Des célébrités s’opposent à une supérette dans un quartier chic de Paris, invoquant nuisances sonores, déchets et mendicité

La pétition, intitulée « Sauvegarde quartier Notre Dame des Champs - Vavin : non à l'implantation d'un Carrefour », demande l'arrêt du projet afin de préserver l'âme de notre quartier, situé dans le sixième arrondissement de Paris.
Photo: Crédit photo pétition change.org
Une pétition, s’opposant à l’ouverture d’une supérette dans le très chic 6e arrondissement de Paris, a mis en avant les diverses nuisances que ce commerce pourrait engendrer. Mais elle a suscité de vives réactions en ligne, certains internautes dénonçant l’hypocrisie de certains signataires, parmi lesquels figurent des personnalités comme Catherine Frot ou Alain Souchon.
L’installation d’un Carrefour City au coin des rues Vavin et Bréa de la capitale, à proximité du jardin du Luxembourg, ne passe pas, comme l’a rapporté La Lettre ce dimanche 20 juillet. Plusieurs riverains se sont mobilisés, via un collectif, et une pétition a été lancée par Bruno Segré, ancien journaliste économique. La comédienne Catherine Frot, le chanteur Alain Souchon, son épouse et ses deux fils, l’ancien ministre Jacques Toubon, l’essayiste Alain Finkielkraut et sa femme, l’avocate Sylvie Topaloff, ou encore le dirigeant de presse Denis Olivennes l’auraient signé. Ces célébrités redoutent que l’ouverture de la supérette ne provoque entre autres des nuisances sonores.
Des risques « non négligeables » pour la sécurité
Les opposants, qui demandent « l’arrêt de ce projet » afin de préserver « l’âme » de leur quartier – décrit comme « un lieu de vie paisible où il fait bon vivre » – redoutent que l’arrivée de cette supérette ne transforme durablement leur environnement. Soucieux de préserver leur cadre de vie, ils dénoncent les « nuisances pour les riverains » et les « risques non négligeables » pour leur sécurité, pointant notamment un « problème potentiel en raison de l’ouverture jusqu’à 22 heures, avec vente d’alcool fort libre de vrai contrôle ».
« La zone dite ‘protégée’ de la place face à l’immeuble de l’architecte Henri Sauvage […] doit le rester », explique encore la pétition, qui affirme également vouloir « protéger l’environnement local », avant d’énumérer les facteurs susceptibles de le détériorer : accumulation de déchets, encouragement à la mendicité, entraves à la circulation. « L’ouverture d’un magasin Carrefour entraînerait un afflux de véhicules de livraison et de pollution », est-il encore stipulé.
Enfin, l’auteur du texte estime que ce Carrefour City – qui doit ouvrir ses portes le 21 août prochain – mettrait en péril les petits commerces et les artisans.
« On n’a pas envie d’avoir de la racaille en bas de chez soi ! »
« La police vient dès qu’on l’appelle. Quand on est à plus de 20.000 euros le mètre carré, on n’a pas envie d’avoir de la racaille en bas de chez soi ! », a de son côté indiqué au Monde le coiffeur pour enfants Simon Benbaruk, président de l’association des commerçants.
La députée socialiste Céline Hervieux, qui s’est elle aussi rangée du côté des signataires, a déclaré : « On en a ras-le-bol de cette forme d’uniformisation. Dans le 6e, on est différent, on a envie de garder nos spécificités, l’aspect culturel de Montparnasse, l’accès au beau, une qualité de vie… Ne pas être dans cette marche forcée. »
Cette pétition et ce type de propos ont provoqué la polémique, beaucoup ont dénoncé l’hypocrisie des signataires. Le journaliste Eliot Deval a parlé d’un « conservatisme respectable pour la gauche caviar ». L’essayiste Amine El Khatmi a pointé sur CNews « le double discours ». « C’est-à-dire qu’on prône une société ouverte, inclusive, on veut des migrants, on veut des salles de shoot, etc., mais pas chez soi, parce qu’en bas de chez soi, on a envie de garder un certain cadre de vie », a-t-il analysé.
« Nous voulons juste préserver la beauté et la tranquillité de ce quartier »
« C’est totalement absurde, les gens à l’origine de cette pétition ne sont pas des riches », a défendu auprès du Parisien l’essayiste Alain Finkielkraut. Et d’ajouter : « Nous voulons juste préserver la beauté et la tranquillité de ce quartier. L’arrivée de ce Carrefour City, ça serait la mort de cette place. »
Le chef d’entreprise Denis Olivennes a lui aussi expliqué les raisons de son soutien à la pétition, précisant qu’il n’était « pas contre l’implantation de ces mini grandes surfaces », mais qu’il regrettait la fermeture d’un magasin de jouets qui occupait auparavant les lieux. « Voici mes échanges par sms avec la journaliste du Monde qui n’a retenu bien sûr qu’une phrase à charge. Moi j’habite le 14e pas à Vavin. Mais oui, je suis pour protéger autant que faire se peut l’esthétique des villes et l’équilibre entre petit commerce et grandes surfaces », a-t-il écrit sur X, joignant à son message une capture d’écran de sa conversation avec la journaliste.
Pierre Richard et Ruth Elkrief déclarent ne pas avoir signé cette pétition
Notons que quelques personnalités se sont retrouvées au cœur de la polémique alors qu’elles n’avaient pas signé cette pétition. C’est notamment le cas de Pierre Richard. En effet, celui qui aurait signé serait non pas le célèbre acteur (dont le vrai nom est Pierre-Richard Defays), mais le banquier, fondateur et président de Dexia, comme l’a précisé Bruno Segré au Parisien.
Le nom de la journaliste Ruth Elkrief est lui aussi apparu. Dans un tweet publié ce 19 juillet, elle a indiqué : « Je précise que je n’ai PAS signé la pétition contre le carrefour City. J’ai juste répondu dans la rue à l’initiateur que je ne connaissais pas. Cela n’était en aucun cas un soutien. Je regrette qu’il ait ainsi utilisé mon nom. »
Face à cette controverse, Bruno Segré a indiqué au Parisien n’avoir « tordu le bras à personne pour signer cette pétition ». « Je tiens tout à disposition. Tout ceci ressemble à une campagne de déstabilisation », a-t-il ajouté, pointant du doigt ceux qui « font aujourd’hui machine arrière ». Et de conclure : « C’est une campagne qui va faire bouger les lignes. Notre combat, c’est celui de la défense des commerces de proximité et de la qualité de vie d’un quartier. On ne va pas abandonner. »
« C’est un village d’enfants gâtés qui croient que tout leur appartient »
Le maire LR de l’arrondissement, Jean-Pierre Lecoq, s’est quant à lui retrouvé au cœur des critiques, étant accusé d’avoir autorisé les travaux sans concertation, en contradiction avec ses engagements précédents. Dans les colonnes du Monde, l’édile s’est défendu : « Une grande partie des pétitionnaires ont bossé ou bossent dans la finance. Ils ont contribué à financiariser l’économie et donc à tuer les commerces de proximité les moins rentables. C’est un village d’enfants gâtés qui croient que tout leur appartient. »
Dans un souci d’apaisement, la mairie a toutefois promis l’installation d’un dispositif de vidéosurveillance sur la place. Pour l’heure, la pétition a recueilli un peu plus de 1690 signatures.

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