérer une opinion dissidente. L’essai puissant d’Alexandre Soljenitsyne, Ne vis pas dans le mensonge, daté du 12 février 1974, fut la dernière chose qu’il put écrire dans son URSS natale avant que la police secrète ne l’arrête dans son appartement à Moscou.
Tragiquement, ces schémas de comportement n’ont pas disparu après le démantèlement de l’Union soviétique. La tentation de préserver un récit préféré en niant la réalité a migré vers l’Occident, renaissant sous la forme du marxisme culturel, qui domine désormais une grande partie de la vie intellectuelle. Notre société reste peut-être une société « libre », mais la pression pour affirmer des faussetés politiquement « convenables » est devenue remarquablement similaire à celle qu’on trouvait dans les anciens États marxistes.
Prenons l’Amérique comme exemple. Dans le cadre de l’affaire du Russiagate (2016–2019), des médias réputés et des responsables élus ont assuré au public que l’équipe de campagne de Donald Trump avait conspiré avec le Kremlin pour voler l’élection présidentielle de 2016. Lorsque le long rapport du procureur spécial Robert Mueller n’a pas trouvé de preuves de collusion, l’affaire aurait dû être close.
Et pourtant, elle a perduré. Car elle satisfaisait un besoin idéologique : expliquer un résultat électoral que de nombreux représentants de l’élite américaine ne pouvaient concilier avec leur vision du monde. La conviction qu’il ne pouvait y avoir de victoire électorale légitime pour des « déplorables » non progressistes dans une « société juste » faisait écho, en version occidentale, à la phrase : « Il ne peut pas y avoir de meurtres au paradis. »
Ainsi, les contre-vérités continuent de supplanter les faits. Les fictions sont astucieusement entretenues ; les caméras sont soigneusement contrôlées ; les journalistes dissidents sont accusés de mauvaise foi. La vérité cède la place à la loyauté. Des légions d’influenceurs progressistes font semblant de ne pas voir des contradictions qu’un enfant de dix ans reconnaîtrait.
Nulle part le déni de la réalité n’a été plus flagrant qu’à la frontière sud des États-Unis dans les années suivant l’élection de Joe Biden en 2020. Des millions de passages illégaux étaient visibles à la télévision, et des villes entières peinaient à absorber l’afflux. Pourtant, le département de la Sécurité intérieure déclarait continuellement que la frontière était « sûre ». C’était une illusion linguistique entretenue par la répétition. Les bureaucrates soviétiques reconnaîtraient le procédé : lorsque la vérité contredit le discours officiel, il suffit de redéfinir les mots jusqu’à ce que le discours officiel l’emporte.
Un schéma similaire est apparu dans les discussions sur la criminalité urbaine en Amérique. Après les troubles de 2020, de nombreux dirigeants progressistes ont insisté sur le fait que « la criminalité est sous contrôle » et que les rapports faisant état d’une violence croissante n’étaient qu’une illusion créée par la « droite ». Dans ville après ville, les commerçants installaient des grilles métalliques et les habitants fuyaient, mais la rhétorique officielle demeurait la même. Le marxisme enseigne à ses disciples que la conscience détermine la réalité : si l’on répète suffisamment longtemps les bons slogans, le monde finira par se conformer.
Le discours populaire de l’écologisme militant a lui aussi dévié de la science pour devenir un credo. Pendant des décennies, les radicaux écologistes et les grands médias ont prédit que la glace estivale de l’Arctique disparaîtrait à des dates précises — 2013, puis 2016, puis 2020. La glace a reculé dans une certaine mesure, mais une grande partie est restée. Cette année, des chercheurs ont découvert que la calotte glaciaire antarctique montrait des signes de croissance record — un renversement remarquable par rapport aux prévisions des années précédentes.
Il ne s’agit pas ici de nier le changement climatique, mais de s’opposer à la manipulation de la vérité à des fins idéologiques. Au nom de la recherche du « consensus » et de la lutte contre la « désinformation », on jette l’anathème sur les scientifiques sceptiques, tout comme autrefois sur les généticiens russes qui avaient remis en question les théories évolutionnistes du biologiste soviétique Trofim Lyssenko. Dans ce dernier cas, plus de trois mille biologistes de renom furent renvoyés, emprisonnés ou exécutés lors d’une campagne soviétique visant à faire taire les opposants à la ligne scientifique officielle et exclusive.
Aujourd’hui, un autre mythe urbain s’est développé autour de la défense progressiste de l’immigration illégale : bien que les migrants entrent illégalement dans les pays occidentaux, ils seraient « des personnes indispensables, travailleuses et honnêtes ». Toute préoccupation concernant les coûts sociaux ou criminels est qualifiée de xénophobie. Oui, certains sont effectivement travailleurs — mais les preuves montrent que d’autres ne le sont pas. En réalité, un bon nombre sont des criminels. Cette distinction est importante, mais la pression des médias grand public interdit aux citoyens de la reconnaître.
Dans tous ces cas, le mécanisme idéologique est le même. Un projet progressiste définit ce qui doit être vrai pour des raisons idéologiques ou politiques ; la réalité est ensuite filtrée, manipulée ou ignorée afin de soutenir la fiction. Ceux qui remettent en cause l’illusion sont traités comme des ennemis du progrès. Autrefois, l’Union soviétique les appelait des « ennemis du peuple ». Aujourd’hui, on les qualifie de « négationnistes », « extrémistes », « d’extrême droite », etc.
Václav Havel, le dissident tchèque qui a vécu en République socialiste tchécoslovaque, a décrit cette situation comme « vivre dans le mensonge ». Les citoyens, écrivait-il, répètent des slogans auxquels ils ne croient pas, parce que ces slogans sont devenus une monnaie sociale. Ils se conforment extérieurement pour survivre intérieurement. La tragédie de notre époque est que le même phénomène s’est installé dans les villes occidentales où aucune police secrète ne le contraint — seulement la peur sociale, le risque professionnel et le conformisme idéologique.
La vérité ne devrait pas être partisane. Elle est une condition préalable à la liberté. Lorsqu’une société commence à accorder plus de valeur à l’idéologie qu’aux faits réels, lorsqu’elle exige l’obéissance plutôt que la recherche, elle revêt la cape spirituelle du marxisme sans afficher le symbole du marteau et de la faucille.
Dans Enfant 44, Leo Demidov finit par démasquer le meurtrier, mais le véritable coupable était le système qui interdisait la vérité. Nous ferions bien de nous souvenir de cette leçon. L’utopie marxiste, qui affirmait qu’il ne pouvait y avoir « de meurtre au paradis » soviétique, a fini par être écrasée sous le poids de ses propres contradictions internes.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Articles actuels de l’auteur
15 novembre 2023
Nations unies: une majorité hostile à l’Amérique
18 septembre 2023
Une génération en détresse produit des adultes dangereux









