Le chômage des jeunes en Chine continue de s’aggraver, selon les données

Le 26 août 2022, des candidats se pressaient à un forum pour l’emploi à Pékin.
Photo: JADE GAO/AFP via Getty Images
Le taux de chômage des jeunes chinois a atteint un niveau record en août, près d’un cinquième des jeunes ne fréquentant pas l’école étant sans emploi. Selon les experts, ce problème découle de failles structurelles dans l’économie chinoise, augurant une crise persistante pour les années à venir.
Le Bureau national des statistiques du régime communiste a publié le 17 septembre des chiffres sur le chômage par classe d’âge, montrant que le taux de chômage parmi les 16-24 ans, hors étudiants, s’établit à 18,9 % en août, soit 1,1 point de plus qu’en juillet et 0,1 point de plus qu’à la même période en 2024. Il s’agit du plus haut niveau depuis que ces données sont communiquées, en décembre 2023.
Le taux de chômage chez les 25-29 ans a augmenté de 0,3 point pour atteindre 7,2 %, soit 0,3 point de plus qu’à la même époque l’an dernier ; pour les 30-59 ans, hors étudiants, il reste stable à 3,9 %, comme en juillet et à la même période l’année précédente.
Depuis décembre 2023, le Bureau national des statistiques a révisé sa méthodologie de calcul du chômage selon l’âge, excluant les étudiants et séparant les 25-59 ans en deux tranches : 25-29 ans et 30-59 ans.
Le taux de chômage des jeunes et celui dans les zones urbaines ont augmenté deux mois d’affilée. Cette hausse chez les jeunes contribue à une augmentation de 0,1 point du taux national de chômage urbain recensé, qui atteint 5,3 % en août, niveau inchangé par rapport à l’an passé selon les chiffres officiels.
Parallèlement, le nombre de diplômés chinois atteindra cette année un nouveau sommet à 12,22 millions, soit 430.000 de plus que l’an dernier, ce qui aggravera la crise actuelle.
Ce pic de chômage des jeunes, même après avoir exclu les étudiants, prouve que même les statistiques corrigées ne parviennent pas à masquer la dégradation du marché de l’emploi, déclare l’économiste sino-américain Davy J. Wong à Epoch Times.
« La période des remises de diplômes, conjuguée aux pertes d’emploi, a fait grimper le chômage des 25-29 ans, signe que les entreprises cessent pratiquement de créer des postes », observe-t-il.
Quant à la crédibilité des données officielles du régime au pouvoir, M. Wong estime que les chiffres officiels sont « fiables mais prudents, car ils excluent un grand nombre de personnes occupant des emplois flexibles et de demandeurs d’emploi découragés, de sorte que le taux de chômage réel est probablement plus élevé ».
Il ajoute que le taux global de chômage de 5,3 % « paraît stable », mais qu’il s’agit d’« une illusion d’optique ; la pression réelle pèse sur les jeunes et ceux qui entrent sur le marché du travail ».
« La stabilité du chômage chez les 30-59 ans s’explique par la bonne rétention des emplois existants ; la dégradation chez les jeunes reflète la stagnation des créations d’emplois », poursuit-il.
« La perte de confiance dans l’immobilier et chez les entreprises privées a détruit des emplois dans les services et le privé, secteurs sur lesquels comptent principalement les jeunes. C’est un problème structurel plus qu’une fluctuation passagère ».
Un système sous pression
Le niveau record de chômage s’explique principalement par deux facteurs qui, selon Xu Zhen, professionnel aguerri des marchés chinois, enracineront la crise pour des années, voire des décennies.
« La Chine fait actuellement face à deux défis majeurs. Premièrement : une récession des bilans couplée à une spirale déflationniste et au vieillissement de la population. Cela se traduit par un endettement massif dans l’immobilier, tant du côté de l’État, que des entreprises du secteur et des ménages », analyse M. Xu.
Dans les industries des énergies nouvelles comme le photovoltaïque, l’éolien, les véhicules électriques ou les puces, « ces secteurs nécessitent des capitaux, technologies et talents importants, ce qui entraîne un levier d’endettement élevé », poursuit-il. « L’ampleur de la dette décourage les entreprises d’investir et les particuliers de consommer, préférant rembourser leurs prêts. La spirale déflationniste et le vieillissement entraîneront une contraction de l’investissement et de la consommation. La stratégie de circulation interne du régime communiste chinois a donc échoué. »
Second facteur : la guerre commerciale avec l’Occident, qui plombe la demande extérieure.
« Le dumping mondial des surcapacités chinoises a pénalisé l’industrie en Europe et aux États-Unis », souligne M. Xu.
Si on ajoute à ça le fait que le régime utilise les terres rares et les produits chimiques clés comme des armes, « le monde a clairement vu les intentions du PCC de dominer le monde. » Du coup, les pays occidentaux limitent les exportations chinoises, et « sous cette pression, plein d’entreprises exportatrices ont fait faillite. »

