Jean Julliard, le sens du devoir, l’amour de l’humanité
Dans une époque bouleversée par les guerres mondiales, lorsque la médecine militaire devait concilier l'urgence des combats à la rigueur d'une science visant à sauver les blessés, le docteur Jean Julliard s'est imposé comme l'un des esprits les plus novateurs de son temps.
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Inauguration du Centre de Transfusion Sanguine des Armées Jean Julliard le 26 octobre 2001 par le ministre des Armées Alain Richard.
Médecin militaire et visionnaire, il fut le créateur du centre de transfusion sanguine de Clamart, matrice du futur système français du don de sang. Mais, au-delà de ses innovations techniques, c’est une philosophie essentiellement humaniste qui l’anime. Sa profonde empathie pour les êtres humains, associée à son désir inébranlable de placer la protection de la vie au-dessus de tout, ont fait de lui un modèle d’engagement médical et militaire.
Un homme forgé dans le creuset de la Grande Guerre
Formé dans le creuset de la Grande Guerre, le médecin militaire Jean Julliard a connu de près, comme en témoigne son journal de guerre, les ravages des champs de bataille. Affecté sur le front, il assiste impuissant à la mort de nombreux soldats qui, faute de sang disponible, succombent à leurs blessures malgré les soins prodigués.
Là où beaucoup voyaient dans la guerre une implacable fatalité, lui opposa la force de sa volonté : il mit la science au service des blessés, animé par la conviction profonde que chaque goutte de sang versée pour autrui était un acte de fraternité. Ainsi, il a vu dans la transfusion sanguine bien plus qu’un geste médical : il y distingua un véritable réseau solidaire entre les hommes, comme une sorte de chaîne de vie entre donneurs et receveurs que le centre de transfusion sanguine de Clamart a par la suite institutionnalisé.
Créé en 1945 par le médecin général Julliard, dont il porte le nom depuis 1961, et implanté depuis 1945 dans l’îlot Percy à Clamart, le CTSA (Centre de Transfusion Sanguine des Armées) est rattaché depuis le 21 février 1996 à la Direction centrale du Service de santé des armées. (photo Googlemap)
Le pionnier de Clamart
Engagé dans l’étude et la mise en œuvre des techniques modernes de transfusion sanguine à une époque où ces pratiques étaient encore balbutiantes, Jean Julliard fonde et dirige après la Seconde Guerre mondiale le Centre de Transfusion Sanguine des Armées à Clamart, en 1946.
Ce centre, véritable laboratoire d’innovation, est alors considéré comme l’un des premiers centres organisés de collecte, de conservation et de distribution de sang en France. Le docteur Jean Julliard y lance des procédures standardisées pour la transfusion, établit des protocoles de sécurité rigoureux et forme une génération entière de médecins transfuseurs, jetant ainsi les bases de ce qui deviendra le système français de transfusion sanguine.
L’apport de Jean Julliard ne se limite pas aux aspects techniques. Il insiste sur la dimension éthique du don de sang, défendant le principe de bénévolat et de gratuité qui caractérisera durablement le modèle français. Pour lui, le sang ne saurait être une marchandise : c’est un bien commun, expression tangible de la solidarité nationale.
Un rayonnement international
Parallèlement, ce pionnier de la transfusion a joué également un rôle majeur important au sein de la Société internationale de transfusion sanguine (ISBT – International Society of Blood Transfusion) dont il fut l’un des premiers présidents. À ce titre, il contribue activement à l’harmonisation des pratiques transfusionnelles à l’échelle mondiale et au partage des connaissances entre nations.
Conférencier recherché, il multiplie les communications scientifiques et entretient une correspondance nourrie avec les plus grands spécialistes internationaux de son domaine. Son influence dépasse largement les frontières hexagonales.
En hommage à son action, et en reconnaissance de son legs scientifique, aujourd’hui encore on décerne le « Prix Jean Julliard » qui récompense les jeunes chercheurs en transfusion sanguine à travers le monde. Cette distinction, créée par l’ISBT, perpétue ainsi la mémoire d’un homme qui consacra sa vie au progrès médical.
Réalisée en bronze par le graveur Raina, cette médaille rend hommage au Médecin Général Jean Julliard (1902-1960), pionnier de la transfusion sanguine en France et créateur du Centre de transfusion sanguine des armées. Elle fut frappée à l’occasion de l’inauguration de son buste à Clamart, en 1961.
Un héritage pérenne
Décédé en 1954, à l’âge de 63 ans, il laisse derrière lui un exemple tant pour la recherche médicale du service de santé des armées que pour les structures civiles françaises. Son œuvre a directement inspiré la création de l’Établissement français du sang (EFS) et continue d’irriguer les pratiques contemporaines de la médecine transfusionnelle.
Si son nom reste indissociablement associé à l’éthique et à la professionnalisation de la transfusion, son engagement a placé au plus haut les valeurs de la vie. Dans un siècle marqué par la violence de masse, Jean Julliard incarne cette figure du médecin-soldat qui, refusant la fatalité de la mort, a transformé le sang versé en promesse de vie. Son legs demeure : chaque don de sang effectué aujourd’hui en France porte, indéniablement, l’empreinte de sa vision humaniste.