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Financement des écoles catholiquesFinancement des écoles catholiques : près d’un milliard d’euros non versés par l’État et les collectivités
Près de 900 millions d’euros n’ont pas été versés aux écoles catholiques sous contrat en 2024, révèle une étude du 24 novembre. Ce déficit fragilise le fonctionnement de nombreux établissements.

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Photo: FREDERICK FLORIN/AFP via Getty Images
La Fédération nationale des organismes de gestion de l’enseignement catholique (Fnogec) alerte sur un déséquilibre persistant dans le financement des écoles catholiques. Son rapport, révélé par Les Échos, pointe l’application inégale du forfait d’externat, le dispositif qui oblige communes, départements et régions à contribuer financièrement aux établissements privés sous contrat en échange de leur participation au service public d’éducation.
Un écart massif entre droits et versements
Mis en place par la loi Debré de 1959, cette participation prend en charge une partie des dépenses liées à l’entretien des bâtiments et au fonctionnement quotidien des établissements. D’après les calculs de la Fnogec, les versements effectifs des collectivités s’élèveraient à près de 1,96 milliard d’euros. Or, si la mise en œuvre du dispositif était intégrale, les établissements devraient percevoir près de 882 millions d’euros supplémentaires.
Ces écarts de versement se retrouvent aussi d’un territoire à l’autre. Dans un même réseau d’établissements, le niveau de financement public accordé aux élèves diffère sensiblement selon la commune où ils résident. La situation des élèves « hors commune » est significative : la municipalité où habite l’enfant doit verser sa part du forfait à l’école fréquentée, mais certaines collectivités s’y soustraient ou retardent leur contribution, comme le rapporte La Croix. Le quotidien souligne qu’en conséquence, cela perturbe le fonctionnement normal du réseau catholique.
« C’est une obligation, pas une subvention discrétionnaire »
L’enseignement catholique alerte sur de fortes inégalités entre collectivités, avec parfois de gros écarts entre communes de même catégorie. Pierre-Vincent Guéret, qui dirige la Fnogec et a rédigé cette étude, comme le relate Les Échos, estime que c’est « un problème pour l’enseignement public ». « Pourquoi un lycéen de Paca bénéficie-t-il de 400 euros de moins qu’en Bourgogne-Franche-Comté ? On a une inégalité de traitement », dénonce-t-il, qualifiant cette situation de « loterie du code postal ».
Le rapport constate en outre que certaines collectivités appliquent le forfait de façon incorrecte, en décomptant par exemple les charges salariales du personnel d’entretien selon le nombre d’heures de classe, ce qui réduit artificiellement le financement. « C’est une obligation, pas une subvention discrétionnaire, contrairement à ce que croient certains élus », pointe encore Pierre-Vincent Guéret.
« Le risque est qu’on cherche à fermer nos écoles »
Pour Guillaume Prévost, secrétaire général de l’enseignement catholique, cité par Les Échos, le non-paiement du forfait par certaines communes place « le modèle économique de nos petites écoles en grand danger ». « Dans un contexte de baisse démographique, le risque est qu’on cherche à fermer nos écoles pour permettre à l’école publique de se maintenir », avertit-il.
Cette situation contraint les établissements à adapter leurs choix pédagogiques et matériels aux moyens dont ils disposent, plutôt qu’aux besoins réels des élèves. Selon Famille Chrétienne, certains chefs d’établissement rapportent que des travaux ont été différés, des investissements reportés et des dépenses pédagogiques réduites.
Pour l’enseignement catholique, un réajustement du financement des écoles catholiques permettrait de garantir la mixité et la stabilité du réseau, comme l’explique Pierre-Vincent Guéret en soulignant que « si le forfait était réajusté, on aurait en moyenne 450 euros de plus par élève, ce qui permettrait de diminuer les frais de scolarité et donc d’accroître la mixité ».
« Il est temps de réaffirmer les droits des familles »
« Le sujet, ce n’est pas l’opposition entre l’école laïque et l’école catholique », insiste Guillaume Prévost. Selon lui, « si on ne bénéficie ni de l’éducation prioritaire, ni des territoires éducatifs ruraux, ni des cités éducatives, comment être compétitif ? » Il ajoute : « Le sujet budgétaire est clé, car moins on finance l’école catholique, plus elle devient un outil d’entre soi. »
Pierre-Vincent Guéret mentionne que les échanges avec les collectivités tournent souvent « au rapport de force » et il est difficile « de s’engager pour plusieurs années dans un contentieux » tout en risquant la suspension des financements.
L’enseignement catholique se dit toutefois prêt à adopter une position plus ferme. Après vingt ans de conciliation, Guillaume Prévost entend porter le sujet jusqu’à l’élection présidentielle et n’exclut pas des recours : « Il ne faut se priver de rien dans un débat qui dérive. » Pierre-Vincent Guéret, lui, estime qu’« il est temps de réaffirmer les droits des familles ».

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