Un ouvrier marche entre des rouleaux de feuille d’aluminium pour batteries, destinés à l’exportation, dans une usine de Huaibei, dans la province d’Anhui, dans l’est de la Chine, le 8 juillet 2023. (STR/AFP via Getty Images)
Par ailleurs, la crise immobilière prolongée et la faible consommation aggravent les difficultés sur le marché du travail. Reuters, citant des économistes en juillet, indiquait que la Chine aurait du mal à atteindre l’objectif de croissance de 5 % cette année : pour 40 experts consultés, la croissance réelle serait d’environ 4,6 %.
Selon M. Wong, la Chine devra octroyer des aides ciblées pour espérer atteindre les 5 % de croissance visés au dernier trimestre.
M. Xu, lui, doute davantage de la crédibilité des chiffres officiels : « Les données sur le PIB et le chômage sont surtout une façade destinée à préserver la stabilité politique, elles sont peu fiables. La politique actuelle qui pousse les étudiants diplômés vers les services à domicile l’illustre parfaitement ».
Pour enrayer la crise, le ministère de l’Éducation, la Commission nationale du développement et de la réforme et d’autres instances ont édicté des politiques incitant les diplômés à rejoindre ce secteur.
Un chômage caché
Depuis la crise sanitaire, un grand nombre de jeunes Chinois n’ont pas réussi à trouver un emploi ou à s’imposer sur le marché du travail dans un contexte économique morose. Ils ont choisi de retourner dans leur ville natale pour devenir des « enfants ou petits-enfants à plein temps » et s’occuper de leurs parents âgés en échange d’un logement et de repas gratuits, ainsi que d’argent de poche versé par leurs parents ou grands-parents, créant ainsi un nouveau phénomène social.

Un homme joue à un jeu en ligne dans un magasin d’informatique à Pékin, le 31 août 2021. (NOEL CELIS/AFP via Getty Images)
La professeure associée Zhang Dandan (université de Pékin) écrivait en 2023 que si l’on inclut les quelque 16 millions de jeunes ni en emploi ni en formation, vivant chez leurs parents, le taux de chômage réel des jeunes en mars 2023 pourrait atteindre 46,5 %, bien au-delà du chiffre officiel de 19,7 %.
M. Wong a averti que « si les attentes des entreprises privées ne sont pas rapidement rétablies, si les emplois dans le secteur public ne sont pas renforcés et si aucune aide directe n’est apportée aux nouveaux employés, le problème du chômage va se transformer en un fossé de mobilité sociale et en une crise de confiance ».
Luo Ya, Fang Xiao et Yi Ru ont contribué à la rédaction de cet article.

Alex Wu est un rédacteur basé aux États-Unis qui écrit pour The Epoch Times sur la société et la culture chinoises, les droits de l'homme et les relations internationales.
Articles actuels de l’auteur









