Opinion
Est-ce que l’Europe retarde délibérément la conclusion de l’accord commercial avec l’Amérique ?

Donald Trump fait un discours sur les tarifs douaniers réciproques à la Maison-Blanche, le 2 avril 2025.
Photo: Brendan Smialowski/AFP via Getty Images
L’accord commercial entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis aurait pu être le plus facile à conclure. Or, ce n’est pas le cas, car l’équipe de négociation de l’UE ne veut lever aucune des barrières non tarifaires européennes ou discuter des limitations imposées aux exportations américaines de produits agricoles, de bétail et de voitures.
Voici les raisons pour lesquelles la conclusion de cet accord aurait pu être rapide :
La plupart des demandes de l’équipe de négociation américaine coïncident avec les préoccupations du rapport Draghi concernant la réglementation excessive et les barrières internes existant en Europe. Selon les estimations d’Eurochambres, le coût de l’hyperréglementation pour l’UE dépasse les mille milliards d’euros par an. Mario Draghi, ex-président de la Banque centrale européenne et ex-Premier ministre italien, a lancé un avertissement dans un article du Financial Times : « Oubliez les États-Unis, l’Europe a réussi à imposer des droits de douane sur elle-même. » Il a cité les estimations du Fonds monétaire international (FMI) qui montrent que les barrières internes, la réglementation et la fiscalité européennes augmentent les prix de 110 % dans le secteur des services et de 45 % dans celui de l’industrie manufacturière.
Si les négociateurs de l’UE avaient présenté un ensemble complet de réductions tarifaires pour l’agriculture, l’élevage et l’industrie automobile, un accord préliminaire aurait pu être signé immédiatement, au bénéfice de tous. Cependant, ces négociateurs n’ont voulu négocier que d’éventuelles améliorations des importations du gaz naturel liquéfié (GNL) et un concept vague de « renforcement des investissements », limitant toute négociation tarifaire aux biens industriels pour lesquels il n’y a pas de différend important.
Les demandes de Washington à l’Union européenne étaient nettement moins exigeantes que celles envers la Chine ou l’Inde. Malheureusement, selon l’agence Bloomberg, les négociateurs européens n’ont voulu proposer que des plans de réduction des tarifs douaniers sur les biens industriels et les exportations agroalimentaires non sensibles, ainsi qu’une clause empêchant les États-Unis d’introduire de nouveaux tarifs pendant la durée des négociations.
L’UE a déclaré que les droits de douane pourraient être réduits progressivement ou par le biais d’un système de quotas, et que des prélèvements plus élevés ne seraient appliqués qu’à partir d’une certaine quantité d’importations. Après examen, il apparaît que ces propositions visent à maintenir toutes les barrières non tarifaires et la majorité des droits de douane européens. Ces droits de douane sont beaucoup plus élevés que ceux des États-Unis dans les secteurs de l’agriculture, de l’élevage, des produits chimiques, de l’automobile et des produits manufacturés.
Les demandes des États-Unis ne sont pas déraisonnables. De plus, l’UE permet l’exemption de nombreuses barrières tarifaires et non tarifaires aux produits en provenance de Turquie ou du Maroc, même de Chine.
La Commission européenne a menacé de nouvelles contre-mesures qui pourraient toucher 95 milliards d’euros de produits américains si les négociations échouaient. Toutefois, l’UE n’a pas beaucoup de raisons de brandir une telle menace. Son excédent commercial avec les États-Unis est si important et les obstacles aux produits américains sont si répandus qu’elle ne peut tout simplement pas riposter efficacement au durcissement de la politique américaine.
L’excédent du commerce de biens de l’Union européenne avec l’Amérique, qui s’élevait à 198 milliards d’euros en 2024 et qui a bondi de 263 % en mars 2025 par rapport au même mois en 2024, n’est pas généré par une coopération libre et les accords commerciaux entre entreprises libres. Dans de nombreux secteurs, les coûts de production et d’énergie de l’UE sont jusqu’à 50 % et 100 % plus élevés, respectivement, que ceux des États-Unis. Et pourtant les exportations de l’UE dépassent massivement celles de l’Amérique.
L’Union européenne devrait comprendre que les droits de douane peuvent être éliminés en quelques minutes si un accord raisonnable est conclu. En outre, les négociateurs de l’UE devraient admettre qu’ils se conformeraient aux recommandations de M. Draghi et que toutes les entreprises, à l’intérieur et à l’extérieur de l’Europe, en bénéficieraient. Ainsi, un accord peut être conclu rapidement et efficacement.
Malheureusement, de nombreux analystes estiment que les négociateurs de l’UE ne sont pas intéressés par la suppression des barrières commerciales, préférant les maintenir à tout prix, même si cela a pour conséquence l’affaiblissement de l’économie de nombreux États membres. Ces négociateurs semblent être plus soucieux de plaire aux bureaucrates et de trouver un bouc émissaire dans l’administration Trump pour la stagnation de l’économie de l’UE que de faire avancer un accord qui profiterait à la fois aux entreprises américaines et européennes.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

Le Dr Daniel Lacalle est le principal économiste de la société de gestion d'actifs Tressis Gestion et auteur de Freedom or Equality, Escape From the Central Bank Trap et Life in the Financial Markets.
Articles actuels de l’auteur









