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Le projet démesuré d’une ferme industrielle à saumons menace l’estuaire de la Gironde

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Une esquisse du projet de ferme-usine aquacole de l’entreprise Pure Salmon à Verdon-sur-Mer, dans le Médoc.

Photo: Crédit photo site Pure Salmon

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Durée de lecture: 7 Min.

Pure Salmon projette d’implanter une ferme-usine aquacole à Verdon-sur-Mer, dans le Médoc, avec pour ambition de produire jusqu’à 10.000 tonnes de saumons par an, soit environ 5 % de la consommation française annuelle. Mais cette ferme-usine, qui serait le plus vaste élevage de saumons d’Europe, est vivement contestée par les écologistes, les associations environnementales ainsi qu’une partie des habitants.
Le projet de l’entreprise Pure Salmon repose sur un système d’aquaculture en recirculation (RAS), qui permet d’élever des poissons en eau douce sur terre, sans contact direct avec le milieu marin, rapporte le site lesecologistes.fr. Installé sur une surface de 15 hectares à proximité du port du Verdon, il met en avant des avantages tels que la maîtrise sanitaire, la réduction des pollutions en mer, la proximité des marchés et la création d’emplois locaux, estimés entre 100 et 150 postes à terme. Cependant, cette installation de type industriel suscite de fortes inquiétudes quant à sa consommation effective d’eau et aux risques qu’elle ferait peser sur l’équilibre de l’écosystème estuarien.
Implantation inadaptée au territoire et menace des ressources
Les opposants de cette ferme-usine aquacole dénoncent tout d’abord une « implantation inadaptée au territoire ». Situé au cœur d’une région écologiquement sensible, à proximité immédiate de zones protégées telles que l’estuaire de la Gironde et les marais alentour, le Médoc se prête mal à un tel projet. Les défenseurs de l’environnement y voient une industrialisation à grande échelle d’un milieu naturel vulnérable, en contradiction avec les ambitions de transition écologique et de préservation de la biodiversité.

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De plus, le projet menace les ressources locales. En effet, le prélèvement intensif d’eau, les rejets éventuels et l’artificialisation des sols font craindre de lourdes conséquences sur les nappes phréatiques, la qualité de l’eau et l’ensemble des ressources naturelles du secteur.
Une technologie très controversée
Ce modèle industriel est par ailleurs très fortement controversé, car si la technologie RAS réduit certaines formes de pollution marine, elle demeure gourmande en eau, en énergie et en nourriture pour poissons, soulevant des interrogations sur son bilan carbone et son empreinte écologique globale. Sans compter le fait que l’élevage intensif comporte des risques liés au bien-être animal, à l’usage d’antibiotiques et à la propagation de maladies dans un système en circuit fermé.
Enfin, les défenseurs de l’environnement pointent une concertation publique quasi inexistante et un manque de transparence. Le projet avance à marche forcée, sans réelle consultation des habitants et sans études d’impact environnemental menées de manière suffisamment approfondie à ce jour.

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Pure Salmon face à l’association Eaux secours agissons
Comme le relate Sud Ouest, le projet a également été au cœur d’un conflit judiciaire : en avril 2023, Pure Salmon avait poursuivi l’association Eaux secours agissons et ses représentantes, Esther Dufaure et Alice Soulié, pour diffamation, exigeant le retrait d’une pétition ayant obtenu 47.000 signatures et d’une vidéo. Elle réclamait de surcroît 32.000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice.
Déboutée en première instance puis en appel, la société a finalement renoncé à se pourvoir en cassation, ce que l’association considère comme « la fin définitive d’un procès bâillon ». Le quotidien souligne qu’une enquête publique sur le projet devrait débuter à l’automne prochain.
Des députés proposent un moratoire de dix ans sur les « fermes-usines » à saumon
Le sujet préoccupe aussi des députés de plusieurs groupes politiques, de LFI aux Républicains. Ils ont d’ailleurs déposé une proposition de loi le 19 mars dernier, visant à instaurer un moratoire de dix ans sur l’implantation en France de « fermes-usines » d’élevage de saumons en bassins. Ils dénoncent eux aussi les conditions de vie des poissons dans ces élevages à forte densité, ainsi que les rejets qui menacent les écosystèmes et certaines filières locales comme la pêche ou l’ostréiculture.
La députée LFI Anne Stambach-Terrenoir a alerté : « Il y a en ce moment deux gros projets industriels de fermes-usines à saumons qui menacent les côtes françaises », citant Pure Salmon en Gironde, mais aussi Local Ocean dans le Pas-de-Calais. Elle a ajouté : « On est sur des projets complètement démesurés… dans le monde, la moyenne pour ce type d’installation c’est plutôt 2000 tonnes », alors que ces projets visent environ 10.000 tonnes par an.
Le texte prévoit un moratoire sur la délivrance des autorisations environnementales pour ces élevages en circuit fermé, une technologie de recirculation de l’eau encore inédite en France. Les députés mettent en garde contre les rejets « considérables » d’azote, de phosphore et d’eau chaude. Le député écologiste Damien Girard a souligné : « Si demain on déverse dans nos eaux côtières des eaux qui sont polluées parce que chargées en nutriments, […] en virus, on voit ce que ça a généré ces dernières années avec des huîtres qui ne sont pas bonnes à la consommation », pointant le risque de destructions d’emploi.
La France étant l’un des pays les plus consommateurs de saumons, c’est aussi « l’occasion de reposer la question de quel type de produits de la mer on consomme », a estimé en guise de conclusion le député de la 5e circonscription du Morbihan.