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La Chine est devenue le premier blanchisseur d’argent au monde : comment les États-Unis ripostent

Epoch Times a rencontré des experts des réseaux chinois de blanchiment d’argent. Ces réseaux sont assez récents, n'ayant commencé à emerger qu'entre 2015 et 2016. Mais depuis 2019, ils dominent le marché mondial.

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Brian Clark, agent spécial responsable du gouvernement américain à Los Angeles, le 30 septembre 2025. Selon M. Clark, les organisations chinoises de blanchiment d’argent dominent le marché. Photo : John Fredricks / The Epoch Times

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Durée de lecture: 12 Min.

Les organisations chinoises figurent parmi « les acteurs clés du blanchiment professionnel dans le monde », selon le dernier rapport sur les risques de blanchiment d’argent publié par le département du Trésor américain.

Ces réseaux offrent aux cartels des services « rapides, bon marché et presque garantis », explique Brian Clark, qui travaille pour le gouvernement américain au sein de la DEA, l’agence fédérale spécialisée dans la lutte contre le trafic de stupéfiants. « Cela permet aux trafiquants de disposer de davantage d’argent pour intensifier leurs activités. »

Les experts estiment que le blanchiment d’argent chinois au niveau mondial est soutenu par le régime chinois, et qu’il représente une menace majeure pour toutes les nations.

Des rapports ne cessent de pointer le lien qui existe entre les investissements mondiaux du PCC et l’essor du commerce illicite et de la corruption.

« La Chine tire directement et indirectement profit des opérations de blanchiment, et cela a un impact sur son économie et son secteur financier, que ce soit via le commerce international ou le système bancaire clandestin », explique David M. Luna, directeur exécutif de l’International Coalition Against Illicit Economies, ancien diplomate et haut fonctionnaire américain de la sécurité nationale.

« Le PCC tolère ce genre de choses car c’est extrêmement lucratif ; cela leur permet d’alimenter l’économie illégale dans le monde entier, une ressource clé de l’expansion commerciale et mercantiliste du pays dans de nombreuses régions du monde; cela contribue également à leurs ambitions géopolitiques de domination. »

Selon John Cassara, ancien agent spécial du Trésor américain, les réseaux chinois blanchiraient jusqu’à 2000 milliards de dollars par an, soit près de la moitié du blanchiment mondial.

Face à l’ampleur du phénomène, John Cassara y voit une occasion unique de dénoncer le régime communiste : « Ces crimes montrent la véritable nature du PCC. »

« Cela dépasse la question des idéologies. C’est une question qui touche au bien et au mal, » déclare-t-il à Epoch Times. « Et tout le monde sait ça. »

Un blanchiment d’argent « à la chinoise »

Les réseaux chinois ont pris le contrôle du marché en pratiquant des commissions nettement inférieures à ce qui se faisait en Amérique latine. Alors que le taux moyen du blanchiment oscillait entre 10 % et 15 %, les Chinois facturaient parfois jusqu’à zéro commission sur plusieurs années, éliminant ainsi toute concurrence.

Même plus tard, leurs taux sont restés faibles — entre 0 et 6 %. Cela a directement dopé les profits des cartels, souligne Robert Zachariasiewicz, ancien agent de la DEA, lors d’un colloque organisé par le think tank Global Financial Integrity, à Washington.

Depuis l’arrivée des Chinois sur le marché, selon Christopher Urben, ex-agent de la DEA et désormais directeur général du cabinet Nardello & Co., les cartels mexicains ont augmenté leurs profits de 3 % à 5 % — soit des milliards de dollars supplémentaires chaque année.

Selon lui, les courtiers chinois peuvent se permettre des commissions dérisoires car ils se rattrapent sur d’autres clients dans la chaîne du blanchiment.

Un segment clé de leur clientèle se trouve du côté des Chinois fortunés désireux de sortir leur argent du pays. Attirés par l’immobilier à l’étranger ou cherchant un moyen de payer les frais de scolarité de leurs enfants dans les universités américaines, ils alimentent indirectement le système du blanchissement d’argent en Chine.

Le Parti communiste chinois interdit toute transaction de change de plus de 50.000 dollars par personne. Ces restrictions, mises en place en 2017, ont même été durcies. C’est alors que les réseaux de blanchiment chinois ont commencé à prospérer, observe Brian Clark.

Les riches Chinois recoivent des dollars issus du trafic de drogue sur des comptes aux États-Unis : en échange, ils versent l’équivalent de cette somme en yuans sur les comptes chinois d’organisations affiliées aux cartels. Ces échanges, appelés transactions miroirs, permettent de contourner les transferts d’argent à l’international.

Les clients chinois acceptent alors de payer des commissions de 3 %.

Ce système, note Brian Clark, a radicalement transformé le paysage du blanchiment : les profits du trafic de drogue n’ont plus besoin de passer les frontières, rendant les flux illicites bien plus difficiles à détecter.

Les yuans versés sur les comptes liés aux cartels en Chine servent ensuite à acheter des précurseurs chimiques ou des biens destinés au trafic vers le Mexique.

Un autre procédé consiste à truquer les factures : si un cartel doit blanchir 990.000 dollars, un partenaire chinois expédie pour 1 million de dollars de produits électroniques vers le Mexique, mais ne facture que 10.000 dollars. Une fois revendus localement, les biens apparaissent comme un gain légal de 990.000 dollars — intégrant ainsi l’argent sale au circuit officiel.

Selon Global Financial Integrity, ces opérations de blanchiment adossées au commerce se manifestent par des « écarts de valeur » entre les données d’importations et d’exportations : en 2018, ces écarts atteignaient 835 milliards de dollars entre 134 pays en développement et 36 économies avancées, dont 37 % attribués à la Chine — cinq fois plus que la Pologne, deuxième au classement.

Un « multiplicateur de menace »

Pour de nombreux experts, l’influence de ces réseaux dépasse largement le trafic de drogue.

« Beaucoup d’agences de sécurité considèrent les entreprises illicites chinoises comme un multiplicateur de menace, car elles alimentent la violence, l’insécurité et l’instabilité sur de nombreux marchés », explique l’ancien diplomate David M. Luna.

Le commerce illégal et la corruption se sont propagés en même temps que les investissements mondiaux de la Chine. L’exemple le plus marquant est l’Initiative la Ceinture et la Route (BRI), vaste programme d’infrastructures lancé par Pékin.

Selon un rapport d’avril 2025 de l’OCDE, plus un pays reçoit d’investissements chinois, plus il exporte de produits contrefaits — un commerce qui est au cœur du blanchiment d’argent dans le monde. Ce commerce représente environ 500 milliards de dollars par an, la Chine demeurant la principale source mondiale.

Cette croissance s’accompagne généralement de corruption: la majorité des 150 pays bénéficiaires de la BRI figurent parmi les plus corrompus au monde, selon l’indice TRACE 2024.

« Il est peu probable que Pékin ou ses partenaires veuillent vraiment une BRI exempte de corruption », souligne un rapport de la Foundation for Defense of Democracies. « Pour le PCC, la transparence et la redevabilité sont des risques politiques qu’ils ne sont pas prêts à accepter. »

La réponse américaine

Face à ces opérations, Washington a pris plusieurs mesures pour endiguer les crimes internationaux directement ou indirectement soutenu par le régime chinois.

En février, le président américain a tiré la sonnette d’alarme sur la crise des stupéfiants dans le pays, décrétant une urgence nationale et imposant une taxe de 10 % sur les produits chinois. Il est reproché à Pékin de faciliter la fourniture de précurseurs chimiques du fentanyl et de blanchir l’argent des cartels. Un mois plus tard, faute de réponse de la part du PCC, le taux est passé à 20 %.

Toujours en février, l’administration Trump a désigné huit cartels latino-américains comme organisations terroristes étrangères, autorisant ainsi la DEA à utiliser des moyens de renseignement et de défense supérieurs pour lutter contre le trafic et le blanchiment associés.

En juillet, tous les membres d’un réseau chinois ont plaidé coupable d’avoir blanchi plus de 92 millions de dollars issus du trafic de drogue mexicain.

Dans une autre affaire, 11 Chinois sont poursuivis à Los Angeles pour avoir blanchi 50 millions de dollars pour le cartel de Sinaloa.

Selon la Financial Crimes Enforcement Network, division du Trésor, les blanchisseurs chinois auraient déplacé 312 milliards de dollars de fonds illicites via les banques américaines entre 2020 et 2024. L’agence a émis une alerte invitant les établissements à signaler toute activité suspecte : comptes ouverts avec un passeport chinois par des étudiants, retraités ou femmes au foyer disposant de fortunes inexpliquées, ou achats immobiliers réglés intégralement en espèces.

« Ces réseaux liés à des passeports [chinois] permettent aux cartels [de répandre] le fentanyl, de favoriser la traite humaine et de déstabiliser nos communautés », a déclaré John K. Hurley, sous-secrétaire au Trésor chargé du renseignement financier.

L’Union européenne et les États-Unis ont également inscrit la lutte contre le blanchiment au menu des négociations commerciales à Madrid, en septembre. Le secrétaire au Trésor Scott Bessent a parlé d’un « terrain d’entente extrême », sans donner de détails.

Pékin a récemment révisé sa loi sur le blanchiment pour l’étendre aux secteurs non financiers — tels que l’immobilier —, mais le département d’État américain relève toujours de « graves carences dans la mise en œuvre » et un manque de coopération de la part du Parti communiste chinois.

Pour John Cassara, la réponse à apporter est claire : « Il faut pointer du doigt le PCC, et le dénoncer. »

Terri Wu est une journaliste indépendante basée à Washington qui travaille pour Epoch Times et couvre les questions liées à l'éducation et à la Chine.

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